
Autres informations / 14.08.2008
Edouard de rothschild : « l'associatif n'est pas l'ennemi du dynamisme, c'est plus une question d'homme que de structure. »
Jour De Galop. – Permetteznous, puisque nous sommes à
Deauville, en été, de vous poser des questions détendues et directes qui
tranchent avec les convenances qui lassent les lecteurs. Edouard de Rothschild.
– Le contexte nous y autorise, profitons-en!
Bien qu'actionnaire de référence du quotidien Libération,
vous semblez bouder les journalistes ? C'est inexact. Pourquoi serions-nous là ensemble
pour converser aujourd'hui? Je pense simplement qu'il ne faut pas abuser d'une
fonction présidentielle pour communiquer en permanence, et pour monopoliser la
parole. Les membres de mon équipe et France Galop interviennent souvent dans
les médias et c'est parfait ainsi.
Le monde des courses vous voit peu sur les hippodromes.
C'est bien simple : c'est une question de temps et de
disponibilité. Par exemple, je suis à Deauville en ce début août et vous m'avez
déjà vu trois fois sur l’hippodrome. Hélas, mon implication dans le domaine du
concours hippique, ainsi que mes activités professionnelles, me laissent un
temps limité, surtout en fin de semaine. De sorte que l'on ne me voit pas
souvent aux courses le Dimanche. Je le regrette.
En revanche, mais c'est moins visible, je consacre beaucoup
de temps à France Galop du lundi au mercredi où j'ai de nombreuses réunions et
rendez-vous. Ces activités sont essentielles pour l'avenir des courses mais
évidemment, nul n'est au courant. Elles sont plus importantes qu'un tour aux
courses pour serrer quelques mains.
C'est une conception de la Présidence ?
Puisque vous souhaitez qu'on parle vrai, je dirais que j'ai une conception opérationnelle et efficace
de ma présidence, et non pas une conception représentative et mondaine.
Est-ce à dire que vous privilégiez l'équipe ?
Bien sûr. Le président de France Galop dirige une équipe qui
est double : d'une part, une grande équipe de collaborateurs sous la direction
d'Hubert Monzat, avec des techniciens compétents et fiables, attachés à France
Galop et à l'activité hippique, et d'autre part, une équipe de bénévoles,
Vice-Présidents, Conseil d'Administration, conseillers, avec lesquels je
travaille régulièrement. Et je m'applique à ce que les décisions importantes
soient prises dans un climat consensuel, bien que je n'ai jamais hésité à
arbitrer quand cela s'imposait.
Il faut parfois
prendre des directions fermes, et même si cela ne plait pas à tout le monde, ce
qui est fréquent dans le cadre associatif qui est le nôtre, je tranche et
confirme le cap sans états d'âme.
La rumeur veut que vous soyez interventionniste, y compris
parfois dans des détails qui surprennent. Je suis fondamentalement un décideur
rapide, et donc impulsif et impatient, ce qui est parfois un défaut. Mais je
suis surtout un adepte du contact direct, du téléphone portable et de l’e-mail.
Grâce à cela, il est facile de me faire passer un message, de me demander un
avis ou un rendez-vous. Beaucoup le savent. Je ne me laisse pas enfermer dans
une tour d’ivoire, protégée par des collaborateurs qui filtreraient tout. Ce
n’est pas mon mode de gouvernance qui est plus direct, et sans doute plus
moderne.
Le croyez-vous compatible avec le modèle associatif qui est
celui de l'Institution?
Les gens critiquent le modèle associatif. Il est lent et vieillot,
mais il fait partie de la culture française. Il peut parfaitement fonctionner
dès lors qu’il n’exclut pas les valeurs de l’esprit d’entreprise, dès lors
qu'il exige le dynamisme des acteurs. Si cette adaptation au présent est posée
et réalisée, et c'est ce que je demande sans cesse, le cadre associatif reste
le fondement de notre institution qui regroupe ainsi ses acteurs que sont les
propriétaires, les éleveurs, les entraîneurs et les jockeys.
L'associatif n'est pas l'ennemi du dynamisme, c'est plus une
question d'homme que de structure. De plus, et cet aspect me semble décisif,
l'associatif permet d'œuvrer dans l'intérêt général des courses et de
l'élevage, à l'abri des visées privées des puissants. En ce sens, nous sommes
un modèle de démocratie, et le régime associatif est le garant des grands
équilibres que réclame notre activité.
