Marcel Chaouat : « Je crois aux courses ! »

Institution / Ventes / 25.10.2019

Marcel Chaouat : « Je crois aux courses ! »

Marcel Chaouat : « Je crois aux courses ! »

Entrepreneur, Marcel Chaouat est à la fois propriétaire, membre du conseil d’administration de France Galop et administrateur délégué de l’hippodrome de Deauville. À l’approche de l’échéance électorale, c’est en tant que tête de liste au collège des propriétaires pour Entreprendre Ensemble qu’il a répondu à nos questions.

Jour de Galop. – Cette année, beaucoup de listes ont été déposées dans le collège Propriétaires. En quoi votre candidature diffère-t-elle des autres ?

Marcel Chaouat. – Notre liste s’appelle Entreprendre Ensemble. "Entreprendre" parce qu’elle se compose uniquement d’entrepreneurs ayant réussi et qui sont des passionnés de courses, et "Ensemble" car c’est ensemble qu’il faut avancer et que c’est en rassemblant que nous défendrons au mieux nos intérêts. La première chose qui m’interpelle quand je regarde certaines listes est la suivante : est-ce que les personnes qui les composent sont des propriétaires ou des politiques ? Si je compte les chevaux détenus par l’ensemble des têtes de liste des AEP, des PP et du Syndicat national des propriétaires, on n’arrive même pas à trois… Avec tout le respect que j’ai pour eux, car l’engagement associatif mérite le respect, je remarque simplement que les leaders des listes AEP, Syndicat national des propriétaires et PP n’ont chacun qu’un seul cheval à l’entraînement, voire moins. Je n’ai rien contre eux ; je les connais et je les fréquente. Mais je pose une question : pourquoi sont-ils candidats et comment peuvent-ils être légitimes pour défendre les propriétaires si jamais ils sont élus ? Cela fait trente ans que j’ai des chevaux. Avec mon écurie Passion Racing Club, nous avons eu 1.200 partants en cinq ans, nous avons gagné 4 M€ d’allocations et pas loin de 130 victoires. On ne cesse de répéter, à juste titre, que les courses ont besoin de partants, d’acteurs ; je pense que j’y contribue largement. J’évoque l’écurie dont je suis le gérant, mais cela fait trente ans que je suis propriétaire. Mon attachement aux courses n’a rien d’opportuniste, c’est une vraie passion et que je fais partager autour de moi. Plus largement, les propriétaires veulent-ils être représentés par des politiques ou par des gens qui leur ressemblent ? Je veux défendre des propriétaires qui, comme moi, appartiennent à la base et font vivre l’Institution.

Justement, vous avez été au conseil d’administration de France Galop pendant quatre ans ? Quel bilan tirez-vous de votre action ?

Pendant quatre ans, je n’ai cessé de défendre les intérêts des propriétaires et j’ai surtout fait en sorte que ce ne soit pas la faillite. Lorsque l’on dépense davantage que ce que l’on gagne, on court droit à la banqueroute. À un moment ou à un autre, il a fallu faire des efforts et j’ai voté la réduction des encouragements. Même si cela me dessert en tant que propriétaire, cela était nécessaire pour l’Institution et permettait d’éviter d’aller dans le mur. On a également resserré les rangs de tous les côtés : le PMU a fait 50 M€ d’économies de façon pérenne, Equidia a fermé Equidia Life, laquelle coûtait sept millions à l’Institution, et poursuit ses économies. On a également réduit le train de vie de France Galop, ce qui était nécessaire pour que les propriétaires n’aient pas à mettre la main à la poche pour ajuster les comptes. Le GTHP a également serré les boulons car on leur a demandé de le faire. Le fait de ne plus courir à Enghien, même si j’aurais préféré une autre solution, a également engendré des économies.

La même décision concerne Maisons-Laffitte, un hippodrome auquel vous êtes pourtant attaché… 

Il était difficile de faire autrement dans le cadre des efforts de gestion globaux. À titre personnel, je reste opposé à la fermeture. La raison pour laquelle j’ai donné mon accord, c’est que si on ne faisait pas cet effort-là, on aurait obligé tous les propriétaires de France à payer pour Maisons-Laffitte et ce n’est pas ma façon de voir les choses. J’aime beaucoup cet hippodrome, j’y ai beaucoup d’amis et je suis très triste de cette fermeture. N’oubliez pas non plus que j’ai également voté une mesure qui permet aux professionnels installés à Maisons-Laffitte de bénéficier aujourd’hui d’un outil de travail de premier ordre et pour lequel 1,5 million d’euros ont été investis.

