
Courses / 14.05.2018
L’ÉDITO - Chère France, n’oublie pas que tu es un modèle !
Par Franco Raimondi
Dans un monde parfait, que nous appellerons le "Paradis", les Poules d’Essai auraient eu lieu sur 1.600m ligne droite à Deauville, devant 50.000 spectateurs, avec une masse d’enjeux à faire rougir les parieurs hongkongais, et les onze poulains et quatorze pouliches auraient terminé dead-heat en se partageant les allocations. Chacun peut imaginer la meilleure façon d’arriver à ce résultat idéal. Mais ce n’est pas gagné d’avance. N’oublions pas que la formule du Coca-Cola n’a été inventée qu’une seule fois…
Le respect des règles. Sans rêver de ce paradis qui a peu de chance de voir le jour, concentrons-nous sur des objectifs plus simples et prosaïques. Et dans ce monde bien réel, la base de la base, c’est de respecter les règles. C’est vrai dans le sport comme dans tous les autres domaines. Avant ou après, si cela vous fait plaisir, on peut parler de tout, discuter de tout, douter de tout… Mais pas pendant ! Quand on est au pied de la montagne, il faut tout simplement jouer le jeu. Dimanche à ParisLongchamp, j’ai eu l’impression d’être chez moi, en Italie, dans un pays qui n’est certainement pas un modèle à suivre dans les courses, pas plus qu’il ne l’est dans la politique et l’économie. La seule différence, c’est le degré de civisme. En Italie, le public et les acteurs auraient participé plus vivement au débat, avec jets de pierres, hurlements et insultes. Heureusement, en France, on n’en est pas encore arrivé à ce stade, et c’est pour cette raison, outre le respect de l’État et de la chose publique, que la crise des courses n’a pas frappé fort comme en Italie.
Un pari indispensable sur l’avenir. Le point de départ de cette histoire, c’est que France Galop – et donc tout le galop français – s’est doté d’une nouvelle cathédrale, ParisLongchamp. Il s’agit d’un (gros) investissement et d’un pari sur l’avenir motivés par l’obligation de changer l’image des courses sur le marché des jeux d’argent et des loisirs. ParisLongchamp est notre atout et il faut s’en servir à bon escient. D’un point de vue strictement technique, on aurait tous préféré que les Poules restent à Deauville. Mais ce n’est pas logique. Et, de plus, elles ont toujours été courues à Longchamp… La sélection des milers s’est faite sur ce parcours, parfois discutable, sur lequel les places à la corde sont décisives.
On pourrait en discuter des semaines, mais la stratégie de relance du galop français s’appuie sur ParisLongchamp. Bonne ou mauvaise, c’est ainsi, et le choix des 1.600m moyenne piste couplés à l’open-stretch avait pour but de conserver le principe d’un classique pour les milers sur un parcours avec tournant, de valoriser l’hippodrome et de minimiser l’incidence des places à la corde. Nous n’étions pas dans un monde parfait et nous ne nous préparions pas à la meilleure course de l’histoire. Mais il avait été décidé de disputer les deux courses sur ce parcours.
Faire avec. La moyenne piste était-elle dangereuse ? Les professionnels étrangers l’ont jugée assez propre. Elle n’était pas parfaite (cela n’existe pas) mais elle était "courable". US Navy Flag a-t-il trébuché ou a-t-il glissé ? Ce sont des choses qui peuvent arriver. Cela a provoqué un mouvement dans le peloton. Il s'agit d'un incident de course qui fait partie du jeu et tout s’est terminé sans dégâts car les chevaux avaient sur leur selle des pilotes de Formule 1. Les courses sont un sport dangereux, on le sait, et il faut éviter les risques inutiles, mais on ne pourra jamais avoir une course sans risques, sauf si l’on décide de passer au virtuel. Lundi, France Galop a en tout cas appliqué le principe de précaution en transférant sur la grande piste les prochaines courses programmées sur la moyenne piste, les 17 et 24 mai.