Quand vous parlez d'équilibre, pensez-vous à la Province ? À
ses nombreux hippodromes ?
Non, la question provinciale n'est pas une question
d'équilibre. J’ai repris à mon compte puis développé la politique de
décentralisation. Sans cet axe de développement majeur, jamais nous n’aurions
pu augmenter les allocations sur un rythme de 5% par an jusqu’en 2007, et de 4%
pour l’année en cours. La Province représente donc un axe de développement au
moment où le marché des jeux en Europe va connaître une profonde mutation. Sous
le contrôle des sociétés-mères du Trot et du Galop, le maillage provincial
incarne une politique du territoire hexagonal qui sera un véritable atout pour
notre activité.
Et les hippodromes si nombreux…
J'y viens. On ne peut pas ne pas se poser la question de
l’organisation globale des courses en France, de son économie, de ses
infrastructures, et donc de ses hippodromes. J’ai demandé qu’on étudie avec objectivité
la pertinence de la “Carte de France” des hippodromes et qu’on examine la place
de chaque hippodrome. Des réorganisations, des économies d’échelle sont
possibles et se réaliseront à brève échéance. Les deux sociétés marseillaises
ont fusionné en une seule, et cela marche formidablement bien. Les deux
sociétés lyonnaises réfléchissent à leurs synergies. Rien n'est figé, et nous
évoluerons dans le bon sens de la rationalité économique et sportive, ainsi que
de la qualité opérationnelle des sites.
Car il y a un critère sur lequel je serai intransigeant :
celui de la sécurité. Je suis interpellé par les nombreuses chutes et incidents
de ces derniers temps. Rien ne peut, à mes yeux, justifier le maintien de sites
dangereux, de pistes inappropriées, voire médiocrement entretenues.
Puisque nous invoquions les équilibres, on connaît votre
passion de propriétaires pour les courses plates. Moins pour celles de
l’obstacle...
En effet, mon histoire et ma culture familiale me portent
vers les épreuves de sélection en plat. Je le revendique évidemment. Mais Le
Président de France Galop que je suis n’oublie pas pour autant cette discipline
où l’élevage français, qu’il s’agisse des pur-sang ou des AQPS, brille par tant
de succès sur les scènes internationales. J’ai régulièrement des partants en
obstacle, entraînés par Jehan Bertran de Balanda qui est un professionnel que
j’estime beaucoup.
C’est sous ma présidence que le week-end international de
l’obstacle d’Auteuil a vu le jour, donnant à l’obstacle une seconde vitrine
médiatique et sportive après celle du Gras Savoye Grand Steeple Chase de Paris.
Je veux aussi
souligner qu’en liant le sort d’Auteuil et de Longchamp dans la négociation
avec la Ville de Paris sur le renouvellement des baux, j’ai assuré la pérennité
des deux hippodromes, sans états d’âme, sans préférence ni parti pris. J’ai la
responsabilité du plat et de l’obstacle et je l’assume pleinement.
Puisque vous avez mentionné nos hippodromes, un mot sur la
qualité des pistes de nos grands champs de courses, comme celui de Deauville où
nous sommes.
C'est un vaste sujet sur lequel nous reviendrons chez France
Galop dans les prochains temps, quand nos instances seront saisies. Du fait de
l'évolution du calendrier qui veut que le galop fonctionne toute l'année, on
court beaucoup plus qu'avant sur tous nos hippodromes "parisiens"
dont Deauville, et les pistes souffrent énormément malgré le professionnalisme
de ceux qui les entretiennent. Certaines pistes de Province connaissent
d'ailleurs la même surcharge. Le problème est grave.
Je proposerai donc une réflexion dans deux directions :
d'abord une complémentarité intelligente et flexible entre l'herbe et le sable
fibré ou autres surfaces synthétiques en région parisienne, ce qui suppose que
nous nous dotions d'au moins une piste de ce type à Paris le plus rapidement
possible. Ensuite, nous réfléchirons à la réfection de nos grandes pistes en
herbe existantes, proposant des utilisations plus intelligentes, autrement
agencées, comme l'hypothèse de scinder la piste de Longchamp en deux pistes
distinctes, pour des compétitions différentes.