Pendant votre mandat, il a souvent été dit que vous étiez du côté des petits.

Oui, je pense sincèrement représenter la base. En tout cas, je me suis toujours battu pour elle. Au conseil d’administration, j’ai par exemple défendu tant que j’ai pu les indemnités de transport. S’il y en a encore, c’est grâce à moi ! D’accord, elles sont moins généreuses qu’avant, mais je ne pouvais pas concevoir qu’on les supprime. J’ai été à l’origine d’une augmentation du coût des engagements dans les Groupes, pour que l’effort porte aussi sur les gros propriétaires. Quand certains ont la chance de courir à ce niveau, c’est normal qu’ils contribuent eux aussi à l’effort, comme cela a été mon cas lorsque j’ai couru au niveau Groupe avec My Love Passion. J’ai été également l’un de ceux qui ont défendu la prime propriétaires pour les 6ans et plus. Le conseil d’administration voulait proposer de la ramener à 25 % et finalement, elle a été positionnée à 35 %.

L’un des combats que vous menez est également de faire participer davantage les propriétaires étrangers à l’effort commun. Pourquoi ce protectionnisme ? 

Oui, je suis pour… mais cela n’a pas encore été fait. C’est une idée qui me tient à cœur. Les chevaux entraînés à l’étranger qui arrivent la veille de la course et repartent le lendemain, et qui empochent les allocations de nos bonnes courses, trouvez-vous cela normal ? Pas moi. Ils doivent impérativement participer à l’effort de l’organisation des courses en France. Je suis favorable à un prélèvement de 10 % à 15 % de l’allocation prise par les étrangers afin d’alléger les charges de France Galop, ce qui représenterait plusieurs millions d’euros.

Peut-on se passer, aujourd’hui, d’une négociation avec l’État ?

Là, vous posez encore le problème structurel d’équilibre des comptes. Jusque dans les années 2000, le nombre de loisirs était plus restreint qu’aujourd’hui et les courses avaient un réel pouvoir d’attraction vis-à-vis du grand public. Les médias traditionnels s’intéressaient davantage aux courses. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Les tribunes des hippodromes sont souvent moins remplies et le jeu est en baisse : il est donc normal que nous n’arrivions plus à équilibrer nos comptes. Mais ce n’est pas en tapant sans cesse sur France Galop que les choses vont s’arranger, c’est en trouvant des solutions intelligentes. La Française des jeux va être privatisée et c’est un milliard d’euros qui vont rentrer dans les caisses de l’État. En 2018, l’État a prélevé 870 M€ directement sur le chiffre d’affaires des courses, une somme proche de celle perçue par la privatisation de la FDJ. Pour l’État, nous sommes un vrai producteur d’impôts. Il faut que l’État comprenne qu’il faut légèrement desserrer le prélèvement à la source, ne serait-ce que d’un point. Nous faisons 9,5 milliards de chiffre d’affaires et un point représente donc 95 millions. Je serais d’avis, si nous parvenons à faire accepter ça à l’État — même pour une durée de quatre à cinq ans, le temps de remettre à niveau l’équilibre financier des sociétés mères, qui perdent à elles deux environ 45 M€ — d’injecter massivement la somme restante. Nous disposerions alors de 50 M€ chaque année qu’il faudra réinvestir sur les nouvelles technologies, et aussi embaucher de jeunes experts dans ce domaine qui sauront séduire les jeunes de leur génération, aller chercher des influenceurs, des community managers, etc. Il faut aller chercher cette clientèle qui nous fait défaut, ces jeunes qui adorent faire la fête (la preuve étant les JeuXdis de Longchamp), qui connaissent les réseaux sociaux et les paris sportifs sur internet. Si nous avançons ensemble, l’État nous écoutera et cette relance sera possible.

Peut-on évoquer avec vous les attaques dont vous avez été victime de la part de vos anciens soutiens de l’AEP ? Les avez-vous trahis ?

