Chantilly, prix du jockey club (gr1) : de l’emotion et des emotions

Autres informations / 03.06.2012

Chantilly, prix du jockey club (gr1) : de l’emotion et des emotions

Saônois

(Chichicastenango) a remporté, dimanche à Chantilly, le 172e Prix du Jockey

Club, à l’issue d’une course pleine d’émotions, dans tous les sens du terme.

Émotion pour son entourage, d’abord : un "petit" propriétaire, Pascal

Treyve, boulanger de son état dans la Loire, un entraîneur constant dans ses

résultats, Jean-Pierre Gauvin, qui gagne là son premier Gr1 et a fortiori son

premier classique… et un très jeune jockey, Antoine Hamelin, qui était encore

apprenti il y a deux mois et montait son premier Gr1. Difficile de faire mieux

! Mais les émotions, ce sont aussi les autres concurrents qui les ont subies.

Car l’épreuve a été semée d’embûches, dès le passage devant les écuries. Avec

vingt partants et un rythme de course à la française, il fallait s’attendre aux

coups de tampons. Et il y en a eu… Le plus grave, sans doute, a privé

FrenchFifteen (Turtle Bowl) de tout espoir. À l’entrée de la ligne droite, son

jockey, Christophe Soumillon, a même failli tomber, suite au stop brutal de

Tifongo (Fr Fong) le long du rail. D’autres ont également été malheureux, comme

Imperial Monarch (Galileo), Sofast (Rock of Gibraltar), Hard Dream (Oasis

Dream), Hidden Flame (Barathea)… Objectivement, cela fait trop à ce niveau de

compétition. Avant la course, il a beaucoup été question du raccourcissement de

la distance à 2.100m et de préparatoires qui ne joueraient pas leur rôle.

Concernant les 2.100m, il est clair qu’ils sont responsables du grand nombre de

partants. Et donc, d’une certaine manière, responsables des embouteillages

constatés entre les Écuries et le poteau. En revanche, le résultat de dimanche

–aussi aléatoire soit-il – est franchement positif pour le programme

préparatoire. En effet, le vainqueur, Saônois (Chichicastenango), avait gagné

le Prix La Force (Gr3) ; deuxième, Saint Baudolino (Pivotal) s’était imposé

dans le Prix de Guiche (Gr3) ; Kesampour (King’s Best), quatrième, avait dominé

le Prix Greffulhe (Gr2) ; et Top Trip (Dubai Destination), cinquième, est

lauréat du Prix Hocquart (Gr2). En fait, le seul "absent" à l’arrivée

est Hard Dream (Oasis Dream), gagnant du Prix Noailles (Gr2), mais il a été

arrêté en plein effort dimanche par le mouvement de Nutello. Avec quatre

chevaux dans les cinq premiers, les cinq préparatoires "officielles"

au "Jockey Club" ont donc réalisé un score quasiment parfait. Enfin,

notons que la province remporte son troisième Prix du Jockey Club en cinq ans

après Le Havre en 2009 et Vision d’État en 2008. Vision d’État, fils de

Chichicastenango,

comme

Saônois…

ANTOINE

HAMELIN:« QUAND J’Y REPENSE, IL Y A 2 MOIS, J’ETAIS ENCORE APPRENTI»

Antoine

Hamelin a vécu ce dimanche le plus beau jour de sa vie. Le jockey de 20 ans a

remporté la plus importante course de l’année pour les chevaux de 3ans, le Prix

du Jockey Club (Gr1), une course que tous les jockeys, y compris les meilleurs,

ne parviennent pas toujours à gagner un jour. Et ce, avec Saônois

(Chichicastenango) qui lui a apporté une première Listed, un premier Gr3 et

enfin un premier Gr1…Le rêve est devenu réalité pour l’ancien apprenti de Jean

de Roualle, aujourd’hui au service d’Alain de Royer Dupré. Grâce à un coup de

trois réalisé le 2 avril à Lyon-Parilly, Antoine Hamelin a perdu sa décharge.

Quelques jours plus tard, il a remporté son premier Groupe en selle sur Saônois

à l’occasion du Prix La Force (Gr3). Désormais c’est son premier Gr1 qu’il

décroche, et pas n’importe lequel : le Derby ! « C’est difficile de réaliser ce

qu’il vient de se passer, a exprimé à chaud le jeune jockey. C’est magnifique

et mon cheval était au top. Nous n’avons pas eu une course facile, mais mon

cheval a su s’exprimer. Il adore être dans les chevaux et venir entre eux.

