
Magazine / 12.03.2021
La succession Sylvia Wildenstein sous le feu des enchères vendredi prochain
Vendredi prochain 19 mars, deux cent trente et un objets ayant appartenu à Sylvia Wildenstein (1933-2010) passeront en vente à Drouot. Commissaire de courses France Galop, propriétaire et éleveur, Pierre-Yves Lefèvre, de l’étude Beaussant-Lefèvre, est le commissaire-priseur de cette vente.
Jour de Galop. – Pouvez-vous nous présenter cette vente ? Pourquoi intervient-elle onze après la disparition de Sylvia Wildenstein ?
Pierre-Yves Lefèvre. – Tout d’abord, il faut savoir que Sylvia Wildenstein, qui était la veuve de Daniel Wildenstein (1917-2001), n’a pas eu d’enfant. Il s’est avéré que sa succession était plutôt déficitaire et que personne n’a souhaité devenir son héritier. Sa succession a donc été confiée à un administrateur judiciaire. Un ou deux ans après sa disparition s’est posée la question de son écurie de courses. C’était l’urgence. Nous, l’étude Beaussant-Lefèvre, qui avions été nommés en tant que commissaires-priseurs judiciaires pour régler la succession, avions alerté sur l’existence de ces chevaux. Autant, pour les objets, on a toute la vie devant de soi ; autant ce n’est pas le cas pour les chevaux. En février 2012 s’est donc déroulé le premier volet de cette succession avec la dispersion chez Arqana de ses chevaux [13 lots appartenant tous à la souche des “N”, celle de Néoménie, sont passés sur le ring, nldr]. Le deuxième volet de cette succession est celui qui nous intéresse aujourd’hui. Pendant dix ans, il y a eu une procédure. L’administrateur judiciaire nous a donné le feu vert en octobre 2020 pour organiser cette vente de 231 lots, tableaux, sculptures, objets d’art, meubles, mais aussi tapis, qui étaient dans son grand appartement parisien. Parmi les œuvres et les objets, beaucoup sont en lien avec les courses.
Si vous deviez détacher trois lots en rapport avec les courses, auxquels penseriez-vous ?
Je commencerais par les lots 11 à 24, les œuvres de Maurice Taquoy (1878-1952). Il a immortalisé à la perfection les jours de courses. Ce sont généralement des gouaches sur deux pages de programme de courses, comme une sorte de compte rendu de la réunion. Les gestes sont bons, aussi bien ceux des chevaux que ceux des personnes présentes dans le rond. Cela ressemble presque à une petite bande dessinée. Ensuite, je pense au lot 32, une œuvre de William Siss, intitulée Deauville au pesage, 1973. C’est une représentation parfaite de ce qu’étaient les courses à l’époque. En bas à droite de la toile, on voit Daniel Wildenstein et son fils Alec, ainsi qu’Albert Klimscha, Yves Saint-Martin, mais aussi Angel Penna [Allez France (Sea Bird) gagnera le Boussac pour l’entraînement de Klimscha avant d’être confiée à Penna, avec qui elle remportera l’Arc 1974, ndlr]. Sont également représentés Léon Zitrone, Alec Weisweiller, Suzy Volterra… Enfin, s’il fallait présenter un lot plus qu’un autre, j’évoquerais le numéro 50. Ce sont deux plaques rectangulaires en cristal représentant Allez France dans le Diane 1973 et Peintre Célèbre (Nureyev) dans le Jockey Club 1997.
Il s’agit aussi d’une vente très symbolique pour le monde des courses ?
Le monde de l’art et celui des courses sont très liés. Aujourd’hui encore, parmi les propriétaires et éleveurs, il y a de nombreux collectionneurs d’art. Et, historiquement, rappelons que les courses ont inspiré de nombreux artistes, Delacroix, Duffy, Stubbs… En 2019, nous avions organisé une vente de bronzes hippiques, qui avait connu un grand succès [Les quatorze bronzes se sont vendus pour la somme totale de 174.250 €, ce qui équivaut pour certains objets à plus de trois fois leur estimation, ndlr]. Ce jour-là, parmi les enchérisseurs, beaucoup de gens liés aux courses étaient présents. Vendredi prochain, quand nous vendrons ces lots ayant appartenu à une grande dame des courses, j’espère que de nombreux passionnés répondront encore présent.
