ARQANA BREEZE UP - Brown Island Stables, un peu d’Amérique dans le sud de l’Irlande

Institution / Ventes / 11.05.2018

ARQANA BREEZE UP - Brown Island Stables, un peu d’Amérique dans le sud de l’Irlande

ARQANA BREEZE UP

Brown Island Stables, un peu d’Amérique dans le sud de l’Irlande

Par Adrien Cugnasse

Installé en bord de mer, près de Cork, Johnny Collins connaît une réussite toute particulière avec les chevaux américains qu’il présente aux breeze up en Europe. C’est à Arqana qu’il a vendu ses meilleurs chevaux.

En arrivant à Brown Island Stables, le voyageur découvre un paysage étonnant où l’eau d’un bras de mer semble toucher les écuries. C’est dans ce contexte très particulier que Johnny Collins a choisi de s’installer, transformant cette exploitation agricole en une structure dédiée au commerce des chevaux. Il nous a confié : « J’ai commencé en montant dans les point-to-points, avant de partir aux États-Unis où j’ai officié en tant que cavalier d’entraînement. Il a alors fallu faire un choix pour mon avenir professionnel et j’ai décidé de revenir en Irlande. » Les Irlandais ont l’âme voyageuse. Aux quatre coins du monde, si vous croisez des galopeurs, vous pouvez être à peu près certains de trouver près d’eux quelques natifs de l’île verte. S’ils ont joué un immense rôle dans l’histoire — avec un grand H — des États-Unis, le Nouveau Monde a en retour beaucoup influencé la filière hippique irlandaise. C’est par exemple en grande partie grâce aux investissements d’Américains d’origine irlandaise que Vincent O’Brien a pu passer avec succès de l’obstacle au plat. Et c’est aux États-Unis que Coolmore a trouvé les étalons qui ont changé la face de l’élevage européen : Sadler’s Wells et Danehill. La diaspora hippique irlandaise finit un jour ou l’autre par repasser par son île de naissance, important ainsi des connaissances et pratiques collectées un peu partout à travers la planète galop.

Se diversifier sans se disperser. Comme souvent en Irlande, tout a commencé avec quelques sauteurs. Johnny Collins nous a dit : « L’obstacle occupe une place importante dans notre fonctionnement. Tous les ans, nous passons environ 25 poulains pour les breeze up et 30 pour le marché de l’obstacle. J’ai d’ailleurs commencé avec les sauteurs, avant de me diversifier il y a douze ans vers les ventes de 2ans montés. L’obstacle me permet de ne pas mettre tous les œufs dans le même panier, tout en donnant du travail à mon personnel tout au long de l’année. Près de 50 % des chevaux d’obstacles qui sont dans mes boxes sont des "FR". C’est un marché très compétitif, avec une grosse concurrence entre les acheteurs. Nous ne faisons pas de préparation de yearlings pour les ventes. Je préfère faire moins de choses, mais en concentrant tous nos efforts dans une direction. C’est l’une des raisons qui me poussent à ne pas me lancer dans l’élevage. En outre, lorsque vous élevez, vous ne choisissez pas vos poulains. Il faut faire avec ce que vos juments vous donnent et c’est toute la différence avec mon activité. De la même manière, je n’entraîne pas de chevaux de point-to-point, car cela peut être un frein vis-à-vis des gens qui achètent des sauteurs. » Le meilleur cheval d’obstacle vendu par Johnny Collins est né en France. Petit Mouchoir (Al Namix), un élève de Philip Guéret, a en effet gagné deux Gr1 à Leopardstown.