Quand il a vu le jour, il a placé une superbe accélération. Je n’en reviens

pas. Quand j’y repense, j’étais encore apprenti il y a deux mois et aujourd’hui

c’est la première fois que je montais dans un Gr1. J’ai la chance de travailler

avec de grands professionnels et Monsieur Gauvin m’a toujours fait entièrement

confiance. Je l’en remercie beaucoup. » Le jeune jockey est très ému. Ses

parents sont là, en pleurs, au pied du podium. Sa maman filme la scène avec son

iPad : « Il pourrait neiger, pleuvoir, je ne sais plus où je suis. C’est

magnifique ! » Plus tard, elle lance à son fils, avant la conférence de presse

: « Merci Antoine ! Pour ma fête [des mères, ndlr], tu ne pouvais pas me faire

un plus beau cadeau. Et en plus, je suis né un 17 [le numéro de Saônois], je te

l’avais dit que ça le ferait ! » Quelques minutes plus tard, elle se fait

photographier avec Olivier Peslier. C’est ça, une vraie fan !

LA

VICTOIRE D’UN VRAI CHEVAL DE COURSE

D’un

point de vue sportif et pour sa limpidité, le "Jockey Club" (Gr1)

2012 n’est pas vraiment satisfaisant pour nombre d’amoureux des courses.

Beaucoup de chevaux gênés et aussi un constat flagrant, que la "Poule

d’Essai" avait déjà annoncé : la génération des mâles de 3ans en France

est moyenne. Elle l’est même en Europe et Camelot (Montjeu), qui est un bon

cheval, n’a aucun mal à régner sur ses contemporains. Son dauphin des

"Guinées", French Fifteen (Turtle Bowl), n’a pas couru dimanche.

Balloté de partout dans la phase finale, il n’a jamais pu progresser alors

qu’il avait encore trois vitesses à passer d’après Christophe Soumillon. Dans

ce "Jockey Club" qui illustre la glorieuse incertitude des courses,

Saônois s’est imposé. Ce n’est pas le plus classique des poulains, mais il a

été le meilleur dimanche. Pourquoi ? Parce que c’est un vrai cheval de course.

« Tellement petit qu’il peut se faufiler », expliquait Jean-Pierre Gauvin, son

entraîneur. Face à des chevaux communs et d’autres qui n’ont pas pu faire leur

course, c’est un cheval expérimenté, qui a connu des combats à 2 et 3ans qui a

su se montrer le plus fort. Beaucoup d’autres chevaux ne se seraient pas

faufilé aux mêmes endroits que Saônois dans les deux cent cinquante derniers

mètres. Ce sont les petits détails qui ont fait la victoire de Saônois. Comme

celui de vouloir attendre. « Quand j’hésite sur la tactique de course à

adopter, je préfère attendre. C’est comme cela que je me suis le moins trompé

», avouait Jean-Pierre Gauvin. Dans le Prix La Force (Gr3), Saônois s’était

déjà faufilé entre deux chevaux, en l’occurrence Beauvoir (Footstepsinthesand)

et son leader, Saint Loup (Zamindar). Dimanche, c’était un remake à plus grande

échelle, dans une épreuve où la sélection n’a clairement pas été au

rendez-vous.

POUR LE

SPORT ET LE PLAISIR

« Aux

ordres, j’avais dit à Antoine de se faire plaisir. Nous étions là pour cela.

Pour le sport, et le plaisir. Mais, quelque part, au plus profond de ma tête et

de mon coeur, j’y croyais… » Jean-Pierre Gauvin, en attendant le retour de son

cheval, est ému aux larmes. Plus tard, lors de la conférence de presse,

l’entraîneur installé à Saint-Cyr-les-Vignes, retrouve son esprit, et son

humour. Il revient sur le parcours peu commun de son poulain, qui a même couru

à réclamer. « Il avait bien débuté à Lyon en se classant troisième alors qu’il

n’était pas affûté. Quand les chevaux sont à l’arrivée en débutant, j’ai

tendance à penser qu’ils vont faire quelque chose ensuite. Puis il a couru en demi-teinte

