King Con explique la méthode Marnane

Institution / Ventes - International / 24.05.2018

King Con explique la méthode Marnane

Personnalité incontournable des courses et des ventes européennes, à cheval entre l’Irlande et la France, Con Marnane a bâti un système unique et florissant. Celui que l’on surnomme King Con nous a livré les clés de sa réussite.

Par Adrien Cugnasse

Peu de professionnels peuvent se prévaloir d’avoir déniché 23 chevaux de Gr1. C’est pourtant ce qu’a réussi Con Marnane. Celui qui est avant tout pinhooker, préparateur et consignataire de 2ans pour les breeze up a acheté Teppal (Camacho), future lauréate de l’Emirates Poule d’Essai des Pouliches (Gr1), à Arqana lors d'une vente v.2. Et il l’a revendue à Deauville lors de la vente de 2ans montés. Elle est son deuxième classique français après Rio de la Plata (Rahy), lauréat de six Grs1 dont la Poule d'Essai des Poulains (Gr1). Con Marnane a également déniché Fleeting Spirit (Cheveley Park Stakes, King’s Stand Stakes, Darley July Cup & Betfred Sprint Cup, Grs1), Amadeus Wolf (Middle Park Stakes, Nunthorpe Stakes, Prix Maurice de Gheest & Betfred Sprint Cup, Grs1), Palace Épisode (Racing Post Trophy, Gr1), Stoneside (Prix Jean Prat, Gr1), Robin of Navan (Critérium de Saint-Cloud & Premio Roma, Grs1), Justice Day (Middle Park Stakes, Gr1), King Rubi (Critérium de Saint-Cloud, Gr1)… Plus près de nous, il a trouvé deux "FR", Sands of Mali (Gimcrack Stakes, Gr2) et Different League (Albany Stakes, Gr3, deuxième des Cheveley Park Stakes, Gr1, troisième du Prix Morny, Gr1) qui ont brillé outre-Manche. La dernière nommée, acquise 8.000 € à Deauville lorsqu’elle était yearling, fut revendue 1,5 million de Guinées en décembre dernier à Tattersalls.

Con qui rit, Con qui pleure. Pourtant, tout n’est pas rose pour ceux qui pratiquent le difficile métier de pinhooker et de consignataire lors des breeze up. Cette année, au cours de la vacation de Deauville, Con Marnane a présenté neuf 2ans qui lui avaient coûté 577.000 € en vente publique l’année dernière. Quatre ont été vendus pour un total 380.000 €. Cette édition 2018 difficile contraste avec celle de 2017. En effet, l’an dernier il avait vendu six de ses sept 2ans catalogués à Deauville, générant ainsi une marge brute de 1.069.000 € (ce chiffre ne tient pas compte des frais de préparation). Dans ce lot 2017, il y avait deux black types, Teppal et Ghazawaat (Siyouni), troisième du Prix La Camargo (L) sous la férule de Jean-Claude Rouget. En 2017, Bansha House Stables et la famille Marnane ont présenté 81 chevaux de tous âges sur un ring en Europe, et 62 ont trouvé un preneur. Que faire de tous les invendus et de ceux qui n’ont pas pu passer en vente ? Con Marnane a fait le choix de les faire courir en France. Le cumul des allocations, des transactions à réclamer, des amiables et des ventes de chevaux à l’entraînement lui permet de faire bien plus que rebondir. En 2017, dans l’Hexagone, les Marnane ont amassé 1.222.955 € d’allocations. Il a actuellement 39 chevaux à l’entraînement en France, 36 chez Matthieu Palussière et 3 chez Jean-Pierre Perruchot. Theresa Marnane est quatrième au classement provisoire des propriétaires français en plat (données au 24 mai) !

Une armée de 2ans. L’année dernière, ses 41 poulains et pouliches de 2ans entraînés en France ont généré un total de 2.931.972 € de chiffre d’affaires, en cumulant gains en course (890.372 €), ventes de chevaux à l’entraînement et à réclamer (2.041.600 €). Même sans la vente d’un individu exceptionnel comme Different League, la marge brute reste positive (746.428 €). Ceci est possible car l’ensemble de ces 41 chevaux a été acquis pour un total relativement modeste (474.349 €, soit une moyenne de 11.569 € par individu). Notre petit calcul est bien sûr très imprécis car certains ont été vendus à l’amiable, ce qui est venu grossir le chiffre d’affaires réel de l’écurie Marnane, et nous ne connaissons pas le coût d’entraînement de cette armée de 2ans ! Dans tous les cas, Con Marnane est devenu un acteur essentiel du galop français car il achète beaucoup dans notre pays, tout en générant un nombre impressionnant de partants, lesquels sont l’un des talons d’Achille de la filière française. En l’espace d’une décennie, il est passé de 6 partants en France en 2008 à 366 en 2017.