En quoi une vente d’œuvres d’art diffère-t-elle d’une vente de chevaux ?
Techniquement, le catalogue propose une estimation des lots, ce qui n’est pas le cas pour les ventes de chevaux. Nous commençons d’ailleurs les enchères à la moitié de l’estimation, en général. Ensuite, il y a une part de rêve en moins. Lorsqu’on achète un yearling aux ventes, tous les rêves sont possibles. Enfin, il en va de la sensibilité de chacun. On a envie ou non d’avoir des objets d’art dans son environnement quotidien.
Rappelons que vous êtes passionné par les courses hippiques, propriétaire-éleveur et commissaire France Galop. Vous devez être plus qu’enthousiaste à l’idée d’organiser une telle vente ?
Vous avez parfaitement décrit mon état d’esprit (rires). Je me suis pris de passion pour les courses au début des années 1970. Par exemple, le lot 32 dont je vous parlais signifie beaucoup de choses pour moi. Tout d’abord, plus jeune, j’adorais Yves Saint-Martin. C’était mon idole ! Et, sur ce même lot, apparaît une personne qui a beaucoup compté pour moi et grâce à qui j’ai pu aborder ce milieu, c’est Jean-Michel de Choubersky. Un véritable esthète. De cette rencontre est née une amitié très forte. C’est une anecdote que je raconte souvent mais, le jour où je l’ai rencontré, il m’a dit : « Que faites-vous ce week-end ? Mettez une paire de bottes dans le coffre de votre voiture ! » A commencé là une belle histoire et, pendant plusieurs années, j’ai monté des lots chez lui.
PHOTO : Lot 32. William Siss. Deauville au pesage, 1973. Huile sur toile, signée en bas à droite. 65 x 81 cm. On peut reconnaître, de gauche à droite, Claude-Ferdinand Dreyfus, Alec Weisweiller, Souren Vanian, Suzy Volterra, Maria Felix, Georges Pelat, Yves Saint-Martin, Albert Klimscha, Daniel et Alec Wildenstein, Angel Penna, Jean-Michel de Choubersky et, au second plan à droite… Léon Zitrone. Estimation : 1.000 – 1.500 €
Comment y participer ?
Pour participer à la vente, il existe quatre possibilités :
- être présent physiquement
- ne pas être présent et avoir laissé un ordre physique d’achat à l’étude, qui se chargera de l’exécuter
- participer à la vente par téléphone
- participer à la vente via Internet, sur drouot live
Pierre-Yves Lefèvre nous explique : « Avec la pandémie, une jauge a été fixée. Nous avons pris deux salles pour augmenter la capacité d’accueil et nous pourrons accueillir une quarantaine de personnes dans chaque salle. Avant le premier confinement, autour de 250 personnes participaient aux ventes via Internet. Aujourd’hui, nous tournons davantage autour de 700 à 800 personnes. »
Hôtel des ventes de Paris-Drouot Richelieu
9 rue Drouot, 75009 Paris
Salles n° 5 et 6
Horaire de la vente : vendredi 19 mars à 13 h 30.
Expositions publiques :
- Mercredi 17 mars de 11 h à 18 h
- Jeudi 18 mars de 11 h à 18 h
- Vendredi 19 mars de 11 h à 12 h
Pour consulter le catalogue, cliquez ici https://www.drouotonline.com/ventes/112555/succession-sylvia-wildenstein?max=50&period_sales=future&offset=0&refurl=succession-sylvia-wildenstein&query=&lotGroupTheme=
Vous aimerez aussi :

Pourquoi désormais moins d’étalons font-ils le shuttle ?
On dit souvent que c’est Coolmore qui a inventé le concept. Faire saillir un étalon dans l’hémisphère Sud durant l’hiver européen a en tout cas...
17 décembre 2022.jpg)
LE MAGAZINE : Un Groupe sur trois pour les juniors de Ballydoyle
LE MAGAZINE Un Groupe sur trois pour les juniors de Ballydoyle Aidan O’Brien a remporté cette année huit Groupes sur les vingt-trois ayant eu lieu en Europe chez les 2ans, soit...
05 août 2022