
27.10.2019
Bruno Bellaud ou la réussite d’un homme de l’ombre
Aussi passionné que discret, Bruno Bellaud connaît une réussite tout à fait remarquable en tant qu’éleveur. En l’espace de deux jours, il a gagné le Qatar Arabian Trophy des Pouliches et réalisé le top price des ventes de pur-sang arabes Arqana.
Au tournant des saisons 2008 et 2009, notre éleveur a acquis Nacrée Al Maury (Kesberoy) auprès de Renée-Laure Koch, sur les conseils de Martial Boisseuil. Cet achat s’est rapidement révélé comme incroyablement inspiré. Celle qui fut sa deuxième pur-sang arabe seulement s’est en effet imposée dans le Prix Damas (Gr3 PA) avant de devenir une poulinière d’exception. Son premier produit, Mister Ginoux (Amer), fut acheté 160.000 € par Nicolas de Watrigant en 2012, sur le ring d’Arqana. Désormais étalon au haras de Thouars pour le compte d'Al Shaqab Racing, il s'est imposé dans le Qatar International Trophy (Gr1 PA), dans le Derby des Pur-Sang Arabes de 4ans (Gr2 PA), devant Gazwan (Amer), et dans le French Arabian Breeders' Challenge à Toulouse (Gr3 PA). Nacrée Al Maury a ensuite donné Carsa du Ginioux (Dormane), proche troisième du Qatar Prix de l’Élevage (Gr2 PA) et poulinière pour le compte de son éleveur. Son troisième produit vu en piste, Lady Princess (General), est devenue la première pouliche à réaliser le doublé Al Rayyan Cup Prix Kesberoy & Qatar Arabian Trophy des Pouliches (Grs1 PA). Le lendemain de ce Gr1 PA, Nahaab (Mahabb & Nacrée Al Maury) est passé sur le ring d’Arqana, où il était présenté par Yann Creff. Le poulain a réalisé le top price de la vente, à 240.000 €. C’est Nicolas de Watrigant qui l’a acheté pour Al Shaqab Racing.
Un autodidacte. Bruno Bellaud est à la tête d’une exploitation céréalière aux portes d’Angoulême (Charente). En 2015, il nous avait confié : « Ma fille a la passion du cheval et, petit à petit, j’y ai pris goût. J’aime découvrir de nouvelles choses et réaliser de nouveaux projets... Alors, je me suis dit que j’allais faire un petit peu d’élevage de chevaux. Voilà comment l’idée est venue. Il n’y a jamais eu de chevaux dans cette exploitation. Je me suis penché sur la question et rapidement je me suis rendu compte qu’il fallait tout de suite envisager un pedigree qui valorise votre travail. C’est comme ça que l’idée est née (…) J’ai aussi été bien conseillé par plusieurs personnes, comme Jean-Marc de Watrigant. Les catalogues de vente et les stud-books sont devenus mes livres de chevet, des ouvrages que je me suis mis à emmener partout. Quand je laboure, je réfléchis à mes croisements et je garde ces livres sous la main pour pouvoir vérifier les pedigrees ! »
Il a déjà eu un partant dans l’Arc. Bruno Bellaud a dans un premier temps connu la réussite grâce à Silverskaya (Silver Hawk). Acquise 150.000 € alors qu’elle était yearling, à Deauville, cette élève du haras d’Étreham s’est révélée une très bonne jument de course sous l’entraînement de Jean-Claude Rouget. Sagement débutée au mois de mars de ses 3ans, elle a remporté le Prix du Haras des Granges - Prix Caravelle (L), le Prix de Royaumont et le Prix Minerve (Grs3). Pour une première incursion chez les pur-sang anglais, ce fut un coup de maître pour Bruno Bellaud ! Surtout que dans l’édition 2004 du Prix de l’Arc de Triomphe (Gr1), dernière à mi-ligne droite, la pouliche avait dépassé douze concurrents pour se classer huitième. En 2015, Bruno Bellaud nous avait expliqué : « Ce fut une expérience inouïe. C’est par le biais de Silverskaya que j’ai fait mon apprentissage des courses. Elle a eu un produit puis je l’ai vendue. » La jument a été exportée, outre-Manche dans un premier temps, puis au Japon. Depuis l'achat de la poulinière par Katsumi Yoshida, trois produits issus de son croisement avec Deep Impact (Sunday Silence) sont passés sur le ring d'Hokkaido, et tous ont fait monter les enchères à plus de cent millions de yen. Le plus cher est le 2ans, adjugé 260 millions (2 millions d'euros), en 2017. Trois des quatre premiers produits de Silverskaya au Japon ont gagné mais le meilleur reste Séville (Galileo), deuxième de l'Irish Derby pour Aidan O'Brien et lauréat ensuite d'un Gr1 en Australie. Silver State (Deep Impact) avait fait très grande fait impression avant de rencontrer quelques problèmes de santé. Il est désormais étalon au Japon.
Résister aux offres. Après cette expérience réussie avec les pur-sang anglais, Bruno Bellaud a décidé de se consacrer aux pur-sang arabes. Malgré des offres très importantes, il n’a jamais vendu Nacrée Al Maury, et en 2015, il nous confiait : « Il n’y a rien de pire que de vendre son outil de travail. Même avec de l’argent, je ne suis pas certain de retrouver une jument comme celle-là, avec les performances, le pedigree et la production. Et puis, je suis attaché à elle. Dans l’élevage, on n'est pas toujours récompensé pour son travail. L’éleveur prend des risques, investit, achète des saillies, consacre beaucoup de temps à ses chevaux… La prise de risque, la planification du travail sont deux piliers du travail de l’agriculture moderne. Quand on cultive des céréales, le climat est un risque permanent. On travaille avec le ciel et il peut être capricieux. Élever des chevaux, c’est beaucoup de contraintes et de prises de risques. Il faut du temps avant de vendre un bon cheval. Un bon cheval fait le bonheur d’un entraîneur, d’un propriétaire et d’un jockey. Mais pour en arriver là, il a fallu que des hommes de l’ombre l’élèvent, le bichonnent… Les éleveurs sont le premier maillon, que l’on ne voit pas, d’une chaîne. Ils passent ensuite le témoin aux lads, aux garçons de voyage… On ne parle peut-être pas assez de ceux qui travaillent dans les écuries et qui se lèvent à cinq heures du matin pour nourrir, faire les boxes, sortir les chevaux. Sans eux, que seraient les courses ? Le gros travail est abattu par ces gens-là. Il y a des bons entraîneurs, il y des bons propriétaires, mais à l’origine il y a des bons chevaux. Et pour les élever et s’en occuper, il faut se retrousser les manches. »
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