
Autres informations / 07.10.2015
La fièvre west nile est de retour en france
MAGAZINE
Plusieurs cas équins d’infections
à virus West Nile (VWN) ont été rapportés dans le sud de la France alors que
les derniers cas équins recensés en métropole, dans les Pyrénées-Orientales,
remontent à 2006. Ces cas apparaissent tôt dans la saison si l'on considère les
autres épizooties équines françaises de 2003, 2004 et 2006. Il existe un risque
important d’autres cas équins ou d’infections chez l’homme (zoonose), dans les
prochaines semaines.
Nous faisons le point avec Sylvie
Lecollinet et Stéphan Zientara, responsables du laboratoire national de
référence sur la maladie, au laboratoire de santé animale de l’Anses à Maisons-Alfort
et avec Agnès Leblond, professeur en médecine interne des équidés à VetAgroSup
à Lyon.
Quelle est la situation actuellement ?
Deux suspicions cliniques
d’infection à virus West Nile ont été confirmées le 31 août 2015, dans les
départements des Bouches-du-Rhône et du Gard. Les équidés concernés
présentaient une méningo-encéphalite (ataxie, convulsions, troubles de la
vigilance ou du comportement, hyperesthésie, décubitus) accompagnée d’une
hyperthermie pour l’un d’eux. Leurs symptômes ayant évolué depuis les 11 et 17
août derniers. Les deux équidés ont dû être euthanasiés à cause de leur état
général. En trois semaines, 19 autres équidés ayant développé une
méningo-encéphalite, et principalement stationnés dans les départements des
Bouches-du-Rhône et du Gard ont été confirmés comme infectés par le virus West
Nile.
Dans ce contexte, nous demandons aux vétérinaires et
professionnels de la filière équine du pourtour méditerranéen d’être
particulièrement vigilants jusqu’à fin octobre.
Qu’est-ce que la fièvre West Nile ?
La fièvre West Nile est une
maladie pouvant affecter le cheval et l’homme. Elle est transmise par des
moustiques. Sa présence en Europe a été rapportée dès les années 1960, avec en
particulier des cas équins et humains dans la région de la Camargue.
L’histoire du virus West Nile a surtout été marquée
par l’épisode nord-américain et l’émergence inattendue du virus sur la côte est
des États-Unis, à New York, en 1999. Sa diffusion rapide sur l’ensemble du
continent américain a causé plus de 41.700 cas humains et 1.700 décès ainsi que
plus de 25.000 cas équins. Même si pour l’instant, en Europe, le virus reste
localisé sur le bassin méditerranéen et à l’Europe de l’Est, il semble que
l’épidémiologie du virus West Nile soit en pleine évolution en Europe et mérite
une attention particulière.
Comment se transmet le virus ?
Le cycle de transmission naturel du virus West Nile
implique des moustiques de type Culex ainsi qu’un réservoir animal constitué
d’oiseaux sauvages. Les foyers d’infection à virus West Nile apparaissent selon
un mode saisonnier, à la fin de l’été ou en automne, dans les régions
tempérées d’Europe. L’homme et le cheval sont des hôtes accidentels du virus et
la transmission du virus à l’homme ou au cheval se fait généralement par piqûre
d’insecte.
L’apparition de cas chez l'homme et le cheval est liée à
une circulation importante du virus dans l'avifaune et à la présence de
moustiques se gorgeant à la fois sur les oiseaux et les mammifères. Ils sont
par conséquent, capables de s'infecter à partir d’oiseaux et de piquer
ultérieurement un hôte sensible.
Comment diagnostique-t-on la maladie ?
Le virus West Nile appartient au
genre flavivirus qui regroupe de
nombreux agents pathogènes importants pour l’homme et transmis par des
arthropodes (moustiques, tiques en particulier), comme ceux de la dengue, dont on
entend beaucoup parler actuellement dans le Gard et transmis par le moustique
tigre (différent des moustiques vecteurs de la fièvre West Nile).
Le recours au diagnostic de laboratoire est indispensable pour confirmer ou
infirmer l’infection par le virus West Nile.
La présence du virus dans le sang d’un cheval est faible et courte.
Les tests de détection du virus par amplification
génique sont donc généralement négatifs. En conséquence, le diagnostic
de première intention est un diagnostic sérologique. L’interprétation des
résultats sérologiques est délicate car d’autres virus peuvent générer des
réactions faussement positives. Des tests complémentaires sont proposés pour
confirmer la réalité d’une infection par le virus West Nile. Mais ces tests
nécessitent des infrastructures spécifiques et les délais sont longs. D’autres
prélèvements semblent particulièrement indiqués pour identifier et caractériser
le virus présent dans les foyers.