Je vais vous répondre. Pour commencer, il n’y a aucune trahison de ma part, loin de là. En réalité, le courroux des AEP à mon encontre remonte à l’époque où ces personnes voulaient contraindre par la force, notamment par des manifestations sauvages, France Galop à aller dans la direction que, eux, préconisaient. Les méthodes envisagées par certains de leurs animateurs ne sont pas les miennes et j’ai refusé d’y adhérer. Du coup, ils prennent cela pour une trahison. Moi, je préfère "construire que détruire". J’ai toujours préféré le dialogue et tenté d’œuvrer pour le bien commun. Je les laisse vociférer dans leur coin, je ne m’exprimerai pas plus sur le sujet.

Mais, tout de même, des gens vous accusent de provoquer des divisions en présentant votre liste. Que répondez-vous à cela ?

D’abord, je n’ai aucun parti derrière moi. Moi, ma légitimité vient de ce que j’ai créé, du nombre de chevaux que je possède. Je n’ai jamais eu d’ambition politique présidentielle, car contrairement à d’autres, je connais mes limites. La seule chose que je veux faire, c’est travailler ensemble, toujours dans l’intérêt général. Les gens qui me suivent sont tous des entrepreneurs qui ont réussi. Je vous l’ai déjà dit et je vais me répéter : si vous comptez le nombre de chevaux que j’ai à l’entraînement, ainsi que ceux des numéros deux et trois sur ma liste, Stéphane Billon et Pierre Pilarski, nous avons bien plus de chevaux que l’ensemble des trois premiers de chacune des listes qui se revendiquent comme légitimes. Et après, on nous parle de légitimité ? C’est une vaste plaisanterie ! Et en plus, nous ne sommes même pas des propriétaires professionnels, c’est notre passion, pas notre métier. Pour ne citer que Pierre Pilarski, il a eu le meilleur trotteur de ces dernières années, il a actuellement le meilleur anglo-arabe de sa génération et il a des cracks chez Guillaume Macaire. Cette personne est on ne peut plus légitime. Dans notre liste, nous avons des gens qui comptent dans le monde des courses, nous n’avons pas de touristes ou de personnes qui vont faire un bref passage dans notre sport. Les membres de ma liste sont des passionnés de longue date, des gens sains pour l’Institution. Je crois aux courses et je crois que cela peut repartir.

Dans vos documents électoraux, vous parlez de modifier le code électoral. Pourquoi ? 

Pour commencer, il faut savoir que dix sièges sont réservés aux propriétaires. En moyenne, cela signifie qu’un siège vaut 10 % des voix… Or ce n’est pas le cas. Le système actuel est tellement peu démocratique qu’il faut 12 % pour obtenir un siège au Comité. Mais prenons un exemple : puisque sept listes se présentent, six d’entre elles pourraient réaliser 11,95 % chacune. Donc aucune d’entre elles n’aura d’élu. En revanche, la septième, avec ses 28,30 %, obtiendrait la totalité des sièges ! Ce qui veut dire que des listes ayant réalisé 11,95 % n’auront aucun élu… alors que pour la dernière, 2,83 % suffiront pour lui obtenir un siège à chaque fois ! Alors oui, nous souhaitons qu’il y ait davantage de démocratie. D’autre part, nous veillerons à ce que le pourcentage de voix soit abaissé en ce qui concerne les frais de remboursement de campagne. Il faut un minimum de 5 % des voix pour être remboursé de ses frais aux élections européennes… alors que ce taux est 12 % aux élections de France Galop. Pour moi, cela pénalise clairement l’expression démocratique.

Enfin, dans l’esprit de beaucoup de gens, votre nom est synonyme de Deauville. Sur ce sujet que vous avez eu à gérer, quel bilan tirez-vous des quatre années qui viennent de s’écouler ?

J’ai fait tout ce que je pouvais pour animer l’hippodrome de Deauville-La Touques. Et je pense avoir obtenu des résultats, comme notre grand partenariat avec Renault. Mais aussi avec l’Île Maurice-Beachcomber, Hermès, les restaurateurs de Deauville et tous ceux qui participent au Gala du Cheval, que j’organise chaque année : en 2018, les fonds recueillis ont été reversés à Au-delà des pistes ; en 2019 à l’Association des jockeys.

Et évidemment, je fais tout cela de façon totalement bénévole. À ce sujet, je voudrais pour finir vous donner une anecdote. Chaque année, France Galop envoie aux administrateurs un document pour se faire rembourser les frais engagés par chacun d’eux dans le cadre de leur fonction. Je mets directement ce formulaire à la poubelle. Je ne veux pas prendre un euro à l’Institution. Je suis un passionné !