
Autres informations / 21.12.2021
Emploi dans les courses, le temps de l'humain
Lundi, les résultats de l’étude sur l’attractivité des métiers liés à l’entraînement des chevaux de course réalisée par l’IFCE ont été rendus publics et discutés par un panel constitué par Carole Troy (IFCE), Guillaume Herrnberger (Afasec), François-Xavier de Chevigny (AEG), Frédéric Danloux (AEP) et Stéphane Meunier (SEDJ). Pour ce sujet crucial qu’est l’emploi dans les courses, la filière fait preuve d’unité : trot, galop, organismes de formation et d’étude se sont assis autour d’une table pour comprendre les défis que va devoir relever notre univers et, à terme, pour trouver des solutions.
L’étude en question a été menée en 2020 et 2021, et, nouveauté, ce sont les apprenants et les salariés qui ont été majoritairement interrogés. Il s’agissait d’entendre la voix des employés plutôt que celle des employeurs, dans un marché de l’emploi désormais dirigé par les candidats, comme l’a expliqué Guillaume Herrnberger.
Cette étude poursuivait trois objectifs :
- quantifier et expliquer les flux d’apprenants, de salariés et de reconvertis ;
- partager et hiérarchiser les freins à la formation et à l’emploi ;
- identifier les leviers prioritaires de revalorisation de ces métiers.
Un taux de tension élevé. Premier constat : les métiers des courses ont un taux de tension (calculé selon le nombre d’offres d’emploi disponibles et le nombre de candidats y ayant postulé) parmi les plus élevés en France. Tous les métiers sont concernés ! Une tension telle qu’il a été demandé de les inscrire parmi les métiers en tension. Le dossier a été déposé au ministère de l’Agriculture, qui va le soumettre au ministère du Travail.
François-Xavier de Chevigny explique : « Ensuite, ça se passe au niveau régional. Avoir le statut de métier sous tension facilite les démarches administratives pour recruter en dehors de l’Union européenne. Ce recrutement à l’étranger nous offrirait une sorte de bol d’air en attendant d’avoir plus de candidats en France. » C’est à chaque préfet de décider si ce statut est mérité, mais la demande a été faite pour toutes les régions. Ce statut permet aussi de mettre en place des formations pour adultes pour aider à leur reconversion.
Des métiers difficilement conciliables avec les attentes des jeunes. L’étude a révélé que la filière faisait face à quatre grandes tendances en matière de formation et d’emploi :
- une densification du travail dans les écuries de courses, du fait de la multiplication des réunions (donc des salariés partis plus souvent pour accompagner les chevaux aux courses), et la mise en place des 35 heures ;
- une trop faible transformation du travail, créant un écart avec les attentes des jeunes. Stéphane Meunier réagit : « Nos métiers sont difficilement mécanisables, et trop de mécanisation serait même un danger pour le bien-être animal. Un cheval doit être sorti et nourri tous les jours… On ne peut pas changer cela ! » ;
- la difficulté de recrutement entraîne une plus faible sélection des candidats, pas forcément adaptés aux tâches qui leur confiées. Comme l’a souligné Frédéric Danloux, la baisse globale du niveau d’équitation classique constatée dans les centres équestres n’aide pas à trouver des cavaliers suffisamment armés pour basculer dans l’équitation de course ;
- un turnover important au sein des écuries, les jeunes ayant tendance à passer d’une écurie à l’autre sans réelle raison identifiée.
Une formation de qualité, mais peu pourvoyeuse en nouveaux salariés. Il existe un paradoxe entre la qualité de la formation dispensée par les neuf écoles spécialisées, et le profil des candidats recrutés dans les écuries. Sur les 800 à 1.000 nouveaux salariés à intégrer chaque année, seuls 20 % sont issus de ces écoles spécialisées. Or la qualité de la formation est reconnue : 94 % des apprenants jugent comme bonne la formation qu’ils reçoivent, 80 % des salariés en poste sont satisfaits de la formation initiale reçue, et même 75 % des personnes reconverties dans un autre secteur sont également satisfaites de la formation initiale qu’elles ont reçue. Dès lors, il semblerait que c’est l’intégration dans la première entreprise qui pose problème. L’étude a révélé que les nouveaux salariés ou les apprentis, s’ils jugent que l’accueil dans cette première entreprise est bon, estiment en revanche que l’ambiance et la disponibilité du tuteur ne sont pas satisfaisantes. Les personnes interrogées regrettent des méthodes de management souvent inappropriées, un statut d’apprenti pas assez différencié de celui du salarié, et trop peu de montes en course. Cette mauvaise première expérience déteint directement sur l’attractivité des métiers des courses et des formations qui y préparent.
Un cinquième des salariés envisagent d’arrêter ! L’étude menée par l’IFCE a aussi permis d’identifier les freins dans l’emploi, qui entraînent un turnover important. Au galop, les principales causes d’insatisfaction concernent les problèmes liés à la santé et à la sécurité, le manque d’évolution des compétences et de la carrière, l’équilibre difficile entre la vie professionnelle et la vie personnelle, et la rémunération. Les chiffres du turnover sont impressionnants : 24 % des entrants en 2018 ne sont plus dans le secteur en 2020, 38 % des reconvertis ont moins de cinq ans dans le métier. Pire encore : 30 % des salariés ne savent pas s’ils feront ce métier dans cinq ans, et 20 % pensent arrêter !
Quelles solutions ? Face aux difficultés de recrutement auxquelles ils font face, les employeurs ont en effet trop souvent tendance à considérer l’apprenti comme un salarié supplémentaire. Concernant la lacune pointée sur la monte en course, François-Xavier de Chevigny explique : « Nous sommes en train de réfléchir à une évolution des courses écoles. Pourquoi ne pas les diviser en trois niveaux : le premier niveau correspondrait à des courses de poneys, le deuxième à des courses avec des chevaux de l’Afasec, et le dernier aux courses actuelles, avec des chevaux prêtés par les entraîneurs. Cela permettrait à plus d’apprentis de goûter à la monte sur un hippodrome. »
Concernant la formation de l’Afasec, Frédéric Danloux ajoute : « Il nous semblerait judicieux qu’en dernière année les apprentis passent plus de temps en entreprise. Les entraîneurs le souhaitent, les apprentis aussi : il y a sûrement quelque chose à faire de ce côté-là. »
Guillaume Herrnberger a quant à lui souligné l’importance du temps humain. « Nous devons former tous les managers, pas seulement les entraîneurs, mais leurs responsables aussi. On peut imaginer des modules de formation à distance pour cette population à l’emploi du temps très chargé. Mais il va être crucial de faire évoluer les techniques de management. Il faut que les employeurs et les managers prennent le temps de l’humain, de la formation. »
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