
Autres informations / 20.08.2009
Interview exclusive d’édouard de rothschild
L’affaire Porzier, l’état de
la P.S.F. de Deauville, son style vestimentaire aux courses cet été… Sujets
chauds et critiques : le président de France Galop répond aux questions que
beaucoup de professionnels se posent.
Jour de Galop. – Ces derniers
temps, de nombreuses critiques à votre encontre circulent dans le paddock de
Deauville.
Edouard de Rothschild. – De
quelle nature ?
Vous passez vos vacances à
Meautry, et l’on ne vous voit pas aux courses ?
Permettez-moi de reprendre
votre formulation. Je passe effectivement mes vacances à Touques, chez moi, en
famille. Je pourrais être, comme mon prédécesseur, dans des îles lointaines
durant le mois d’août, et personne n’y verrait à redire. Comme tout le monde,
je consacre mes journées à ma famille qui vient de s’agrandir, et à mes activités
sportives. J’étais aux courses le premier week-end, ainsi que celui du “Le
Marois”, et j’y retournerai sans doute avant la fin du mois.
Justement, quand vous vous y
êtes rendu, vous étiez dans une tenue de vacancier plutôt que dans un costume
de président. Et cela a déclenché des réprobations chez certains.
C’est toujours le même sujet.
Je suis effectivement allé aux courses, tel un vacancier sur la côte normande.
Et c’est pour cela que j’ai demandé à mon neveu, présent pour la circonstance,
de remettre le trophée du Prix Rothschild à mes amis Alain et Gérard Wertheimer.
Tout cela est cohérent : je considère Deauville comme un hippodrome d’été et de
vacances, et je souhaite que les turfistes s’y rendent nombreux, en tenue
convenable et décontractée. C’est ce que j’ai fait très volontairement, pour
montrer l’exemple, en vacancier riverain, et cela participe de la modernité nécessaire
de notre activité. Cependant, vous ne me verrez jamais habillé ainsi lors d’un
dimanche à Longchamp ou à Chantilly, où il sied de respecter une certaine
tradition vestimentaire à laquelle j’adhère.
Mais vous avez choqué des
habitués de l’enceinte. Il faut vivre avec son temps, et la naphtaline a fait
suffisamment de mal aux courses. Nos hommes politiques ne se baladent plus en
costume bleu foncé sur les marchés de Provence, pas plus que notre ministre des
Armées, que l’on a vu heureux et décontracté en jean, aux ventes de yearlings
de Deauville ce dernier week-end. Je suis en place pour faire évoluer le Galop
dans le contexte du XXIe siècle, pour le faire progresser et relever les défis
du moment, pas pour reproduire et figer des apparences sans importance.
Parlons donc de sujets plus
sérieux.
Vous évoquiez les ventes
Arqana de yearlings qui se sont achevées lundi. Qu’en pensez-vous ?
Je les ai suivies à distance
avec beaucoup d’attention pour plusieurs raisons. D’abord parce que je suis moi-même
éleveur, et ces ventes sont révélatrices des penchants des marchés pour tel ou
tel étalon ou courant de sang. Ensuite, sur une portée plus économique et
politique, je sais que le déroulement de ces ventes est déterminant pour les
éleveurs français, sachant que bon nombre d’entre eux commercialisent une
partie de leur production. Et, comme vous l’avez annoncé dans vos dernières
éditions, la vente a été un grand succès dans la mesure où le prix moyen et le
chiffre d’affaires ont progressé cette année, à l’encontre des prévisions. Dans
notre contexte de crise, ce résultat positif est une sorte d’heureuse surprise.
En tirez-vous des
enseignements ?
Bien sûr. Que le marché de
Deauville ne cesse de progresser, et que cette croissance l’installe comme un
des pôles majeurs en Europe, ce qui n’était pas le cas auparavant où la
domination anglo-saxonne était manifeste. Cette résistance du marché français me
semble tenir à plusieurs facteurs :
les indéniables progrès des éleveurs français
qui investis sent et qui améliorent ainsi la qualité de leur production;
le dynamisme d’Arqana qui démontre que le
changement et le rajeunissement des organes du monde hippique sont nécessaires
et bénéfiques;
l’efficacité du modèle français de financement
de la filière hippique via le pari mutuel qui autorise un retour décent pour
tous les professionnels.
Alors que nos partenaires
européens connaissent de grandes difficultés, de l’Irlande à l’Italie, de la
Grande-Bretagne à l’Allemagne, la France affiche, grâce aux bons résultats
comparatifs du PMU, une robustesse que nous envient tous nos voisins, malmenés
par le bookmaking.
N’avez-vous pas des remarques
plus personnelles?
Si. Par exemple le nombre important de
yearlings issus d’étalons stationnés à l’étranger. C’est une bonne chose quand
cette statistique confirme l’européanisation de l’élevage et de son marché,
mais elle est préoccupante quant à la popularité de nos reproducteurs
nationaux. J’ai fait part de ce souci au président des éleveurs, Bernard
Ferrand, qui me
remettra prochainement une
étude. Sur ce sujet, une petite satisfaction très personnelle de l’éleveur
français que je suis : j’ai constaté que mon ancien cheval, Archange d’Or,
stationné au Haras de la Reboursière chez Aliette Forien, avait eu deux
yearlings de sa première production qui se sont vendus à 200.000 euros chacun :
c’est une sorte d’exploit pour un jeune étalon qui fait la monte à 4.000 Euros
!
L’entraîneur Yann Porzier,
mis en examen il y a bientôt quatre ans, a vu sa licence “suspendue” par France
Galop. Depuis, l’instruction traîne, les faits reprochés ne semblent pas
établis, et nul ne comprend désormais cette suspension-sanction qui s’apparente
à de l’acharnement.
