
Autres informations / 15.06.2010
Gerard larrieu : « le cheval est un lien entre la france et le qatar »
LE MAGAZINE
Professionnel reconnu dans le monde du pur-sang tout comme
dans celui du pur-sang arabe, Gérard Larrieu est le parfait exemple de la
synergie possible et nécessaire entre les deux races et des nombreuses
opportunités que celle-ci procure. Entretien.
Originaire du Sud-Ouest, terre d’élevage par excellence du
cheval arabe, Gérard Larrieu se destinait au départ à une carrière d’entraîneur
: « J’avais dans l’idée de travailler pour François Boutin, dont la réputation
était flatteuse. Après quelques stages, je rentrais à son service pendant
quatre ans. Il m’a ensuite envoyé aux USA chez Mackenzie Miller, un entraîneur
réputé de la Côte Est avant de pour suivre mon apprentissage dans certains
haras du Kentucky. C’est à cette époque que j’ai rencontré des clients améri cains
désireux d’acquérir des chevaux en France. J’ai alors acquis pour eux un cheval
de François Boutin, Interco, qui a connu beaucoup de succès aux USA. Rentré en
France, je me suis donc orienté sur le courtage, ce qui m’a permis de
rencontrer des clients japonais et des personnes comme Jean-Louis Bouchard avec
qui j’ai acheté des yearlings . C’était pendant les années 1985-1990. Le succès
a été au rendez-vous grâce à des chevaux comme Caerlina, gagnante du Diane en
1991, Celtic Arms (Jockey Club 1994) que j’avais acheté à ses débuts tout comme
Ragmar (Jockey Club 1996) et enfin Dream Well (Jockey Club 1998) et Blue Canari
(Jockey Club 2004), acquis yearlings. Avec la disparition progressive de la
clientèle nipponne, je me tourne à l’aube des années 2000 vers celle du Golfe
Persique et tout naturellement vers le cheval arabe. En effet, mon premier
achat équin, vers l’âge de 15 ans, est une jument arabe. Je l’emmenais dans
tous les concours de modèle et d’allure car à l’époque je ne m’intéressais pas
aux courses pour cette race. »
Cet intérêt soudain des familles régnantes des Pays du Golfe
pour le cheval arabe incite donc Gérard Larrieu à répondre à leur demande sans
hésiter: « Je commence avec quelques achats pour le Cheikh Mohammed Al Thani,
qui était alors Ministre de l’Economie du Qatar et c’est
comme cela que nous obtenons Arawak d’Aroco, un vrai cham pion. Ce dernier
s’impo sera pendant plusieurs années comme le meil leur cheval arabe et remportera
le Derby réservé à sa race à Chantilly le même jour ou Ragmar s'adjugea le
Jockey Club. A ce
moment, le Cheikh Mohammed et son frère, le Cheikh Abdullah Al Thani, Ministre
de l’Intérieur, se tournent réso lument vers la France pour acquérir des
chevaux et consti tuer un capital génétique. Cette décision est d’ailleurs
aujourd’hui à l’origine de leur succès puisque tous leurs bons chevaux sont
issus des juments françaises achetées à
l’époque. Leur investissement a
été total puisqu’ils n’hésitaient pas à se dépla cer
personnellement pour visiter les élevages de la région ! C’est peut être le
début de cette relation privi légiée de la France et du Qatar et pourquoi ce
pays sponsorise aujourd’hui le week-end de l’Arc de Triomphe. Il faut d’ailleurs
savoir que ces dirigeants par-
lent couramment français. Le cheval a été le lien entre les
deux pays. En parallèle, je commence à travailler pour Shadwell, l’entité
d’élevage du Cheikh Hamdan bin Rashid Al Maktoum de Dubai alors dirigé par un
jeune manager, Richard Lancaster. Avec lui, nous faisions le tour des meil leurs
élevages français deux trois fois par an et cette col laboration dure
maintenant depuis 15 ans. A la clé, quelques très bons chevaux tels Bengali
D’Albret, Madjani (triple gagnant de la Dubai Kahayla Classic) et une jumen terie
qui fait de Shadwell, une organisation de premier ordre. Cette confiance du
Cheikh nous permet d’avoir quelques étalons arabes de renom (Madjani, Prince
d’Orient, Al Saoudi..) stationnés sur notre sol, notamment chez moi. En effet,
l’activité d’élevage m’intéresse tout autant que le courtage et grâce à mes
deux frères, nous nous occupons d’une centaine de chevaux répartis sur trois
haras dans le Sud-Ouest, la moitié du pur-sang anglais, l’autre moitié du pur-sang
arabe. »
Cette collaboration avec Shadwell va permettre d’aller plus
loin dans la symbiose entre le monde du pur-sang et celui du cheval arabe : «
Grâce à ce travail, Richard Lancaster est tombé sous le charme de la France et
a, de ce fait, incité Shadwell à aller plus loin dans leur relation avec les
courses françaises, permettant sans doute le sponsoring chaque année de la
journée du Prix Minerve à Deauville, qui est une vitrine pour le pur-sang
anglais ! » La boucle est bouclée.