à Aix-les-Bains. Un suros l’avait embêté et nous l’avons laissé tranquille tout

l’été, ce qui était un mal pour un bien, car cela l’a préservé. Il avait

effectué une rentrée moyenne à Lyon, monté par Olivier Peslier. Nous pensions

avoir vu ses limites. Dans ce genre de situation, il faut être lucide et nous

l’avons engagé à réclamer à Deauville. Il s’est imposé et nous avons fait

attention à ce que l’on ne nous le prenne pas. Puis il a couru une petite

"B" à Maisons-Laffitte, dont il a fini troisième, sans vraiment faire

une sur-valeur, puisqu’il bat d’une encolure un cheval qui court maintenant à

"réclamer". Il a ensuite gagné à Lyon, avec Antoine Hamelin pour la

première fois. Mais, là encore, il ne battait pas grand chose, car le deuxième,

c’était Just New, qui a terminé septième aujourd’hui du "réclamer"…

C’est à Deauville, lors de sa sortie suivante, qu’il a vraiment fait un

"truc", en venant de l’arrière, comme aujourd’hui. En descendant,

Antoine m’a dit : "Vous allez vous amuser avec celui-là ! " Je crois

qu’il s’est bien amusé lui aussi ! Après Deauville, nous sommes allés à Cagnes,

avec la réussite que l’on connaît… » Ce succès ne devrait pas changer les plans

de Jean-Pierre Gauvin. « Il faut garder sa ligne de conduite. J’avais dit que,

quel que soit le résultat, le cheval aurait un long break. Il est même possible

qu’il ne recoure pas cette année. Ou alors, cet hiver, à l’étranger. Mais il

faut que j’étudie le programme, parce que je ne suis pas habitué à ce genre

d’engagements ! Je pense que "l’Arc", sur 2.400m et face aux vieux,

serait prématuré cette année, si nous voulons en faire un bon cheval d’âge.

D’ailleurs, nous ne l’avons pas engagé dans "l’Arc". Aussi par

superstition… »

LOUVIGNY,

LE PARFAIT SPARRING-PARTNER

À

Chantilly, dimanche, Saônois était accompagné par son fidèle sparring-partner

Louvigny (Lando), un honnête cheval de “réclamer”. « A Saint-Cloud, la dernière

fois, il était très tendu. Nous avons donc eu l’idée de le faire voyager avec

Louvigny, qui était avec lui jusqu’à la course… Le cheval était beaucoup plus

calme », nous a expliqué Jean-Pierre Gauvin. « Louvigny est d’ailleurs un

parfait sparring-partner pour lui. Mercredi, nous les avons travaillés tous les

deux à Lyon. J’étais en selle sur Louvigny, et Saônois avait du mal à le suivre

! »

