Alec Head, l'hommage de ceux qui l'ont connu

Autres informations / 23.06.2022

Alec Head, l'hommage de ceux qui l'ont connu

Les mots de Christopher Head pour son grand-père

« Mon grand-père sera toujours l’homme pour lequel j’ai le plus d’admiration. Il a créé notre famille et il a toujours veillé à ce qu’elle ne manque de rien. Nous lui devons notre passion et notre amour des chevaux et, si bien des années nous séparaient, ce sont les chevaux qui nous rapprochaient. Il appartenait à la race de ceux qu’on ne peut pas remplacer et il sera très difficile de lui succéder. Il ne me laisse que de bons souvenirs, j’ai eu tant de chance de le côtoyer. Mes pensées sont entièrement tournées vers ma grand-mère, avec qui il formait un couple fusionnel depuis tant d’années. Je terminerai par une phrase de Victor Hugo qui décrit la pensée que partagent bon nombre de personnes qui ont travaillé avec lui : "Tu n’es plus là où tu étais mais tu es partout là où je suis." »

Marc de Chambure : « Une vision. »

En 1974, Alec Head et Roland de Chambure s’étaient associés, créant l’écurie Aland qui reprenait les couleurs de la mère d’Alec Head. Elles sont ensuite devenues les siennes. Ensemble, Alex Head et Roland de Chambure, disparu en 1991, ont rencontré de grands succès : avec Ravinella, Harbour ou encore Matiara. Marc de Chambure se souvient : « La disparition d’Alec Head est une triste nouvelle. Mon père et Alec étaient associés, mais surtout les plus grands amis du monde. Ils étaient d’une très grande complémentarité, notamment dans l’élevage. Mon père avait plus une vocation de financier et, ensemble, ils formaient un duo d’exception. Ils ont eu une vision, ils ont été très précurseurs et dynamiques et ont fait briller l’élevage français à l’international. Ils avaient une antenne aux États-Unis et ont réalisé ensemble beaucoup de deals, en import comme en export. Et tout cela a été très bénéfique pour l’élevage français marqué par cette époque. Je suis très ému… »

Louis Romanet : « Un grand modèle. »

Alec Head, avec sa famille, a eu une influence majeure sur le monde de l’entraînement et de l’élevage, au moment où la famille Romanet a changé la France des courses sur le plan institutionnel. Les deux familles se connaissaient et Louis Romanet nous a dit : « Je crois qu’il était un homme unique. Il a été capable de briller dans tous les aspects du monde des courses et de l’élevage, année après année. Et il a su construire autour de lui une saga de famille qui, aujourd’hui encore, impressionne. Ma famille a eu des relations très proches avec Alec, et c’était toujours un plaisir de vivre des moments ensemble. Je me souviens de l’Arc de Three Troikas, je me souviens aussi de la visite de Sa Majesté la reine d’Angleterre au haras du Quesnay. Et il ne faut pas oublier son associé et ami, Roland de Chambure. Ensemble, ils ont été les précurseurs dans les investissements à l’étranger, dans l’envoi de juments aux États-Unis. Ensemble, ils avaient pris un vrai ascendant sur l’élevage… Alec Head, c’est aussi une succession, avec Criquette et Freddy et désormais les enfants de Freddy qui commencent à réussir comme entraîneurs. On dit souvent qu’un grand homme est épaulé par une grande femme : c’était le cas pour Alec avec Ghislaine qui a été extraordinaire, une gestionnaire hors pair et qui l’a beaucoup aidé dans tous les aspects nécessaires. Et aussi Criquette qui a montré, avec Three Troikas, des qualités d’entraîneur au plus haut niveau et qui a prouvé que les femmes pouvaient aussi réussir.

Alec Head a été un grand modèle. J’ai eu beaucoup de plaisir avec lui. C’était quelqu’un qui avait ses opinions et qui n’hésitait pas à les exprimer de façon vive, avec son libre parler, il tentait de vous convaincre. Il était admiré par le monde entier : peu de gens ont, comme lui, réussi dans tous les aspects des professions des courses. Pour l’achat de chevaux, il avait un œil exceptionnel ! Avec Roland, ils ont acheté tant de champions, foals ou yearlings. Three Troikas, Lyphard, Riverman… Son œil m’a toujours marqué. L’élevage français lui doit son internationalisation : il a vendu des chevaux, ce qui n’a pas toujours plu, mais il les avait déjà bien mis en valeur en France et, quand il vendait, il réinvestissait. Sa politique d’élevage était gérée avec une grande intelligence. Il faut se souvenir de tous ces champions qu’il a achetés, stationnés et utilisés comme étalons, remplissant le cycle de l’élevage et des courses… »

Philippe Augier : « Alec Head a montré le chemin de l’internationalisation de l’élevage français des pur-sang anglais. »