« Mon premier achat équin, vers l’âge de 15 ans, est
une jument arabe. je l’emmenais dans tous les concours de modèle
et d’allure car à l’époque je ne m’intéressais pas aux courses pour cette race.
»
Le cheval arabe représente une véritable économie dans tout
le Sud de la France, " que ce soit pour les courses, l'endurance et le
show. Les Cheikhs, en effet, apprécient la discipline de l'endurance où ils
peuvent monter eux-mêmes les chevaux. Bref, les mêmes propriétaires que vous
retrou vez dans les colonnes de gauche des programmes de Longchamp sont ceux
qui participent à des courses d'endurance comme j'ai pu en voir dans la forêt
de Compiègne. Le contraste est saisissant d'ailleurs entre un dignitaire du
Golfe en train de s'occuper de son cheval, un seau à la main et le même, qui le
lendemain, est entouré de ses proches dans la tribune officielle de Longchamp,
quasi inaccessible. Cela prouve bien une nouvelle fois que les passerelles
existent dans l'univers du cheval."
C'est également la possibilité " pour tout un chacun,
d'ac céder au plus haut niveau des courses. En effet, le cheval arabe permet à
de modestes propriétaires et éleveurs d'avoir une chance d'être compétitif face
aux meilleurs. L'excellence française dans ce domaine, est un atout de choix.
Certains pays émergents, comme le Maroc, la Libye, qui ne peuvent encore
rivaliser dans le domaine du est un atout de choix. Certains pays émergents,
comme le Maroc, la Libye, qui ne peuvent s'intéresser et investir dans les
courses grâce au cheval arabe avec une réelle chance d'être au départ d'une
grande course internationale un jour.
En effet, les pur-sang
arabes pur sang, peuvent être entraînés et élevés dans ces pays là plus
facilement. Cette entrée en matière
induit tout naturellement ensuite une passerelle vers le pur-sang. Je prends
pour exemple un de mes clients d'Abu Dhabi, qui après avoir eu de nombreux che
vaux arabes, m'a demandé un jour un pur-sang. J'ai acheté Marinous, qui était chez Freddy
Head. Ce cheval a ensuite gagné le Grand Prix du Croisé-Laroche avant de bien
courir à Dubai puis de gagner la plus grande course pour pur-sang du Qatar.
Depuis, ce propriétaire investit largement dans le pur-sang comme le prouve ses
deux achats aux ventes ARQANA pour des sommes entre 100 et 200.000 euros."
« les mêmes propriétaires que vous retrouvez dans les colonnes de gauche des programmes de longchamp
sont ceux qui participent à des courses d'endurance comme j'ai pu en voir dans
la forêt de compiègne. »
Ce lien entre la France et le Golfe Persique, noué grâce au
cheval arabe, un "véritable produit de qualité française", doit être
aujourd'hui encouragé et sauvegardé : "notam ment grâce aux allocations.
Il faut que les institutions pren nent réellement conscience de cette activité
car il n'est pas normal que ce soit la filière elle-même, à hauteur de 61%, qui
assure ce financement surtout quand le cheval arabe permet d'amener de l'argent
frais dans les courses de pur sang grâce au sponsoring et à l'investissement de
leurs propriétaires. Il me semble donc injuste que France Galop en retour ne
nous accorde "que des miettes". Il faut voir la réalité des choses.
Le cheval arabe a donné beaucoup plus au pur-sang anglais que l'inverse. De
plus, si l'on veut gar der nos meilleures poulinières, il est urgent que nos
allo cations soient suffisantes afin de ne pas avoir à les vendre plutôt que de
les voir filer à l'étranger. Dans dix ans, si rien n'est fait, la situation
peut être dramatique pour le cheval arabe en France. Enfin, les règles
concernant le tracé géné tique des chevaux doivent être sérieusement durcies et
approuvées par tous afin d'éviter que d'apprentis-sorciers ne viennent fausser
la donne."
Le destin croisé du cheval arabe et du pur-sang, à travers
l'action d'un professionnel comme Gérard Larrieu, montre bien tout le bénéfice
que les courses françaises peuvent en tirer, d'un point de vue sportif,
économique et financier. Le renforcement de cette alliance sera la grande force
de nos courses de demain.
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