
Courses / 02.05.2018
DOSSIER SPÉCIAL MÉTÉO (Partie 1/2) - Le temps est-il devenu fou ?
Les intempéries qui ont sévi depuis le mois de janvier en France ont eu de vraies conséquences sur l’activité hippique. Pascal Scaviner, responsable du service prévisions à La Chaîne Météo, revient sur les événements météorologiques de ces derniers mois.
Jour de Galop. – Pourquoi avons-nous eu droit à un temps si désagréable depuis le début de l’année ?
Pascal Scaviner. - Il est tombé depuis le 1er janvier entre 250 mm et 300 mm de pluie sur la région parisienne, dont 280 mm sur la capitale. Janvier fut un mois très pluvieux avec trois fois plus de précipitations que la normale. Depuis février, les quantités de pluie mensuelles ont été comparables à la normale. Au cours de cette période, le temps a été très variable avec des changements soudains. Ce fut particulièrement le cas entre dimanche et lundi dernier, où l’on enregistré en une journée près de 25 mm de pluie sur Paris, ce qui équivaut à la moitié d’un mois de pluie ! Il faut savoir que la moyenne est de 50 mm par mois. Certaines régions, comme la Normandie, ont subi l’équivalent d’un mois et demi de pluie en une journée. Ces données ne peuvent pas remettre en cause le réchauffement climatique, même si une grande partie du pays a connu une baisse de son ensoleillement depuis le début de l'année.
Peut-on parler de caractère exceptionnel ?
Pas vraiment. Pour Paris, il suffit de remonter à 2014 pour trouver en janvier des déficits comparables à ceux que nous avons connus cette année, avec l’équivalent de 42 heures de soleil. En 2013 et 2012, les chiffres montrent 32 heures de soleil en moyenne.
Cette instabilité va-t-elle se poursuivre ?
Nous entrons dans un contexte estival à moyen terme, donc a priori non. Il ne devrait plus faire aussi froid que le lundi 30 avril et les conditions climatiques devraient redevenir dans l’ensemble beaucoup plus printanières, et même être très bonnes. La circulation des dépressions et des perturbations plus au nord devrait favoriser le développement de fréquentes périodes ensoleillées. Le déficit moyen d'ensoleillement sur la France devrait être moins élevé qu’en début d’année.
Quelles sont les origines de ces conditions météorologiques ?
Nous ne pouvons pas remettre en cause l’évolution du climat, mais il faut savoir que de telles fluctuations restent ponctuelles. Nous pouvons alors parler de fortes variations qui tirent parfois vers le remarquable. En ce qui concerne votre activité, le contexte va favoriser l’assèchement des sols. Tout dépendra ensuite de la nature du terrain des champs de course et centres d’entraînement concernés.
Quelles sont les prévisions pour les jours à venir ?
Nous allons vers le mieux, avec du soleil et un ressenti estival pour le week-end et la semaine prochaine. La tendance annonce de faibles pluies ce mercredi soir, mais inférieures à 1 mm. Mis à part cela, nous n’aurons pas de pluie jusqu’au milieu de la semaine prochaine. L’air sera sec, avec une amplitude des températures. Jusque samedi, nous aurons une température de 5°C à 7°C le matin, et l’après-midi elles gagneront 1 à 2 degrés chaque jour pour arriver à 22°C samedi, puis 26°C à partir de dimanche.
Météo pourrie = début de saison gâché !
Même si la météo s’est améliorée, nous mesurons encore les conséquences d’un début d’année désastreux. La préparation de beaucoup de chevaux a été perturbée et certains ont besoin de plus de temps pour atteindre leur véritable niveau.
Le nombre de réunions annulées depuis le début de l’année est impressionnant : treize journées ont subi les affres du climat. Saint-Cloud, Argentan, Cholet, Royan-La Palmyre, Le Lion-d’Angers, Tarbes, Senonnes-Pouancé, Bordeaux-Le Bouscat, La Roche-sur-Yon, Méral, Pontchâteau, Nantes et Morlaix ont été contraints d’annuler ou de reporter leurs réunions à cause d’une météo désastreuse. Maisons-Laffitte a mis du temps à rouvrir ses portes et Compiègne a dû retarder le début d’une réunion. L’entraînement a lui aussi été très perturbé. Matthieu Vincent, directeur des hippodromes et centres d’entraînement de Chantilly, Deauville et Maisons-Laffitte, a répondu à nos questions.
Jour de Galop. – Malgré les intempéries, l’entraînement a pu continuer grâce aux P.S.F. ?