Philippe Augier, maire de Deauville et ancien P.-D. G. de l’Agence française, nous a dit : « C’était probablement l’acteur dans le galop le plus complet. Il a d’ailleurs été récompensé mondialement. Je suis très ému d’apprendre sa disparition. Il était à la fois un éleveur et un entraîneur de génie. Dans ma société, à l’époque, Alec Head était au conseil d’administration. Avec ses complices Roland de Chambure et Olivier Nicolle, il travaillait sur tout ce qui touchait au développement et à l’internationalisation. Et lorsqu’il y avait un projet audacieux, Alec Head était de ceux qui poussaient vers le haut. Il disait toujours les choses avec beaucoup de simplicité. Alec Head était aussi un homme qui adorait partager les plaisirs de la vie. Cela en faisait un ami et un compagnon extraordinaires. J’ai énormément appris à ses côtés… Je n’étais qu’un gamin pour lui. Et au-delà du métier du cheval, il m’a vraiment appris la vie. Je l’appelais "le parrain du galop", car il était de ces sages qui mettaient leurs paroles à exécution. C’est lui qui a montré le chemin de l’internationalisation de l’élevage français des pur-sang anglais. Il a d’ailleurs été le premier à faire importer des étalons américains comme Lyphard et Riverman. À l’époque, cela avait fait polémique. Ça a été un moment très difficile pour lui. Certains réactionnaires disaient qu’il avait sabordé l’élevage français. Mais s’il n’avait pas fait ça, l’élevage français n’existerait certainement plus. Ceux qui avaient compris venaient auprès de lui prendre des conseils. Alec Head était aussi quelqu’un qui avait beaucoup d’humour. Il avait les yeux qui pétillaient et c’était un bonheur de le voir. La dernière fois que je l’ai rencontré, c’était il y a deux ans. Il était exactement comme ça. »

Éric Hoyeau : « Il a fait rayonner la France dans le monde. »

L’influence d’Alec Head sur l’élevage s’est étendue jusqu’aux ventes. Il a été l’un des membres fondateurs de l’Agence française, devenue Arqana. Éric Hoyeau, son président-directeur général, nous a dit : « Il était la connaissance universelle du pur-sang et avait une reconnaissance universelle. J’ai toujours été admiratif de son rayonnement à l’étranger. Via sa carrière d’entraîneur et d’éleveur, il a eu un très fort impact sur les ventes françaises et, au-delà, il a tout simplement fait rayonner la France à l’étranger. Sa connaissance et ses compétences étaient reconnues partout dans le monde et il a été l’initiateur de l’importation des meilleurs courants de sang américain, comme Vincent O’Brien l’a été en Irlande. Alec Head laisse un héritage immense à l’industrie des courses françaises. Concernant les ventes, il a été l’un des membres fondateurs de l’Agence française, en 1968, et il en a longtemps été administrateur. Il laisse son empreinte dans le monde des chevaux et des hommes de chevaux, que ce soit dans les courses, l’élevage et les ventes, avec ses enfants et petits-enfants qui sont désormais entraîneurs. »

Jean-Pierre Dubois : « Un grand homme de cheval. »

Jean-Pierre Dubois et Alec Head : l’un au trot, l’autre au galop. Tous deux ont changé l’histoire des courses en France. Jean-Pierre Dubois se souvient : « Alec Head était un grand monsieur, un grand homme de cheval. C’était toujours un bonheur de passer un moment à discuter avec lui. Ce n’est pas arrivé aussi souvent que je l’aurais souhaité… Il a été un éleveur en avance sur son temps, un immense éleveur. L’écouter raconter ses histoires était toujours un excellent moment. J’ai appris de lui… Il a eu quelques trotteurs qui étaient entraînés par Philippe Allaire. Et il aimait d’ailleurs trotter les chevaux : il est venu quelquefois chez moi et, pendant que nous trottions, nous pouvions discuter. Un grand monsieur, tout simplement ! »

Vincent Rimaud : « Le Quesnay a perdu son père. »

Directeur du haras du Quesnay, Vincent Rimaud nous a dit : « Nous ne l’avions pas vu depuis un moment au Quesnay et il nous manquait… Nous avions l’habitude de le voir arriver sur son Gator, il passait nous chercher et nous faisions le tour des poulains. Il vivait une partie de l’année à l’étranger, partant après l’Arc ou les ventes. Nous allions voir les foals avant son départ et il y avait quelque chose d’incroyable avec lui : quand il revenait, six mois après ou plus, il les reconnaissait tous ! Connaître les pedigrees sur le bout des doigts est une chose… Mais je ne sais pas combien de personnes, même des directeurs de haras, seraient capables de reconnaître un poulain tant de mois après. J’étais toujours époustouflé par cela. Alec Head était dur mais juste. Pour tous les gens qui ont travaillé avec lui, il était "Monsieur". C’était un sacré bonhomme et le Quesnay a perdu son père. Il y a encore une dizaine d’années, nous le voyions arriver dans son 4×4 gris, il baissait la fenêtre et disait : "J’ai eu une idée !" C’était Alec ! Il a créé le haras, il choisissait les étalons qui rentraient : si Alec n’avait pas envie d’envoyer une jument à un potentiel étalon, alors il ne le prenait pas. Il faisait les croisements et avait un œil. C’est une page qui se tourne et tout le monde au Quesnay a appris la nouvelle avec tristesse. Il va nous manquer et je suis ravi d’avoir fait un bout de route avec lui. »