La décision de transférer la Poule d’Essai des Pouliches sur la grande piste a été prise par les commissaires de France Galop qui ont très bien géré la situation malgré la pression. Le départ de la course a été donné à 16 h 45, soit avec trente minutes de retard par rapport à l’horaire officiel. Cette solution a eu le mérite de permettre aux pouliches de courir. Certes, Mauricio Delcher Sanchez, les propriétaires de Cœur de Beauté et Stéphane Pasquier ont le droit d’avoir des regrets. Sur la moyenne piste, la pouliche aurait peut-être gagné, et en échangeant les places à la corde, la bonne combinaison du Quinté dans l’ordre aurait aussi changé. Le tirage au sort, comme le vent, la pluie, l’arbitre et la chance font partie du jeu. Et personne ne peut les changer. Il faut faire avec.
Une unité indispensable. Alors oui, il faut faire avec, mais il faut le faire tous ensemble, car personne n’est plus important que son travail. Un sportif de haut niveau ne peut assurer le spectacle à lui seul. Cristiano Ronaldo et Leo Messi pratiquent des sports d’équipe mais, même dans les sports individuels, un acteur ne peut passer au-dessus des autres. Mohammed Ali, qui n’était pas une poule mouillée, était The Greatest, mais il n’était pas la boxe entière à lui tout seul. Il dictait sa loi sur le ring, il envoutait aussi bien ses adversaires que le public et les medias. Mais même avec son ego démesuré, il a respecté son sport et a conduit des batailles plus importantes que les conditions d’une course. Être leader, cela donne plus de devoirs que de droits. Cela exige surtout une certaine maîtrise et exemplarité.
Les jockeys réclament à juste titre d’être considérés comme des sportifs de haut niveau. Ils doivent jouer le jeu dans leurs comportements, face au public. McEnroe n’est pas l’exemple à suivre, et au final, on se souvient plus du tennisman américain comme d’un fou qui insultait les arbitres que d’un artiste de la raquette. Et c’est lui le seul responsable de son personnage.
Maintenant, les caméras télé sont partout, chaque geste est découpé et analysé, le moindre mot devient un argument de discussion. Un champion comme le gardien de but de la Juventus Gianluigi Buffon a réussi à faire la Une des journaux avec une déclaration suite au carton rouge que l’arbitre a été obligé de sortir : « L’arbitre a un sac à poubelle à la place du cœur. » Il a dépassé les bornes et il a fait monter les polémiques.
Le galop français possède les armes pour se sortir d’un moment compliqué. Il y a les chevaux, les entraîneurs, les propriétaires, les jockeys, les dirigeants et les hippodromes qui ont fait de la France le système référent sur le continent, une terre d’accueil pour tous les socioprofessionnels fuyant leur pays bouleversé par la crise des valeurs. C’est dans ce moment qu’il faut produire l’effort d’unité, montrer une fois de plus le savoir-faire français, ce sens du bien commun qui n’existe pas ailleurs. En Italie, quand les gens des courses veulent souligner qu’il faut changer les choses, ils disent : « Il faut faire comme en France. » Jamais je n’aurais imaginé entendre dans le rond de ParisLongchamp, comme ce fut le cas dimanche : « On se croirait en Italie. »
Pour ou contre le changement de piste dans la Poule : vous avez la parole !
Dimanche, la Poule d’Essai des Poulains a eu lieu sur la moyenne piste, comme prévu. Mais après l’épreuve, certains jockeys ont demandé à ce que l’on change de parcours dans la course des pouliches. Le terrain, glissant, aurait rendu la moyenne piste dangereuse.
- Faut-il selon vous changer de piste s’il existe le moindre doute concernant la sécurité des pilotes ?
- Dans l’état des informations contradictoires qui circulaient (terrain glissant ou simple "faute" d’un cheval dans le parcours ?), France Galop a-t-il eu raison d’accéder à la demande des jockeys en changeant de piste ?
- Le résultat de la Poule d’Essai des Pouliches aurait-il été différent si elle avait eu lieu, comme prévu, sur la moyenne piste – sachant que la moyenne piste est censée amoindrir l’effet des bons/mauvais numéros de corde ?
POUR VOTER : https://lc.cx/m4md
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