FOCUS

SUR LE PROPRIETAIRE DE SAONOIS, PASCAL TREYVE: LE PAIN, LES CHEVAUX…ET LE

TREFLE A QUATRE FEUILLES

Saônois

vient de quitter le rond des vainqueurs. Son entourage attend la remise des

trophées. Pascal Treyve, le propriétaire du poulain, est « dans son monde

».S.A. Aga Khan s’approche de lui, lui serre la main et le félicite. Un de nos

collègues photographes immortalise le moment. Pascal Treyve lui demande la

photo. « C’est tellement inespéré…» Cette anecdote résume à elle seule ce que

vit ce boulanger, installé à Bellegarde-en-Forez (42), non loin de l’écurie de

Jean-Pierre Gauvin. La victoire des "petits" face aux

"grands" et la magie des courses qui permet de faire tomber toutes

les barrières. Pascal Treyve, qui a fini sa journée de travail dimanche matin,

à 6 heures, et qui a exceptionnellement fermé son commerce lundi et mardi, nous

a raconté comment il est devenu propriétaire de chevaux de course : « Mon père

était turfiste, et j’ai donc très tôt aimé les courses. Je rêvais d’avoir un

cheval, et quand j’en ai eu les moyens, un jour, j’ai tapé “haras” sur

internet, et je suis tombé sur le site du haras du Cadran. Le pedigree d’un

yearling proposé à la vente me plaisait. Je suis allé le voir, et c’est comme

cela que j’ai acheté mon premier cheval. C’était Cadran, qui a débuté sa

carrière chez Carlos Lerner, et qui s’est avéré un bon élément, puisqu’il s’est

placé de Listed et de Quinté. Ensuite, j’ai confié mes chevaux à Jean-Pierre

Gauvin, car il est installé à côté de chez moi et que j’aime aller les voir le

matin, à l’entraînement. C’est Jean-Pierre qui m’a proposé de s’associer avec

lui sur Saônois, qu’il avait acheté poulain, dans les prés du haras de

Nonant-le-Pin. Comme l’histoire de Saônois a été relatée dans la presse locale,

tout le monde est au courant dans le village, et les gens le suivent. C’est

très sympa ! Avec ce poulain, nous avons été patients, et de toute façon,

Jean-Pierre aime travailler en progression. Je n’ai pas eu l’occasion de le

voir courir souvent, car il faut que je sois au travail. Je n’étais pas à

Cagnes quand il a gagné le "Policeman", ni pour le Prix La Force ou

le "Greffulhe". Mais aujourd’hui, Jean-Pierre m’a dit que je n’avais

pas le choix ! Alors j’ai fermé la boulangerie plus tôt, et je suis venu ici… »

Dans ses bagages, Pascal Treyve avait apporté un trèfle à quatre feuilles,

qu’il a glissé dans le tapis de plomb d’Antoine Hamelin. On connaît la suite.

Une victoire dans le "Jockey Club" et, surtout, un cheval qui n’est

pas à vendre. Pascal Treyve n’a pas hésité une minute pour répondre par la

négative à cette question…

DU COTE

DES BATTUS

NUTELLO

S’AFFIRME QUAND SOFAST EST LIGOTE

L’écurie

Wertheimer & Frère présentait deux chevaux. Favori des deux, Sofast (Rock

of Gibraltar) s’est retrouvé ligoté dans la ligne droite. Il a été malheureux

et est revenu avec des atteintes. Nutello (Lemon Drop Kid), vite dans le coup

avec son numéro un à la corde, a eu un parcours avec moins d’embûches et prend

la troisième place, à près de 60/1. « La "Poule d’Essai" a été une

épreuve trop rythmée pour lui. Là, cette performance sur 2.100m lui ouvre de

nouvelles perspectives. »

KESAMPOUR,

MALGRE UNE FIN DE PARCOURS EN EPAISSEUR

Obligé

de virer au large, dans le tournant final, Kesampour (King’s Best) s’est

retrouvé très tôt sur la ligne des chevaux de tête. Il a fait longtemps

illusion, avant d’être dominé sur le faux plat final. Son entraîneur, Mikel

Delzangles, nous a dit : « Il a dû faire un effort à l’entrée de la ligne

droite et il le paye un peu pour finir, mais il court très bien. »

TOP TRIP

LE FINISSEUR

Longtemps

en queue de peloton, Top Trip (Dubai Destination) a progressé à l’extérieur du

peloton dans la phase finale, terminant bien sur son boulevard. François

Doumen, son entraîneur, nous a dit : « Il a eu du mal à suivre le rythme et

s’est donc retrouvé à l’arrière-garde. De plus, le terrain n’était pas à son

avantage. Il a dû faire un effort pour faire le tour du peloton, plaçant une

belle accélération, mais il a un peu craqué à deux cents mètres du but ensuite,

consécutivement au long effort qu’il a fourni. Sa performance est très bonne et

il devrait être rallongé à l’avenir. »

DECEPTION

DANS LE CLAN DE HARD DREAM

Hard

Dream(Oasis Dream) fait aussi partie des chevaux gênés… Pourtant, en fin de

parcours, il a réussi à repartir, montrant qu’il aurait pu jouer un rôle à

l’arrivée. Ses propriétaires, Anthony Forde et Ahmed Mouknass, étaient déçus.

Pas du cheval, mais de la façon dont se sont déroulés les événements : « On

reste sur notre faim, suite à une telle épreuve. De surcroît, le cheval est

revenu avec plein d’atteintes. Il n’a pas fait sa course. »

COURSE

HONORABLE DE HIDDEN FLAME

Le

"X" de la course, Hidden Flame (Barathea) a été contrarié dans la

ligne droite, comme nombre de ses rivaux et il a ensuite terminé honorablement

à la sixième place. Son entraîneur, Robert Collet, a dit : « Il a été très

malheureux pour un cheval tendre, mais il a fini dans une bonne action. »

LEGERE

HAUSSE COTE PUBLIC

Dimanche,

10.300 personnes étaient présentes à Chantilly, soit 1.000 personnes de plus

qu’en 2011.

 


 

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