
Courses / 26.10.2020
Gagner trois Arcs : mission impossible ?
Par Jean-François Pré
« Commençons par paraphraser le célèbre aphorisme des maquignons : « Arc 1, cheval de bien. Arc 2, cheval de Dieu. Arc 3, cheval de…. Personne n’y est jamais parvenu. Y parviendra-t-on un jour ?
Paraphrasons ensuite le slogan de notre concurrent : "Cent pour cent des gagnants ont tenté leur chance". En 99 ans de Prix de l’Arc de Triomphe, deux ont osé la passe de trois. Deux juments. Trêve et Enable. Elles ont manqué de peu le rendez-vous de l’Histoire… mais elles l’ont manqué tout de même.
Est-ce à dire que le défi est irréalisable ?
Avant de répondre à cette question, il faudrait répondre à une autre ; même deux autres : pourquoi n’ont-ils été que deux à essayer et pourquoi s’agissait-il de deux femelles ?
Quand on sait le nombre de légendes vivantes qui ont foulé l’herbe du Bois le premier dimanche d’octobre, on peut en effet s’étonner d’un nombre aussi réduit. Quant au sexe des prétendants, il s’explique par le modèle économique sur lequel repose toute la filière équine. Certes, mais cela ne nous dit pas pourquoi cette activité que nous avons cœur à identifier comme un sport laisse si peu de place à l’esprit sportif.
Nadal a remporté 13 fois Roland Garros, Al Capone 7 fois le Prix La Haye-Jousselin et Ourasi, 4 fois le Prix d’Amérique. Tennis, obstacle et trot. Le plat, exercice noble par excellence (la vitesse à l’état pur) brille par son absence sur les pages du livre des records.
Quittons maintenant le domaine du factuel pour entrer dans la subjectivité du virtuel. Pour ne pas dire du rêve. Rêvons ensemble, si vous le voulez bien ! Même si je ne l’ai vu que sur pellicule, je suis persuadé que Ribot aurait gagné son troisième Arc d’affilée en 1957… s’il l’avait couru. Le pur-sang italien était invaincu ; je le savais invincible. Sea Bird (1965) est considéré, par beaucoup, comme le plus impressionnant Arc winner. Aurait-il pu aller jusqu’à trois (ou Troie) ? Difficile à dire avec un cheval aussi peu maniable. Mill Reef, époustouflant d’aisance en 1971, fut victime d’une fracture lors d’un galop d’entraînement l’année suivante. La nature a répondu pour nous. Alleged (1977-78) avait-il la vitesse pure d’un broyeur de records ? Pas sûr. Zarkava, elle, l’avait. Jamais un cheval ne m’a donné une telle sensation de domination. Pour justifier sa préretraite au haras, on a dit qu’elle prenait du caractère, qu’elle "tournait au vinaigre". Soit, mais c’était alors un vinaigre balsamique rare, du plus grand millésime. Frankel n’a pas couru l’Arc ; aurait-il pu s’y imposer ? Permettez-moi de plonger dans les eaux troubles du fantasme. Pour moi, Frankel était un autre Ribot. Gagnant l’Arc une fois, il l’aurait gagné autant de fois que son entourage aurait bien voulu l’y faire participer. Mais il en fut décidé autrement, par respect pour son entraîneur, très malade. Sage et humaine décision. À mon sens, Frankel aurait tout gagné de 1.000 à 4.000m. Il courait dans une autre galaxie.
Revenons à notre Arc, au palmarès vierge de hat tricks. Pourtant, outre-Atlantique, ils sont plusieurs à avoir épinglé la fameuse Triple couronne, ce qui n’est pas une mince affaire. Peut-être, mais gagner trois courses une même année n’a rien à voir avec gagner la même course trois fois, se heurtant à plusieurs générations successives ! Il faut durer, résister à l’usure et, chaque nouvelle saison, se mesurer aux jeunes pousses, gonflées d’énergie et de vitalité.
Concluons avec nos deux princesses qui ont buté sur la troisième marche. Trêve porte bien son nom. C’était une magnifique guerrière qui a concédé trop de… trêves. La troisième lui fut fatale. En 2018, Enable a senti le vent du boulet. Quelques mètres plus loin, Sea of Class l’aurait biffée du palmarès. Un an plus tard, Waldgeist s’en est chargé. Il ne lui a pas laissé la chance d’un démarrage tardif. Cette année, la pointe du glaive était émoussée.
À l’une comme à l’autre, nous devons la chance d’avoir entrevu de notre sport ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : celui des Rois. »
Vous aimerez aussi :
-(2).jpg)
Prix Le Touquet (L, Steeple-chase) : Janeiro Verde (K), une première à Auteuil pour Sofiane Benaroussi
Auteuil, dimanche Grand favori du Prix Le Touquet (L), Janeiro Verde (Karaktar) était très attendu et il a répondu présent en s’imposant au sprint, d’une...
26 mars 2023-SD.jpg)
Prix des Saules (Classe 2) : In Time efface (déjà) son hiver dubaïote
Fontainebleau, lundi Vue à deux reprises au cours de l’hiver à Dubaï, In Time (Zarak) n’avait pu figurer, se classant septième du Cape Verdi comme des...
27 mars 2023