
Courses / 16.05.2022
Dadas, data
Un mot de quatre petites lettres, qui change déjà nos vies : data. Surtout dans le sport de haut niveau. En Formule 1, au football ou encore au basket, pour ne citer qu’eux, la technologie est devenue indispensable, en particulier pour les acteurs, dans l’analyse de la performance et la valorisation d’un sportif.
Après avoir été longtemps en retard sur le sujet, France Galop a enfin pris en compte l’importance du sujet en mettant à disposition de tous un tracking sur ses hippodromes (et au-delà, en régions). Ces données sont d’une incroyable richesse et permettent une analyse détaillée du déroulement des courses. Elles sont aujourd’hui indispensables pour mieux comprendre ce qu’il s’est passé, expliquer des défaites ou même se projeter dans l’avenir. Nous avons demandé à Bruno Barbereau, le meilleur spécialiste français de la vitesse, de revenir pour nous sur le dimanche des Poules et de nous expliquer comment Mangoustine et Modern Games se sont imposés.
Longchamp, lice à zéro, bon terrain… ce que dit le tracking
Lorsque nous l’avons eu au téléphone lundi après-midi, Bruno Barbereau avait pris le temps, comme il le fait depuis vingt ans, de retraiter (réanalyser) les chronos de chacun des chevaux. Sa méthode est hyper rodée, mais elle a encore gagné en précision depuis que le tracking français est parfaitement fiable. Et pour lui, les choses sont claires : nous avons assisté à deux belles Poules d’Essai.
« Les temps des deux courses sont très bons, dans les dix meilleurs temps réalisés par des 3ans à Longchamp au mois de mai depuis 40 ans. Si on prend mâles et femelles confondus, le temps idéal est de 95’’07. Le chrono de Modern Games est particulièrement bon : 94’’98, soit le quatrième meilleur temps depuis 1982 pour un 3ans, au mois de mai, à Longchamp, le record étant Victory Note en 94’’50. Les éléments se prêtaient à de bons chronos : le parcours des 1.600m grande piste de Longchamp, une piste rapide et une lice à zéro. On peut critiquer les Poules à Longchamp mais elles sacrent des chevaux durs, qui savent prendre des coups, se reprendre, et qui savent accélérer : c’est peut-être bien aussi, non ? »
Mangoustine ne doit rien à personne
Mangoustine (Dark Angel) a gagné la Poule d’Essai des Pouliches d’une tête devant Cachet (Aclaim), la gagnante des 1.000 Guinées de Newmarket il y a quinze jours, où elle avait emmené la course à un rythme effréné. Elle a de nouveau mené dimanche : « Nous avons certainement un lot homogène du côté des pouliches, plusieurs ont été desservies par leur numéro de corde. Chapeau bas à Cachet : elle a mené dans la Poule, quinze jours après une course à la mort à Newmarket, et elle est deuxième malgré tout. Avec une semaine de récupération de plus, je pense qu’elle aurait pu s’imposer. Un petit mot pour Rosacea (Soldier Hollow), quatrième en prenant un coup de tampon au plus mauvais moment possible, quand la course s’est lancée dans la ligne droite… Et il était difficile de rattraper cela : quand la course est partie, elle est partie…
Mangoustine, elle, venait d’être un peu malheureuse dans le Prix de la Grotte et, dimanche, elle était à 100 %. Malgré un parcours en épaisseur le nez au vent, elle réussit à s’imposer parce qu’elle était au bon endroit au moment où la course s’est lancée pour venir coiffer tout le monde au poteau. Mikel Delzangles a fait un excellent travail avec elle : je pense que beaucoup de gens ont oublié son palmarès. Il y a de quoi se relever la nuit ! Quand il court un cheval dans un Gr1, il est à 100 %. »
Cachet a-t-elle cependant imprimé assez de rythme pour permettre aux attentistes de revenir ? Pour Bruno Barbereau, oui : « Si on trouve qu’il n’y a pas eu assez de rythme dans la Poule d’Essai des Pouliches, c’est en réalité un problème de distance, qui était trop longue pour les pouliches concernées. Certaines ont été desservies par leur numéro de corde et ont été reprises en partant : en bon terrain à Longchamp, cela ne sert à rien de reprendre ! Parce que, devant, cela bombarde tout de suite et cela revient à perdre 100m… Et on ne peut pas refaire ces 100m ! Par exemple, Sicilian Defense est reprise en partant et est pour moi la cinquième meilleure note de la corse. Osmose aussi signe des partiels magnifiques mais elle était dernière dans le parcours. Une pouliche comme Times Square (Zarak) a quant à elle bien failli s’imposer en avançant et en profitant de son 3 dans les stalles et elle a de la dureté. Je pense que nous avons vu de bonnes pouliches dans la Poule d’Essai et certaines des battues en gagneront une belle. »
Modern Games nettement le meilleur
Du côté des poulains, les données tracking fournies par France Galop sont passionnantes : nous sommes partis sur un rythme digne du Kentucky Derby ! Le partiel le plus rapide de la course est celui de Tribalist (Farhh), des 1.400 aux 1.200m en 10’’90, soit une pointe à 66 km/h. Pour les Poulains, il y a eu les enseignements des Pouliches… Il fallait avancer !
Bruno Barbereau : « Chez les Poulains, on a été très vite au départ. Après les pouliches, tout le monde a vu qu’il valait mieux avancer vite dès le départ, quitte à prendre le risque de "mourir" pour finir, plutôt que de ne pas pouvoir revenir. On note notamment le partiel de Tribalist : Mickaël Barzalona a de l’expérience en Grande-Bretagne et savait comment cela allait se passer avec les Britanniques présents et, avec l’as, il a avancé en partant pour garder sa place. On note aussi qu'avec Texas (Wootton Bassett), qui s’élançait de la stalle 15, le choix a été fait d’avancer tout de suite en début de parcours : et il a été loin ! Il est battu par Modern Games (Dubawi), qui était au-dessus du lot. Déjà, il faut souligner que le poulain a failli tomber à l’ouverture des stalles, il était sur les genoux et il a su se relever et se relancer tout de suite, puis reprendre pour prendre un sillage, puis se relancer dans la ligne droite : c’est un poulain endurci par Charlie Appleby, qui l’a emmené jusqu’à la Breeders’ Cup à 2ans. Il faut arrêter de croire que, pour faire durer les chevaux, il faut les préserver à tout prix ! Charlie Appleby a annoncé qu’il pourrait courir le Prix du Jockey Club : il a raison, il sera très difficile à battre. C’est un vrai bon poulain. Derrière, on a eu une floppée de poulains malheureux, qui ont pris des coups. C’est le cas par exemple de Lassaut ** (Almanzor) : dans une course comme la Poule d’Essai, il faut savoir prendre des coups et il ne sait pas encore le faire. On peut refaire la course dix fois, Modern Games gagnera les dix fois. Pour les pouliches, je suis moins affirmatif, nous avons un lot plus homogène mais il est de bon niveau. »
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