
Autres informations / 29.07.2015
Andrea atzeni, le nouveau dettori
Le
Dettori nouveau est arrivé. Et Frankie, l’original, est le premier à féliciter
Andrea Atzeni. Il n’hésite pas à déclarer, suite à sa très courte défaite avec
Eagle Top (Pivotal), face à Postponed (Dubawi) et Andrea Atzeni dans les King
George and Queen Elizabeth Stakes (Gr1) : « Deuxième, battu d’un nez dans les
"King George", c’est très embêtant mais ça l’est un peu moins quand
on est devancé par un cheval monté par un grand jockey, un garçon adorable en
plus. Être à la photo avec Andrea Atzeni, que l’on soit gagnant ou battu, cela
veut dire que l’on a bien monté. »L’admiration de Frankie pour Andrea Atzeni,
24 ans, ne date pas du 25 juillet dernier. Il avait déjà remarqué son futur
adversaire et successeur quand celui-ci n’était qu’un gosse. À la fin de
l’année 2009, alors qu’Andrea Atzeni achevait sa deuxième saison en tant que
jockey, Frankie Dettori avait déclaré dans une interview-bilan, à propos des
jeunes jockeys en Angleterre : « Il ne faut pas trop regarder les statistiques.
Même s’il n’a pas réussi à décrocher le titre de meilleur apprenti, il n’y a
qu’un seul crack : Andrea Atzeni. Il est encore un peu sauvage mais il a le
talent pour arriver au top. S’il comprend bien le milieu où il est tombé, il va
devenir un super jockey. » Un peu moins de six ans après cette prophétie,
Andrea Atzeni est devenu un grand, tout en restant le garçon qui était parti de
Nurri, un village de 2.000 habitants au milieu de la Sardaigne, pour tenter sa
chance sur le continent. Frankie Dettori le décrit ainsi : « Je l’ai surnommé
Gavino, un prénom très commun en Sardaigne, parce qu’il ressemble beaucoup aux
bergers que l’on trouve dans les montagnes de l’île. Mon père vient de
Sardaigne, j’ai une maison là-bas, et en voyageant à l’intérieur des terres,
loin des côtes, j’ai rencontré des garçons comme Andrea. Ils sont durs, têtus,
très honnêtes et avec un grand coeur. Je rigole avec lui… Nous sommes aussi
différents que le soleil et la lune. Je l’adore, même s’il est un adversaire
très coriace, et je suis heureux quand quelqu’un dit qu’Andrea est le nouveau
Dettori. »L’édition de dimanche de La Nuova Sardegna, le quotidien généraliste
de l’île, affichait en Une la photo d’Andrea Atzeni, et, dans la première page
de la rubrique "sports", le grand titre était pour les deux jockeys
alors que la dernière étape du Tour n’avait droit qu’à un petit écho.
LE PALIO
DE SIENNE COMME PREMIER REVE
Le rêve
d’enfant d’Andrea Atzeni était de devenir un jockey du Palio, comme son cousin
Giovanni, surnommé Tittia ("quel froid" en argot de Sardaigne), qui a
remporté trois victoires à Sienne. Il rentra alors chez Gigi Bruschelli, le
célèbre Trecciolino, le caïd du Palio. Le garçon était un diable sur les
chevaux mais il n’avait pas le gabarit pour monter à cru dans ces courses où
tout est permis. « Avec ses petites jambettes, il ne pouvait pas faire carrière
dans le circuit du Palio, raison pour laquelle il est parti pour Milan et
l’écurie d'Alduino Botti », raconte Natalino Urraci. Ce petit entraîneur
installé a San Siro a toujours suivi la carrière d’Andrea Atzeni, qu’il
considère comme son filleul. Il poursuit : « Il vient de mon village, Nurri, et
à l’école, il a été éduqué par ma soeur Eleonora. Je connais sa famille et le
petit Andrea venait tous les jours me chercher à l’écurie, une fois terminé son
travail chez Botti. J’avais deux jeunes jockeys venus comme lui de Sardaigne et
il passait tout son temps avec eux. Je me souviens qu’ils se moquaient de lui
parce qu’il n’avait pas encore sa licence, et un jour, il les a défiés dans une
course en ligne droite, sans selle. Il a gagné de cent mètres. »
ECOLE
FERMEE EN ITALIE, DIRECTION L’ANGLETERRE!