Le virus en cause dans les foyers
camarguais n’a pas encore pu être caractérisé. Des prélèvements complémentaires
ont été réalisés sur des chevaux suspects de fièvre West Nile et devraient
permettre de préciser l’origine du virus en cause dans les foyers.
La fièvre West Nile chez l’espèce équine
Les manifestations cliniques
sont observées chez les équidés seulement dans 5 à 20 % des cas. Les infections
sub-cliniques ou inapparentes sont les plus nombreuses. De nombreux facteurs
conditionnent l’intensité du tableau clinique (âge, mode d’élevage, virulence
de la souche...).
Après une période d’incubation
de 3 à 15 jours, il est fréquent d’observer une affection de type
pseudo-grippale se caractérisant par une hyperthermie (chez près de 65 %
des chevaux malades), une faiblesse, un abattement de l’animal ou encore des
coliques. Les signes cliniques traduisant une atteinte neurologique sont
rapportés dans 10 % des infections.
Les signes d’appel les plus
couramment décrits sont : la modification de comportement, l’ataxie et la
paralysie d’un ou plusieurs membres. Il n’existe que 20 à 57 % de cas
neurologiques mortels chez le cheval.
L’hyperthermie, l’abattement
marqué, l’atteinte des antérieurs sont plus fréquents dans l’épisode West Nile
de 2015 que dans les épisodes précédents. Les facteurs à l’origine de ces
différences ne sont pas encore connus. Le cheval apparaît légèrement plus
sensible à l’infection par le virus West Nile que l’homme. Il reste cependant
un risque d’infection chez l’homme. La déclaration de cas cliniques chez le
cheval précède généralement de une à deux semaines les premiers cas humains.
Cheval infecté par le VWN lors de l’épisode de
2015. Cet animal a présenté un abattement important,
une ataxie plus marquée des antérieurs et des déficits posturaux.
Quelles mesures prendre en cas de
foyer équin confirmé à VWN ?
L’infection à virus West Nile chez le cheval est un danger sanitaire de
catégorie 1 (de par son caractère zoonotique et la sévérité de l’infection chez
le cheval et l’homme) et doit faire l’objet d’une déclaration auprès de la D.D.P.P.
concernée. En cas d’infection à VWN confirmée chez un cheval, l’arrêté
ministériel prévoit des mesures peu
contraignantes dans les foyers, à savoir l’isolement et l’interdiction de
mouvement pour les seuls équidés malades. Une enquête épidémiologique, un
traitement insecticide des équidés et des locaux pourront compléter les mesures
prescrites par l’arrêté préfectoral (qui sera levé 15 jours après la mort ou la
guérison clinique du dernier cheval atteint).
Il n’existe pas de traitement
spécifique de l’infection à VWN. Un traitement symptomatique reposant sur
une fluidothérapie et l’administration d’anti-inflammatoires pourra être mis en
place et complété par la mise en œuvre de soins de soutien et de confort dans
le but de limiter les risques de chute ou d’automutilation.
En terme de prophylaxie, et même si aucun vaccin n’est
commercialisé actuellement chez l’Homme, trois
vaccins (Equip® WNV, Zoetis, Equilis West Nile®, Intervet et Proteq West
Nile®, Merial) sont disponibles chez le
cheval en Europe. Ces trois vaccins nécessitent une primo-vaccination en 2
fois à 3-6 semaines d’intervalle et une vaccination annuelle par la suite. Compte tenu du protocole, la vaccination
présente peu d’intérêt en cas d’épizootie dans un effectif mais peut être proposée en préventif dans
une zone à risque.
Afin de limiter l’ampleur des foyers de fièvre WN, des mesures de lutte contre les moustiques vecteurs seront mises en
place ; elles reposent sur une destruction raisonnée des gîtes
larvaires de moustiques (eaux stagnantes) et une protection contre les piqûres
de moustique (mise en place de pièges à insectes aux abords des écuries,
utilisation d’insecticides, mise à l’abri des animaux aux périodes les plus à
risque à savoir du crépuscule à l’aube).
Conclusion
Le VWN s’est installé récemment de façon pérenne en dehors de ses régions
historiques d’endémie en Europe, et les pays d’Europe du Sud et centrale
rapportent de plus en plus régulièrement des cas d’infection chez le cheval ou
l’homme. De plus de nouvelles souches
virales ont été récemment introduites en Europe et diffusent de façon
préoccupante. Il n’est donc pas étonnant d’observer actuellement la réémergence
des infections à virus West Nile en Camargue, région particulièrement favorable
à l’amplification du cycle viral. Afin de poser un diagnostic et d’aider à la
compréhension de l’épisode viral en cours, tout équidé présentant des symptômes
neurologiques notamment dans le Sud Est de la France doit faire l’objet de
prélèvements sanguins et d’urine à envoyer aux laboratoires vétérinaires agréés
pour cette maladie ou à l’Anses.
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