L’ÉCURIE MARNANE EN FRANCE

Saison Partants  victoires Allocations avec primes (€)
23-mai-18 130 23 612.034
2017 366 40 1.222.955
2016 301 28 913.501
2015 217 27 876.275
2014 185 20 689.220
2008 6 1 30.712

Con Marnane : « En France, les coûts d’entraînement sont élevés, mais si vos chevaux sont bons, vous obtenez des allocations en conséquence »

Ce jeudi, en s’imposant dans le Prix de Puycharic (Classe 2), On a Session a offert une 24e victoire française, la 17e avec les 2ans, à la casaque de Theresa Marnane en 2018. Alors qu’il se trouvait à la breeze up de Goresbridge, Con Marnane pris le temps de répondre à nos questions.

Jour de Galop. – Que représente pour vous la victoire de Teppal dans l’Emirates Poule d’Essai des Pouliches ?

Con Marnane. – Nous sommes plus qu’enchantés que cette pouliche que nous vendue aux breeze up s’impose au niveau classique. C’est un rêve. Remporter les Guinées françaises en effectuant sa rentrée, avec seulement deux courses à 2ans, c’est remarquable. J’avais déjà eu beaucoup de chance avec son frère, Another Party (Pomellato), qui était un très bon cheval [276.012 € de gains, placé des Prix du Pin, d’Arenberg, du Bois et Eclipse, Grs3]. C’est une famille solide. Teppal va désormais prendre la direction de Royal Ascot pour les Coronation Stakes (Gr1). L’histoire continue.

Justement, cette année, vous avez plusieurs chevaux qui pourraient aller à Royal Ascot. On parle notamment de Junius Brutus, Forever in Dreams et Rolling King.

Forcément, quand vous gagnez avec Different League, cela vous donne l’envie d’y retourner ! Il faut aussi ajouter à cette liste On a Session (Noble Mission) qui vient de s’imposer il y a quelques minutes à Angers. Au final, nous avons quatre ou cinq chevaux qui pourraient prendre la direction de Royal Ascot. Mais le meeting est encore loin et il faut voir comment évolue chaque poulain.

Quand avez-vous commencé à avoir des chevaux à l’entraînement en France ?

Il y cinq ou six ans. Nous sommes venus pour les allocations et les primes qui sont sans comparaison en Europe. Et il faut aussi souligner que le centre d’entraînement de Maisons-Laffitte [où est installé Matthieu Palussière] est vraiment de très bon niveau. Sa qualité participe pleinement à la réussite de nos 2ans. Il offre de très bonnes conditions d’entraînement. Je n’ai pas de chevaux basés en Irlande ou en Angleterre. Courir un maiden doté de 3.000 £, cela ne m’amuse pas. Et quand les chevaux sont bons, ils peuvent courir partout. D’ailleurs le bon cheval peut se trouver n’importe où. J’ai acheté First Selection (Diktat) en Espagne. Il a gagné les Solario Stakes (Gr3) avant de se classer deuxième de la Poule d’Essai des Poulains (Gr1) l’année suivante. En France, les coûts d’entraînement sont élevés mais si vos chevaux sont bons, vous obtenez des allocations en conséquence. Et c’est vraiment un pays où nous prenons beaucoup de plaisir à voir les couleurs de mon épouse s’imposer. Ces victoires représentent un véritable moteur pour notre activité. J’aime les courses françaises et elles me le rendent bien. Récemment, les élus du centre d’entraînement de Maisons-Laffitte nous ont remis un trophée suite aux performances de Different League. Cela nous a procuré un immense plaisir et nous souhaitons les en remercier.

Les couleurs de votre épouse connaissent une remarquable réussite ces dernières années dans l’Hexagone, en particulier avec les 2ans.

Oui c’est le cas. Mais il faut bien avoir conscience du fait que les breeze up européennes ont été très décevantes cette année, surtout en Angleterre. Nous n’avons pas pu vendre autant de chevaux que nous le voulions. Dès lors, il faut faire courir ceux que nous avons rachetés aux ventes. Il n’y a pas d’alternative. Que ce soit parmi ceux que nous avons vendus ou ceux qui n’ont pas trouvé preneur et qui courent sous nos couleurs, nous continuons à sortir des gagnants et des black types. Au fil du temps, nous avons préparé un total de 97 chevaux qui se sont distingués au niveau Listed ou Groupe. L’équipe avec laquelle je travaille est vraiment exceptionnelle. Ce sont de vrais hommes de chevaux.

Combien de yearlings achetez-vous tous les ans en Europe ?

Environ une cinquantaine par an dans les ventes européennes. Nous ne pouvons pas acheter les plus chers et nous essayons de trouver les bons et beaux parmi ceux qui nous sont accessibles. Ensuite, notre préparation pour les breeze up est réalisée de manière sérieuse, respectueuse et professionnelle en Irlande. Et c’est une des choses qui expliquent la réussite des chevaux qui sont passés chez nous. Les résultats, le nombre de victoires, parlent d’eux-mêmes.

Quel a été votre parcours dans la filière hippique ?

J’ai commencé à préparer et vendre pour les breeze up il y a une quinzaine d’années. Dans les premiers temps, je n’avais que deux chevaux ! Avant cela, j’avais travaillé pendant trois ans à Ballydoyle. J’ai aussi œuvré en Australie et aux États-Unis.