La
victoire d’Andrea Atzeni dans les "King George" a été célébrée comme
une victoire italienne, mais il serait plus juste de dire que le garçon est
devenu un top-jockey malgré tous les efforts de l’Italie pour l'empêcher de
développer son talent. L’école de jockeys de Pise, l’équivalent italien de
l’Afasec, avait suspendu l'enseignement au moment même où Andrea était prêt à
l'intégrer. Enrico Querci, directeur de l’école de Pise et parrain de tous les
jeunes jockeys italiens, explique: « L’école était soutenue par les fonds européens
de formation professionnelle et par l’Unire, qui était alors la société-mère
des courses en Italie. Suite à un problème bureaucratique, les fonds du F.S.E.
furent suspendus pour deux années et l’Unire n’a pas voulu assumer la totalité
des frais pour la formation des jeunes jockeys. C’est pour cela que l’école a
été bloquée pendant deux ans. Andrea m’avait alors demandé s’il devait attendre
la reprise ou s’il devait aller ailleurs. Je l’ai poussé vers l’école des
jockeys à Newmarket. Il est revenu à Pise pour gagner le Ribot Cup, notre
tournoi pour les jeunes jockeys. Il est resté le garçon très simple qu’il
était. » Natalino Urraci, en vieux sage, ajoute : « C’est comme si Andrea avait
gagné au Loto. En Italie, il n’aurait jamais réussi la même carrière. Il mérite
tout ce qu’il a. C’est un garçon sans vice. Quand ses confrères prenaient une
petite bière, lui buvait de l’eau plate. Il ne pense qu’à son travail. Il a
voulu devenir jockey et il est devenu un top-jockey. Mais s’il avait décidé de
devenir berger, il serait devenu un top-berger. Pareil s’il avait voulu devenir
médecin… Le mental et l’application dans le travail font toujours la
différence. Et surtout, Andrea n’a pas oublié ses racines. Après sa victoire dans
le Derby, et celle de son cousin Tittia dans le Palio, ils ont organisé une
fête à Nurri. J’étais là, il y avait plus de quatre cents invités, mais à la
fin tout le pays était sur la place ! »
CHEZ
MARCO BOTTI, ENTRE ITALIENS…
Andrea
Atzeni est donc parti pour Newmarket, et ce en compagnie d'un autre Italien,
Antioco Murgia. Son anglais se limitait à une dizaine de mots : Derby, Marilyn
Monroe, rock and roll... Andrea a été collé en anglais à son premier examen à
l’école de Newmarket, alors qu’Antioco avait réussi sa licence du premier coup.
Après avoir travaillé pendant six ans chez Godolphin, ce dernier a posé ses
valises à Chicago. « Au début, c’était difficile pour lui mais il a vite
appris, avec l’aide des jeunes filles anglaises », rigole Marco Botti, son maître
d’apprentissage. Travailler dans un autre pays n’est jamais facile, encore plus
pour un garçon de seize ans et demi. « Andrea est un garçon sérieux et je lui
ai fait confiance depuis ses débuts. Moi-même, je venais de m’installer, je
n’en étais qu’à ma troisième saison quand Andrea a eu sa licence d’apprenti.
Cela n’a pas été facile parce que les propriétaires étaient prêts à le faire
sauter à la première faute et ils m’accusaient de le faire monter parce qu’il
était italien. S’imposer à l’étranger est très dur, en Angleterre bien sûr,
mais je pense que c’est la même chose dans tous les pays. Il ne suffit pas
d’être bon, il faut être très, très bon. Andrea est un très, très bon jockey,
l’un des cinq meilleurs en Angleterre, et je pense que pour lui, le passage
chez Roger Varian s’est révélé décisif. Il n’était plus le petit jockey italien
qui montait pour un entraîneur italien des chevaux appartenant souvent à des
propriétaires italiens. »
LA
RENCONTRE AVEC LUCA CUMANI
À la
moitié de l’année 2013, Andrea Atzeni avait déjà gagné son premier Gr1 (le
Premio Lydia Tesio avec l’allemande Sortilège) et son premier Derby italien
(avec Biz the Nurse). Il faisait partie des jeunes jockeys prometteurs et montait
pour Roger Varian. Luca Cumani avait une pouliche, Emirates Queen, dans les
Lancashire Oaks, un Gr2 qui se disputait le même jour que les Eclipse Stakes.
La majorité des grandes cravaches avaient choisi de monter à Sandown. Luca
Cumani raconte : « J’ai proposé au cheikh Mohammed Obaid le nom d’Andrea Atzeni
et il m’a répondu : "Jamais entendu parler". Je lui ai expliqué que
c’était un bon jockey et je lui ai demandé de lui faire confiance. Deux minutes
après la victoire d'Emirates Queen, j’ai reçu un coup de fil du propriétaire,
qui m’a dit carrément : faites-lui signer un contrat ! » Luca Cumani fut le
premier patron d’un certain Frankie Dettori et il est donc dans une position
privilégiée pour comparer les deux pilotes : « À 24 ans, Frankie avait déjà sa
place parmi les top-jockeys en Angleterre [vingt victoires de Gr1, ndlr] alors
qu’Andrea vient d’y arriver tout récemment et il est encore en pleine
progression. Frankie était plus précoce mais Andrea est sur la bonne voie et va
devenir le prochain Dettori. Tout comme Dettori, Atzeni est né pour être un
jockey. Il a le physique pour le job : il est léger, avec des jambes pas trop
longues, et c’est un athlète très fort au niveau des épaules. Il a une bonne main
et un grand équilibre. Les chevaux galopent pour lui et, en plus, il écoute et apprend
beaucoup de ses erreurs. Frankie et Andrea ont très peu de choses en commun du
point de vue du caractère et de l’approche au métier. Frankie est flamboyant.