Matthieu Vincent. – C’est notamment le cas à Deauville, Chantilly et Maisons-Laffitte, les trois centres d’entraînement que je dirige. Chantilly et Maisons-Laffitte ont été perturbés par le froid, la neige et enfin par une importante pluviométrie. Le fait d’avoir des pistes en sable permet de maintenir un certain niveau de travail des chevaux. Ils peuvent rester en condition, mais on ne peut pas les entraîner à 100 %, car le profil plutôt "plat" de nos P.S.F. ne permet pas des exercices très difficiles. Je partage l’avis des entraîneurs sur ce point. Les choses sont différentes lorsque l’on dispose de pistes avec une forte déclivité. L’hippodrome de Chantilly a été ouvert dès que possible, si bien que 250 à 300 chevaux l’ont utilisé pour s’entraîner tous les jours, profitant ainsi d’une piste fibrée avec plus de pente. Enfin il saut souligner que la P.S.F. de Maisons-Laffitte n’est pas en très bon état. Elle n’a pas pu remplir l’ensemble de ses fonctions, contrairement à celle de Chantilly.
Et les pistes en gazon ?
En février et en mars, deux ou trois mardis ont été perturbés. Si bien que les entraîneurs n’ont pas pu peaufiner la préparation de leurs chevaux avec des travaux plus soutenus sur les pistes en gazon. Chantilly et Maisons-Laffitte ont été concernés par ces perturbations.
Quid de Deauville ?
Sur la côte normande, les choses se sont passées un peu différemment. Quelques journées d’entraînement ont été difficiles à cause des précipitations. Mais Deauville a été relativement épargné par le froid, ce qui est lié à la proximité de la mer. Néanmoins, les entraîneurs n’ont pas pu utiliser la piste en gazon pendant l’ensemble des mois de mars et d’avril car le gazon a été refait. Il n’était pas encore apte à recevoir des chevaux. Et nous voulions préserver la piste de course car elle était située dans des indices de pénétrométrie trop élevés. Les Deauvillais ont donc été eux aussi perturbés, même si la P.S.F. a permis de conserver les chevaux dans une condition avancée. Les victoires des pensionnaires de Stéphane Wattel en Angleterre attestent de cela.
Le pénétromètre de Chantilly a atteint des sommets…
Au mois de mars, nous avons démarré plus tôt, en remplacement d’une réunion de Maisons-Laffitte. Le terrain a dépassé 6 au pénétromètre ! C’est lié au fait qu’entre novembre et mars, la zone a reçu 400 millimètres d’eau. C’est énorme, surtout si l’on compare aux 600 millimètres qu’elle reçoit normalement en une année complète.
Maisons-Laffitte a été doublement touché…
Le cumul des inondations et de la neige, dans une période où le gazon n’est pas en pousse régulière, n’a pas été évident à gérer. La dernière inondation remontait à 2016. Mais c’était en juin et la reprise végétale fut rapide. Cette année, tous les départs corde à gauche à 2.000m ou plus ne sont pas encore utilisables, mais la situation évolue rapidement et dans le bon sens. À partir de début juin, les choses seront certainement rentrées dans l’ordre. Le climat fonctionne par cycle. En 2012, il y avait 20 centimètres de neige à Chantilly et c’était la même chose au début du mois de mai 1945 en Normandie !
Quelles conséquences pour les éleveurs ?
Les conditions météorologiques ont eu des conséquences sur l’entraînement et les courses. Mais il ne faut pas oublier l’élevage, alors que la saison des poulinages et des saillies bat son plein. Les haras normands ont par exemple dû faire face à quelques difficultés, mais ils ont su s’adapter et les conditions météorologiques des jours à venir devraient faciliter leur travail. Interrogé à ce sujet, un responsable d’élevage nous a confié : « Nous avons noté plusieurs conséquences possible au niveau de l’élevage régional. Les juments ont eu tendance à porter plus longtemps leur poulain. La saison de monte a très bien débuté, avec de bons taux de fertilité. En revanche, la deuxième moitié du mois d’avril s’est avérée plutôt moyenne. Dans certains élevages, seuls les yearlings ont pu sortir au pré. Les herbages de plusieurs haras ont été inondés. Ceux positionnés sur des terres drainantes n’ont généralement pas eu de soucis. En Normandie, beaucoup ont pu connaître des inondations supérieures à la normale mais elles sont restées ponctuelles. »
Retrouvez, dans notre prochaine édition, notre étude sur les conséquences du climat du début d’année 2018 sur les courses étrangères. Dans différents pays, les professionnels ont fait face au mauvais temps avec des méthodes parfois inconnues en France.
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