One Foot in Heaven : de l’influence australienne sur les courses européennes

Élevage / 17.10.2016

One Foot in Heaven : de l’influence australienne sur les courses européennes

One Foot in Heaven, lauréat du Prix du Conseil de Paris (Gr2), dimanche à Chantilly, est sans conteste le meilleur produit de l’australien Fastnet Rock à évoluer en France. Superstar dans son pays d’origine, Fastnet Rock a sailli durant cinq années en Europe, avant que Coolmore ne décide, en 2015, de le laisser en Australie. C’est précisément cette année-là que Qualify, issue de sa deuxième année de production européenne, lui a offert un premier classique en remportant les Oaks (Gr1).

Tout le monde se souvient de la mère de One Foot in Heaven, Pride (Peintre Célèbre). Lauréate des Champion Stakes (Gr1) en 2006, du Hongkong Cup la même année, et deuxième de l’Arc de Rail Link (Dansili), la jument a marqué les esprits. Au haras, il a fallu attendre son quatrième produit pour trouver un rejeton digne de sa glorieuse génitrice. Ce fils, c’est One Foot in Heaven, gagnant de trois Groupes cette année.

Il est issu du fruit de sa rencontre avec l’australien Fastnet Rock, dont les débuts en Europe n’ont pas été très simples non plus. Le fils de Danehill a fait sa première double saison de monte en 2010, alors qu’il était déjà parmi les meilleurs étalons en Australie. Coolmore avait décidé assez tardivement de l’envoyer en Irlande, ce qui explique en partie qu’il n’ait eu que 55 produits issus de sa saison de monte 2010. Parmi eux se trouvait Fascinating Rock, gagnant de Gr3 à 3ans, mais qui n’a connu la consécration au niveau Gr1 que cette année, à l’âge de 5ans, dans le Tattersalls Gold Cup, où il a battu Found.

En 2011, 113 poulains sont nés des œuvres de Fastnet Rock en Europe, et de cette génération est issue Qualify, lauréate des Oaks en 2015, et ainsi devenue sa première gagnante classique en Europe. C’était début juin, au cours d’un week-end où Fastnet Rock enregistrait aussi un succès classique en Australie, grâce à la victoire de Magicool dans le Queensland Derby (Gr1).

Vite, mais pas forcément précoce. Quelques semaines plus tôt, les chefs de Coolmore avaient décidé de ne pas envoyer le cheval en Europe pour la saison de monte 2015. L’étalon, après avoir sailli 183 juments en 2012 et 193 en 2013, n’a rencontré que 85 juments en 2014. Coolmore a délibérément indiqué private dans la colonne tarif du cheval. Sachant l’emploi du temps très rempli qu’il connaît dans l’autre hémisphère, l’objectif était de sélectionner fortement la jumenterie extérieure pour ne pas épuiser le cheval. Fastnet Rock a ainsi pu bénéficier d’une période de six mois de repos en Australie, avant de revenir en Irlande en 2016, où il devrait encore officier l’an prochain.

Les éleveurs européens ont-il trop vite jugé Fastnet Rock ? En course, le cheval était un champion sprinter, gagnant de deux Grs1, dont les Lightning Stakes. Mais vitesse n’est pas synonyme de précocité, et ses produits ne se révèlent vraiment qu’à 3ans. Son rôle en Irlande était d’apporter de la vitesse à une jumenterie souvent issue de pères spécialisés sur les 2.400m, comme Galileo, Montjeu, Sadler’s Wells, pour produire des sujets capables du turn of foot indispensable pour briller dans les meilleures courses, même celles qui se disputent au-delà du mile.

Le cheval compte désormais quatre générations de partants conçues en Europe, et le bilan est loin d’être négatif. Outre Fascinating Rock, Qualify et One Foot in Heaven, on lui doit aussi Diamondandrubies (née en 2012), lauréate des Pretty Polly Stakes (Gr1), Intricaly (née en 2014), gagnante des Moyglare Stud Stakes (Gr1), Cougar Mountain (né en 2011), vainqueur des Joel Stakes (Gr2), Rivet (né en 2014), gagnant des Champagne Stakes (Gr2), ou encore Turret Rocks (née en 2013), lauréate de May Hill Stakes (Gr2). On est certes loin de l’avalanche de gagnants conçus en Australie (Atlantic Jewel, Mosheen, Sea Siren, Amicus, Atlante, Driefontein, First Seal, Foxwedge, Irish Lights, Lone, Rock  Magicool, Nechita, Planet Rock, Rock’n’ Pop, Super Cool, Wanted, Your Song etc., tous gagnants de Gr1), mais le cheval a sailli plus de 220 juments chaque année en moyenne là-bas.

Un processus inversé. Fastnet Rock est un fils de Danehill, celui qui a initié le processus du shuttle des étalons entre l’Australie et l’Europe. Grâce à ses fils principalement, le processus s’est inversé, et les grandes maisons saisissent dès que possible l’opportunité de faire venir en Europe des étalons australiens. Il y a eu le cas Choisir, puis celui d’Exceed and Excel, qui a réussi à être tête de liste dans les deux hémisphères. Plus récemment, Son Altesse l’Aga Khan n’a pas hésité à faire venir Redoute’s Choice, autre fils de Danehill, à Bonneval, et lui confier ses meilleures juments. Les premiers 2ans européens ont débuté cette année, et pour le moment, le résultat est plutôt positif : Redoute’s Choice a déjà donné en France plusieurs gagnants (Gold Luck, Normandie, Spotify, Wajnah et Deep Inside) et les prometteurs Maelia et Pink Paint. Même si Redoute’s Choice n’officie plus en Europe, l’un de ses fils prendra le relais en France déjà 2017. Scissor Kick arrive en effet au haras d’Étreham après avoir fait une première année à Arrowfield Stud.