Plan de compétitivité : Le point de vue David Powell

Autres informations / 19.09.2020

Plan de compétitivité : Le point de vue David Powell

PLAN DE COMPÉTITIVITÉ

Le point de vue David Powell

Le 15 septembre, France Galop a annoncé un plan pour restaurer la compétitivité sur la scène internationale des chevaux de plat entraînés en France. Cela a fait réagir David Powell, qui lance le débat ! Si vous voulez vous aussi apporter votre pierre à l’édifice, n’hésitez pas.

« Déjà l’année dernière, on disait entre nous que pour réduire l’empreinte carbone on devrait courir les courses françaises de plat black type en Angleterre, car même un cheval de handicaps venu d’ailleurs suffisait pour gagner un groupe chez nous...

France Galop annonce le projet d’un "plan de compétitivité sportive", mais en matière de compétition, il faut être meilleur (ou moins mauvais) que les autres, donc cela s’annonce compliqué.

Nous excellons en France pour compliquer au lieu de simplifier, avec des projets coûteux pour essayer de résoudre des problèmes que nous avons nous-mêmes créés ! Au lieu de retirer des couches, on en rajoute.

Ne pourrait-on pas déjà reconnaître plusieurs des raisons pour lesquelles nous en sommes arrivés là : quelques-unes où nous avons nous-mêmes compromis notre réussite en changeant la règle du jeu à notre détriment, et d’autres que nous subissons.

Le raccourcissement des distances : la dégradation part de la dénaturation du Prix du Jockey Club, qui a faussé tout un programme qui était classique mais ne l’est plus, et pour corriger ce déséquilibre, on a raccourci les préparatoires, les consolantes, etc. Cela rappelle un peu le gag de la personne qui veut mettre en équilibre une table bancale, qui coupe un peu trop les pieds à chaque fois, et qui finit avec une table basse... et encore de travers...

- De ce fait, nous avons choisi de laisser aux autres le choix des armes — la vitesse — où nous avons un siècle de retard, que l’on ne va pas combler en deux ou trois générations : notre force, c’était le classique et la tenue, et nous y avons renoncé, comme nous avons subordonné nos classiques (qui ne le sont plus) aux autres... je ne vois pas comment remédier à cela en accentuant le biais en faveur des courses de 2ans et de vitesse, bien au contraire...

- En outre, comme l’a si bien dit Freddy Head dans une interview, notre programme est fait pour les mauvais chevaux, il ne faut donc pas s’étonner que les propriétaires fassent entraîner les bons ailleurs, d’autant que grâce à cela, il est facile de venir cueillir nos bonnes allocations avec les seconds couteaux : chez nous, il faut dévaloriser les chevaux pour prendre de l’argent, il est donc logique que l’on commercialise à l’export ceux qui ont été valorisés.

- En effet, outre-Manche on entraîne les 2 ans plus intensivement, mais dans la mesure où il y a pléthore de bons chevaux, on peut se permettre de faire le tri, de sélectionner les plus résistants et les meilleurs, alors qu’en France nous sommes tenus à les respecter davantage car nous en avons moins : c’est comme les enfants de riches qui auront de nouveaux jouets quand ils les auront cassés, alors que les enfants de pauvres y feront plus attention car ils ne seront pas remplacés... Cela se traduit aussi par davantage de réussite des chevaux exportés de France, car mieux préservés.

Nous traînons depuis longtemps un boulet social et fiscal (André Fabre avait dit à la presse anglaise qu’il est compliqué d’avoir de grands propriétaires dans un pays socialiste…), puis la loi des 35 heures a dégradé les conditions de travail pour l’entraînement.

- Nos entraîneurs sont largement aussi bons que leurs collègues étrangers, mais encore faudrait-il pouvoir faire trois lots d’une heure et demie ou plus, et des écuries du soir à l’ancienne... Pourquoi croyez-vous qu’il y a beaucoup plus de soucis pour faire rentrer les chevaux dans les boîtes, que dans les autres pays ? Nous savons tous pourquoi on ne trouve plus assez de personnel, mais aucun média ne voudra en parler... Cela, nous n’y pouvons rien, le problème nous dépasse largement.

- Enfin, ce n’est pas la qualité de nos pistes qui est en cause. Elles valent largement celles de Newmarket ou du Curragh, nos centres d’entraînement font d’ailleurs l’admiration générale.

Par contre, au lieu de persister dans nos errements, nous pouvons rétablir un vrai programme classique, logique, qui valorise les chevaux et les hommes au mérite, au lieu de niveler par le bas. Cela remontera le niveau, permettra de promouvoir notre sport auprès du public comme support d’un jeu intelligent plutôt qu’une loterie avec des rapports moindres, et de valoriser aussi le travail des entraîneurs, favorisant la réussite des meilleurs. »