Les professionnels vont être heureux de
découvrir que vos préoccupations rejoignent les leurs, ce qu'ils semblent
ignorer. Ils vous imaginent ailleurs…
Je comprends leur méprise. Ils m'ont élu pour que je règle
les grands problèmes politiques et économiques de l'avenir des courses et de
l'élevage. Pas vraiment pour que je leur parle de la piste de Deauville ou de
Longchamp. Et pourtant les deux m'intéressent, je dirais même qu'ils sont liés
dans la politique globale de développement du Galop que j'envisage dans le long
terme.
Puisque vous
mentionniez les grands problèmes, pourriez-vous nous faire un point rapide sur
le sujet crucial de l'ouverture du marché des jeux ? Quelques mots seulement,
car le calendrier fera que je reviendrai plus longuement sur ce sujet avant la
fin de l'année. Mais je ne veux pas du tout esquiver ce champ qui est, comme
vous le savez, décisif pour notre avenir. Nous vivons un bouleversement qui n'a
pas d'équivalent dans l'histoire de notre activité. J'y consacre tout mon temps
et toute mon énergie depuis de nombreux mois, sans que cela se sache sur les
hippodromes. En ce sens, une des raisons qui m'a poussé à demander à Hubert
Monzat de rejoindre France Galop, est précisément son expertise en ce domaine,
expertise qu'il a exercée dans sa collaboration avec Eric Woerth.
Depuis de longs mois,
nous travaillons avec nos homologues du Trot, avec le PMU, avec l'aide des
consultant en stratégie McKinsey, à l'élaboration d'une stratégie propre aux
Sociétés-mères pour affronter positivement l'ouverture du marché des paris
hippiques et sportifs requise par Bruxelles. Nous avons encore eu une réunion
il y a 48 heures pour affiner notre position, et raffermir l'unité des
dirigeants des deux disciplines qui constituent les courses françaises.
Est-ce à dire que Trot et Galop sont d'accord sur tout ?
Contrairement à de fausses rumeurs, je peux vous confirmer que nos positions
sont identiques, que nous avons défendu solidairement et victorieusement le
principe du mutuel pour les paris hippiques, et que nous sommes décidés de
relever ensemble le défi des paris sportifs, quelles que soient les formes
qu'ils seront amenés à prendre, suivant la volonté des Fédérations sportives
concernées. Cette politique unitaire et paritaire des Société-mères se retrouve
au sein de notre filiale commerciale qu'est le PMU, qui ne changera pas de
statut juridique. Quant à notre objectif principal du maintien d'un "retour"
identique à la filière des produits des enjeux, je peux vous confier que le
Gouvernement et nous-mêmes travaillons ces jours-ci en vue d'une solution
législative très proche qui garantirait les ressources de notre activité.
Pouvez-vous nous en dire plus sur cette ouverture ? Ce
serait à la fois imprudent et prématuré, et même discourtois pour mes
administrateurs et collaborateurs avec qui je ne me suis pas encore entretenu.
Irez-vous aux ventes de yearlings vendredi ? Certainement.
C'est un des temps forts de l'élevage français et européen, et cela fait partie
de mon information et de ma mission d'y prêter attention. Le dynamisme et les
bons résultats récents de l'élevage français fortifient la maison Galop.
Chacun sait que vous vendez deux yearlings vendredi,
notamment un poulain par Galileo (lot 30) qui pourrait attirer les convoitises
des grands acheteurs. Qu'en attendez-vous et quels sont vos pronostics pour ces
ventes d'Arqana ?
Le financier que je suis m'enseigne qu'il est bien téméraire
d'anticiper la tendance d'un marché aussi spécifique que celui des yearlings.
Aussi, en ce qui concerne la tenue générale, je la souhaite positive pour tous
les éleveurs français qui réaliseront en quatre jours l'essentiel de leur
recette annuelle, et qui ont beaucoup investi pour se hisser au niveau
international. Quant au poulain que vous mentionnez, en tant qu'éleveur, je
l'aime beaucoup moi aussi, et je souhaite qu'il soit très bon pour celui qui
l'achètera, quel que soit son prix.
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