Il s’agit d’une affaire dont
la justice française s’est saisie, qui n’est pas close, et le président de
France Galop a une exigence de réserve. Je me suis rendu en décembre dernier à
une convocation du juge d’instruction. J’en ai averti les commissaires de
France Galop qui sont les seuls habilités à décider de rendre sa licence à Yann
Porzier. Je vous rappelle que, statutairement, les commissaires sont
indépendants, et que je n’ai aucun pouvoir pour les contraindre à prendre telle
ou telle décision qui est de leur unique ressort puisque juridictionnelle.
Mais Monsieur le Président,
on ne peut pas être présumé innocent et se voir, de fait, condamné à ne pas
exercer sa profession pendant maintenant plus de quatre ans, alors que Kieren
Fallon, jugé coupable de faits illicites avérés, va retrouver sa licence au
bout de 18 mois !
Je partage ce sentiment, et
j’estime que cette malheureuse affaire, où les commissaires ont réagi
normalement lors de la mise en examen, a désormais trop duré. Aussi, j’espère
qu’elle va trouver rapidement une issue.
Que pensez-vous des critiques
formulées par certains entraîneurs sur l’état de la P.S.F. à Deauville. Cette
piste en viscoride est la première que France Galop ait installée en France, il
y six ans maintenant. Elle était initialement conçue pour l’hiver, et elle a apporté
toute satis faction en cette saison. Cependant, on a rapidement constaté
qu’elle était plutôt lourde l’été, par grande chaleur. Les problèmes actuels ne
sont donc pas nouveaux, nous en héritons. Yves Deshayes, le directeur de
Deauville, et Hubert Monzat, s’occupent de la question en procédant à des
améliorations ponctuelles. J’observe queLyon-La Soie, où la piste est récente,
rencontre les mêmes problèmes. Nous devons donc en tenir compte, et peut-être
réfléchir à un autre revêtement qui soit opérationnel aussi bien dans le froid
que dans la chaleur. Nous reviendrons sur ce sujet bientôt car nous doterons
d’autres hippodromes de ce type de pistes dites “tous temps”.
Vous avez donc étudié cette
question ?
Ne vous méprenez pas sur mes
propos initiaux : je vous ai dit que j’étais ici en vacances, que je consacrais
mes jour nées à ma famille et au sport, mais cela ne m’empêche nul lement de
recevoir et rencontrer, tout au long de ce mois, mes collaborateurs et les
interlocuteurs importants de l’Institution. C’est en ce sens que j’ai vu
plusieurs fois Hubert Monzat, ainsi que les acteurs principaux des courses
comme de grands responsables du Trot, les responsables des organisations
professionnelles du Galop, et
hier Philippe Germond, le
nouveau président du PMU ; et d’autres personnalités sont programmées. Vous
constatez que mes vacances sont quand même celles d’un président de France
Galop…
On connaît votre goût du
paradoxe. Est-ce dans cet esprit que l’on vous a vu aux courses à Cabourg ?
Pas du tout. Je répondais à
une invitation de Paul Essartial avec qui j’entretiens des relations proches.
Le spectacle m’a plu, et Paul va l’inviter à driver ! Je suis un homme de
cheval et le fait de me mettre au sulky me tente beaucoup. Vous savez, le
terrain me passionne, à l’inverse des protocoles. Me rapprocher du trot par ce
projet sportif personnel me passionne, et ne peut que contribuer à la
solidarité entre les deux disciplines.
Puisque vous mentionnez
Philippe Germond, comment jugez-vous ses premiers pas à la tête du PMU ?
Avec Dominique de Bellaigue,
nous avons sollicité Philippe Germond qui a accepté notre proposition de
prendre la tête du PMU. C’est un choix réfléchi, important, qui engage tout
l’avenir des courses françaises. Si Philippe Germond échouait dans son
entreprise, ce serait aussi mon échec. Dans le cas inverse, qui est le plus
probable, ce sera une victoire collective. Car nous avons désormais un comité
stratégique à trois qui se réunit tous les mois, et qui arrête les grandes
orientations dans le cadre nouveau de l’ouverture des paris hippiques et
sportifs.
Dans ce contexte, Philippe
Germond s’est très rapidement adapté à ce monde qui lui était en partie
étranger, et je constate que tous ses interlocuteurs sont impressionnés par la
rapidité avec laquelle il s’est saisi de toutes ces questions. Vous même, me
semble-t-il, avez suivi avec intérêt son brillant exposé à l’assemblée générale
du Syndicat des éleveurs à Clairefontaine mardi matin.
Je crois que nous sommes
désormais prêts à affronter la réalité inédite de l’ouverture à la concurrence,
ainsi que la diversification qui est à l’ordre du jour au PMU. Attendons
l’adoption de la prochaine loi sur ce secteur, et je vous confirmerai les
directions que nous échafaudons, le président du Trot, Philippe Germond et
moi-même.
Quel est le fait marquant de
cet été pour vous ?
Vous me savez passionné par
le cheval, et j’ai vu de mes propres yeux, un phénomène rare : elle se nomme
Goldikova. Tant dans le Prix Rothschild que dans le Prix Jacques Le Marois,
elle s’est réellement envolée, comme une extraterrestre. Il y avait elle, et
les autres, comme s’il s’agissait de deux races distinctes. C’est le joyau de
cet été, il est français, il a été fabriqué en Normandie par une grande famille
d’éleveurs. J’ai été vraiment touché par la classe de cette étoile authentique.
Ce sont de tels événements qui font rêver les turfistes et les passionnés que
nous sommes, ce sont ces événements d’exception qui fidélisent et encouragent
les professionnels et le public.
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