Il peut avoir des hauts, très très hauts, et des bas. Quand il s’anime, il est
impossible à arrêter! Comme disait un ami, il faut l’attacher à un arbre pour
l’empêcher de gagner des courses. Andrea est un garçon plus tranquille, un peu
timide, avec une tête très froide. Mais il a montré qu’il avait du caractère
cette année. Son rôle de premier jockey chez Qatar Bloodstock, avec les chevaux
chez plusieurs entraîneurs, n’est pas facile à gérer, mais il a trouvé ses
marques et heureusement, samedi, il était disponible pour monter Postponed… »
VARIAN,
L'HOMME DECISIF
Marco
Botti a raison. La rencontre avec Roger Varian a changé la carrière d’Andrea
Atzeni. Monter de bons chevaux pour une écurie de premier niveau lui a donné la
confiance. Cependant, un crack ne changera pas un jockey moyen en vedette. Il
faut jouer sa chance au quotidien, même dans un petit handicap couru sur un
hippodrome anonyme, et profiter des occasions dans les bonnes courses. Il
existe des dizaines de bons jockeys qui n’ont pas réussi à devenir des top-jockeys.
Il faut franchir le cap. Dettori, l’original, explique : « Mon petit Gavino l'a
franchi en automne dernier, au cours de deux épreuves. Dans les Dewhurst
Stakes, avec l’outsider Belardo, il est resté froid comme la glace en attendant
le passage, et il a gagné. Dans le Racing Post Trophy, il avait la pression sur
ses épaules et n’a pas hésité à aller devant avec le favori. Un jeune jockey
qui fait ça a des nerfs d’acier! Cette année, il a passé un nouveau cap. Il
n’était pas bien parti dans son nouveau boulot pour Qatar Racing et nous avions
discuté sur ce sujet. Moi, à sa place, j’aurais sûrement vite déprimé. Gavino
n’a pas lâché le morceau, il a gardé la tête froide et le voilà encore, dur
comme toujours et plus fort que jamais. »
LE
DETTORI NOUVEAU EST ARRIVE ET L’ANCIEN S’AMELIORE EN PRENANT DE L'AGE.
L’Italie
en crise cherche à se consoler avec la réussite de ses jockeys : Dettori,
Atzeni, Mirco Demuro au Japon, le petit Demurino (Cristian) et Umberto Rispoli
en France. Mais séchez donc ces larmes de crocodile ! Si les meilleurs talents sont
obligés d'émigrer pour trouver leur place, ce n’est pas glorieux pour les
courses italiennes. Il faut dire un grand bravo aux professionnels qui ont
démontré leur talent et leur courage, et mettre des bonnets d’âne aux
dirigeants qui ont détruit tout ce qui avait été construit durant des décennies
de labeur.
LANFRANCO
DETTORI ANDREA
ATZENI
Naissance
Milan, 15 decembre 1970 Nurri, 26 mars 1991
Victoires
1re saison 22 (1988) 30
(2008)
Premier
Groupe Select Stakes 15 septembre
1989 H. Liebrecht Preis
21 octobre
2012
18 ans, 274 jours
21
ans, 209 jours
Premier
Gr1 Queen Elizabeth II
Stakes, Premio
Lydia Tesio, 28 29 septembre 1990 octobre
2012
19 ans, 279
jours 21
ans, 216 jours
Champion
apprentis 1989 (71 victoire) jamais
Champion
jockey 2 jamais
Saison + 100 victoires 5 2
Meilleure
saison 233 (1994) 125
(2014)
Victoires
Gr 98 33
Victoires
Gr1 29 8
Vous aimerez aussi :

La course du quinté décalée à la suite d’un problème technique du PMU
La course du quinté décalée à la suite d’un problème technique du PMU Un incident technique a empêché la prise de paris sur l’application...
22 janvier 2021
Un plan de bataille ambitieux pour gagner la guerre du bien-être
Un plan de bataille ambitieux pour gagner la guerre du bien-être En quoi consiste ce plan d’action opérationnel pour le bien-être équin ? Pierre Préaud et...
22 janvier 2021