
International / 13.06.2021
Royal Ascot, formule "buffet à volonté"
Le monde change vite et Royal Ascot n’y échappe pas. L’ancienne formule avec 24 courses en quatre réunions n’est d’ailleurs plus qu’un vieux souvenir. Elle a laissé place à cinq réunions et 35 courses. C’est un peu comme si nous étions passés d’un restaurant tenu par un grand chef, où chaque plat était unique, au buffet à volonté d’une chaîne de restaurant...
Par Franco Raimondi
En réalité, ce changement qui s’est opéré au fil des années n’a fait qu’obéir aux lois du marché. Les propriétaires aiment gagner à Royal Ascot. Pour le prestige, bien sûr. Mais aussi pour l’argent. Tout le monde sait que les allocations anglaises sont faibles. Les maidens pour 2ans proposent de 3.500 £ à 7.500 £. Une Listed comme les Windsor Castle (L) offrira 38.840 £ (44.700 €). En France, une pouliche de Royal Ascot telle que Dizzy Bizu (Caravaggio) a touché 13.500 € pour sa victoire dans une course réservée aux inédites, et 30.000 € en remportant le Prix La Flèche (L). L’allocation de la Listed est 2,22 fois celle du maiden. En Angleterre, c’est huit fois plus. À gros traits, voici la force et la faiblesse des courses en Angleterre. Mais cela pourrait également s’appliquer au monde entier. Les courses sont un produit quotidien : 365 jours sur 365. Un challenge inimaginable dans les autres sports. Pour le relever, il a fallu créer des événements, comme ces grands meetings que les puristes regardent avec dédain. Comme un gourmet coincé devant un buffet à volonté, dans lequel des plats délicieux se cachent derrière des montagnes de mets moins exceptionnels. Ce n’est pas le monde idéal, mais c’est le monde d’aujourd’hui. Pour vendre le spectacle des courses au grand public, il faut jouer ce jeu…
Au travail, jeune Lanfranco ! Le Royal Ascot 2021, avec une jauge à 12.000 spectateurs, en est la démonstration. Avec 73 victoires au compteur, Lanfranco Dettori est le jockey en activité à avoir remporté le plus de courses à Royal Ascot. Son carnet de bal est presque plein. Il devrait monter une trentaine de courses en cinq réunions. Alors que cette année, en Angleterre, il s’est mis en selle 59 fois pour 15 victoires. Son premier succès dans le meeting remonte au 19 juin 1990. Dans les Queen Anne (Gr2 à l’époque), il était associé à Markofdistinction (Known Fact). La course marquait le coup d’envoi du meeting. Sa première Cravache d’or du meeting remonte à 1997, avec quatre victoires. Sa septième est tombée l’année dernière, avec six victoires. Par deux fois il a conclu le meeting avec sept succès. C’est arrivé en 1998, lorsqu’il avait remporté les Queen Anne avec Intikhab (Red Ransom) ou encore la dernière course, les Queen Alexandra, le marathon sur 4.355m, avec Dovedon Star (Unfuwain), une représentante d’Osvaldo Pedroni qu’il avait montée… sagement quatre jours auparavant dans les Ascot Stakes, un handicap long de quatre kilomètres. Une bonne moitié de l’allocation (19.500 £) fut investie par le propriétaire italien pour fêter dignement cette victoire en compagnie d’amis et de supporters.
Quand Fred Archer avait gagné la moitié des courses. Le pilote actuel le plus titré lors du meeting royal n’est autre que Ryan Moore. Avec 8 Cravaches d’or. C’est aussi lui qui détient le record du nombre de succès de l’ère moderne avec neuf victoires (2015). Lester Piggott a été tête de liste à 11 reprises. Il avait atteint huit victoires par deux fois, le même score que Pat Eddery en 1989. Le meeting offrait alors 24 courses, les deux en ont gagné le tiers. Ce n’est rien du tout par rapport à ce qu’avait fait Fred Archer en 1878, année où il avait remporté 12 courses, pile la moitié de l’offre du meeting. Le record des entraîneurs appartient à Sir Michael Stoute avec 81 victoires, six de plus que le regretté Sir Henry Cecil, lequel a eu sept gagnants en 1987, sous le format 24 courses. Aidan O’Brien vient ensuite avec 75 victoires, dix titres, et sept victoires en 2016 en 30 courses.
Deux français avec des pilotes étrangers. La France ne pourra battre son record de l’époque moderne : ses quatre victoires acquises en 1960 par Venture VII (Relic) dans les St James’s Palace Stakes, Sheshoon (Précipitaion) dans la Gold Cup, Barbaresque (Ocarina) dans les Coronation Stakes et Atrax (Pharis) dans les King Edward VII. En effet, cette année, les français ne seront que deux au départ. Il s’agit de la flèche Suesa (Night of Thunder) dans la Commonwealth Cup (Gr1), et Fast Raaj (Iffraaj) dans les Jersey Stakes (Gr3). Les deux seront respectivement montés par William Buick et Andrea Atzeni. Le déplacement des chevaux en Angleterre est difficile… mais jouable. Pour les hommes cela demeure très compliqué.
Le coup d’envoi avec Palace Pier. Ce dimanche, les partants et les jockeys pour la première réunion ont été déclarés : ils sont 107. Les parieurs et les bookmakers comprendront tout de suite ce qui les attend cette semaine. Le grandissime favori, Palace Pier (Kingman), est à 0,36/1. Il paraît imbattable dans les Queen Anne (Gr1), une course à 11 partants, avec la rentrée d’Order of Australia (Australia). Ils sont 17 dans les Coventry Stakes (Gr2), une épreuve qui vaut cinquante fois plus que l’allocation offerte au gagnant (59.200 £, 69.000 €)… si le gagnant est un poulain (et donc un futur étalon). Ou trente fois plus si la pouliche américaine Kaufymaker (Jimmy Creed) parvient à battre les boys. La dernière à l’avoir réussie est Benevente (Polymelus). C’était en 1917 et la course avait eu lieu à Newmarket. Il faut remonter à 1914 pour trouver au palmarès une pouliche gagnante des Coventry à Royal Ascot : Lady Josephine (Sundridge), devenue ensuite une grande poulinière (c’est la mère de Mumtaz Mahal). Ils seront quinze face à Battaash (Dark Angel) dans les King’s Stand Stakes (Gr1). Pour les bookmakers, c’est un véritable casse-tête. Le tenant du titre fera sa rentrée après 298 jours d’absence. Sur son meilleur rating, il est imbattable mais… Lanfranco Dettori a récupéré la monte de l’américain Extravagant Kid (Kiss the Kid), lauréat de l’Al Quoz Sprint (Gr1) à Meydan. Le quatrième Groupe de la réunion d’ouverture, les St James’s Palace Stakes (Gr1), n’est pas plus facile à décrypter. Le favori, Poetic Flare (Dawn Approach), sera au départ de son quatrième Gr1 en 46 jours. Et sachant que les trois derniers gagnants de l’épreuve ont fait l’impasse sur les Guinées et la Poule… Le buffet à volonté de Royal Ascot va susciter beaucoup d’interrogations et offrira autant de réponses tout au long des cinq jours, même en faisant la fine bouche et sans s’occuper des handicaps !
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