Cinq années déterminantes aux États-Unis. Concernant sa période américaine, l’Irlandais nous a confié : « J’ai appris les bases de l’entraînement avec les chevaux de point-to-point. Aux États-Unis, j’ai pu découvrir un univers totalement différent, avec des travaux très durs sur le dirt. Il y a une ligne à ne pas franchir, celle de l’écœurement des chevaux. La meilleure décision que j’ai prise, c’est d’aller au Kentucky où j’ai passé cinq années. En comparant ces expériences très différentes, j’ai compris qu’il fallait que la préparation reste quelque chose de simple. Ma période américaine m’a permis de bien connaître leurs chevaux, leurs pedigrees et leurs familles. Avec le temps, j’ai pu apprendre quels sont les courants de sang qui font des chevaux solides, quels sont leurs points forts et leurs point faibles. J’achète environ la moitié de mes yearlings là-bas. J’ai eu de la chance avec les chevaux américains, notamment en trouvant deux lauréats de Norfolk Stakes, South Central (Forest Camp) et Bapak Chinta (Spreighstown). More Aspen (More than Ready) est placé de Gr2 à Meydan. Je ne présente pas forcément beaucoup de 2ans qui ont droit aux primes françaises. Cette année, sur six sujets que j’ai amenés à Deauville, un seul est un "FR". J’ai par contre le seul produit d’Uncle Mo (Indian Charlie) au catalogue. »

Ces américains passés par Arqana. C’est outre-Atlantique que Johnny Collins a trouvé son porte-drapeau actuel : « Mshawish (Medaglia d’Oro), lui aussi américain de naissance, fut un des premiers chevaux acquis aux breeze up par Al Shaqab Racing. C’est Nicolas de Watrigant qui avait signé le bon à Arqana. Je l’avais acheté 10.000 $ à Keeneland. Il n’était pas avantagé par le fait d’être né au mois de mai. Mais c’était un très beau poulain, bien proportionné et il n’a cessé de progresser. Le cheval fait désormais la monte à Taylor Made après avoir remporté plus de deux millions d’euros en course et deux Grs1, un sur le turf et un sur le dirt. Il a couru de 2 à 6ans, se classant notamment quatrième du Prix du Jockey Club (Gr1). Syphax (Arch), lui aussi vendu à la breeze up Arqana, a remporté les Tattersalls Acomb Stakes (Gr3) au mois d’août de ses 2ans. Toujours à Deauville, j’ai vendu Hurricane Red (Hurricane Run) qui a gagné quatre Grs3, dont un à l’âge de 7ans. Il n’est pas américain, mais a amassé plus de 500.000 € de gains. »

Un fidèle des ventes françaises. « J’ai commencé à venir en France alors qu’Arqana n’existait pas encore. Le marché était alors beaucoup moins important et très local. Depuis cette époque, l’agence de vente a beaucoup et bien travaillé. À Arqana, j’essaye de présenter des chevaux qui semblent capables d’aller sur 1.600m ou au-delà. Par contre, à Ascot ou à Doncaster, je présente des sujets destinés aux distances allant de 1.200 à 1.400m. Si vous voulez que les gens reviennent vous acheter des chevaux, il faut qu’ils soient contents de ceux qu’ils ont acquis précédemment. Sans cette confiance, on ne peut pas travailler sur le long terme. Notre intérêt, pour durer, c’est de sortir des gagnants et de satisfaire les clients. À l’avenir, je veux continuer à améliorer la qualité des chevaux que je présente, sans augmenter la quantité. La plus grande prise de risque revient au consignataire. Tout mauvais achat se paye cash. Dès la préparation, il y a un premier tri, avec une partie des chevaux qui ne peut pas aller aux breeze up. On ne peut pas gagner de l’argent sur tous les poulains. Il faut donc repérer les meilleurs et savoir bien les vendre. »

Habituer les poulains à des situations très différentes. « L’écurie est à quelques mètres de la mer. C’est vraiment un plus pour les chevaux. Ils se sentent bien ici. Les pistes ne gèlent jamais et nous pouvons aller dans l’eau du bras de mer aussi souvent que nous le voulons. J’ai une piste en sable naturel, qui est une sorte d’anneau, pour galoper lentement. Plus récemment j’ai construit une piste en "carpet" [moquette broyée, ndlr], avec une ligne droite. La piste en moquette broyée résiste à toutes les intempéries et elle n’est pas fautive. Ils vont deux fois sur le gazon à l’extérieur, avant de passer en vente, pour les habituer à cette surface. Il n’y pas de rail sur ces pistes. Cela nous oblige à leur apprendre à aller droit. Pour la confiance et le contrôle, c’est un bon exercice. Dans tous les cas, nous les faisons galoper à une vitesse raisonnable. »