Thierry Jarnet : « Son nom restera comme l’un des plus grands du monde des courses. »

Thierry Jarnet a raccroché les bottes depuis quelques années… Tout jeune, il a commencé à monter pour la famille Head et son nom reste associé à celui de Trêve. « J’ai commencé à monter pour la famille Head lorsque j’étais tout jeune. C’était pour Criquette et pour Alec. J’ai rencontré Alec Head il y a au moins trente-cinq ans. Son décès m’attriste énormément. C’était un grand professionnel et quelqu’un de très agréable. Son nom restera comme l’un des plus grands du monde des courses. Quand Trêve a gagné sa course à 3ans, je me rappelle que Criquette voulait aller sur le Prix de Diane (Gr1) mais Alec n’était pas d’accord. Il voulait que la pouliche monte les échelons. Mais Criquette sentait que la pouliche avait quelque chose en plus et finalement, il a eu raison de laisser le dernier mot à sa fille. Lorsque nous avons gagné l’Arc, je me rappelle qu’il avait les larmes aux yeux. Cette victoire était un aboutissement pour son élevage. »

Guy Guignard : « Je me souviendrai de lui toute ma vie. »

Ancien jockey, Guy Guignard était très ému : « C’était un grand monsieur, un grand entraîneur et un homme très respectable… Mais il n’était pas toujours facile ! Apprendre son décès m’émeut énormément. J’en ai les larmes aux yeux. J’ai l’habitude d’appeler Freddy deux fois par an : pour le Nouvel An et pour son anniversaire. Dimanche 19 juin, je l’ai donc contacté et je ne l’ai pas trouvé très bavard… Il avait peut-être un pressentiment… Être au côté d’Alec Head et monter pour lui a été un grand moment. Je me souviendrai de lui toute ma vie. »

Olivier Doleuze : « On pourrait le comparer à un Gabin ou à un Ventura. »

« Alec Head a beaucoup compté dans ma vie. Il m’a tout appris et j’ai eu la chance de grandir à ses côtés. J’ai pu profiter de ses conseils, de son expérience et de sa confiance. Il avait cette aura… Celle qu’ont les grandes personnes. On pourrait le comparer à un Gabin ou à un Ventura. J’ai pu gagner le Prix Jean Prat sous ses couleurs. Alec Head était quelqu’un de juste mais exigeant. Et avec tout le monde ! Il voulait que le travail soit bien fait. Dès qu’il y avait un problème, il était là pour ses employés et essayait toujours de trouver une solution. Ce qui me frappait avec lui, c’est que, quand il venait à l’écurie, il était capable de reconnaître n’importe quel cheval… Même celui qu’il n’avait pas vu depuis six mois ou qu’il n’avait pas vu depuis l’élevage. Je suis triste d’apprendre son décès, mais à 97 ans, on peut dire qu’il a eu une vie bien remplie. J’ai très peu connu mes grands-pères. Et Alec Head, je le voyais comme tel. Dans la vie, s’il y a une personne dont je voulais qu’elle soit fière de moi, c’était bien elle. »

Édouard de Rothschild : « Il avait une ambition et une audace hors normes »

Édouard de Rothschild, président de France Galop : « Pendant près de cent ans, Alec Head a été associé à l’histoire des courses, successivement comme jockey, entraîneur pour de prestigieuses casaques, éleveur de chevaux gagnants du Prix de l’Arc de Triomphe dans son haras normand du Quesnay, et propriétaire de champions. Nous garderons dans nos mémoires son esprit pionnier, un talent de bâtisseur, l’image d’un homme en avance sur son temps, regardant toujours devant lui, ayant toujours des projets en tête. Il avait une ambition et une audace hors normes. Ce parcours exceptionnel a inspiré plusieurs générations de professionnels du Galop et de passionnés des courses. Alec Head a guidé ses enfants et petits-enfants qui perpétuent aujourd’hui encore le rayonnement de la famille Head dans les courses. À ses proches et aussi à tous ceux qui l’ont aimé et admiré, France Galop présente ses sincères condoléances. »

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