International / 05.07.2022

Une course anglaise en France et une course française en Angleterre…

Une course anglaise en France et une course française en Angleterre…

Bruno Barbereau, notre spécialiste des chronos, est revenu sur un beau week-end de courses avec la victoire explosive d’Alpinista dans le Grand Prix de Saint-Cloud et celle plus "bagarreuse" de Vadeni dans les Eclipse Stakes…

Alpinista s’offre le record du Grand Prix de Saint-Cloud

Alpinista a gagné le Grand Prix de Saint-Cloud pour sa rentrée en s’offrant le record de la piste… Bruno Barbereau nous explique comment cela a été possible : « Cela faisait longtemps que nous n’avions pas vu un Grand Prix de Saint-Cloud avec un tel plateau. Le terrain était bon, tirant vers le rapide : good to firm [bien qu’officiellement à 3,3. Bon souple, ndlr]. Avec cette nature de sol, la présence de chevaux anglo-irlandais de niveau Gr1et une lice à zéro, nous avions le cocktail gagnant pour une course qui avance. De fait, les amoureux de la vitesse comme moi se sont régalés ! Alpinista a fait un vrai truc en 1’26’’15. J’ai retrouvé le Paris Turf du Grand Prix de Saint-Cloud 1987 remporté par Moon Madness et le temps indiqué est de 1’26’’50. Elle établit donc le record de l’épreuve et de la piste et elle est la seule à passer sous les 35 secondes dans les 600 derniers mètres : étant donné le rythme imprimé, ses 23’’31 lors des 400 derniers mètres sont très bons. Tout le monde coince autour des 12 secondes dans les 200 derniers mètres : encore une fois, ceci est normal puisque l’épreuve ne s’est pas jouée sur un sprint. Baratti poursuit sa progression et confirme qu’il est un poulain de Gr1. On m’a dit qu’il était bien rond. Il peut encore progresser et lui et Alpinista ont le droit d’avoir des prétentions dans l’Arc. Bubble Gift a eu un parcours en or et Sweet Lady (Lope de Vega), quatrième, finit bien : les quatre premiers ont rehaussé leur vitesse pour finir. Deux déceptions sont à noter : Hurricane Lane (Frankel), qui a peut-être eu un problème car le mauvais parcours ne suffit pas à expliquer cette contre-performance, et Mare Australis (Australia) qui, étant donné la position de Bubble Gift dans le parcours, aurait dû aussi être dans la bagarre... Nous avons en tout cas eu une course avec un vrai rating de Gr1, la vitesse et la piste ont parlé : ce fut une course à l’anglaise en France… Alors que les Eclipse ont été une course française en Angleterre ! »

De belles Eclipse… à la française

Le Grand Prix de Saint-Cloud a été fluide, grâce au rythme. Quelle différence avec les Eclipse Stakes ! Les quatre premiers se tiennent de près et il y a eu un malheureux… En cause : le manque de rythme : « Les Eclipse regroupaient un plateau de folie, avec des chevaux de top niveau. Après le Jockey Club, Vadeni était selon moi le meilleur gagnant du classique de ces dix dernières années. La course a été assez "bizarre" pour une compétition britannique : malgré un terrain good to firm, cela n’a pas été très vite. Christophe Soumillon a parfaitement jugé la situation : il s’est tout de suite placé dans le sillage de Native Trail (Oasis Dream), estimant certainement qu’il pouvait se faire emmener le plus loin possible par ce top miler mais que, pour finir, il n’était pas certain qu’il tienne. Prendre l’option de l’extérieur dans la ligne droite a été la bonne : dans une course qui n’a pas eu beaucoup de rythme, il y a eu quelques bousculades et Mishriff s’est retrouvé piégé… Vadeni a fait quelque chose de rare pour un poulain français, face à des éléments durs et expérimentés. Le temps de la course est honnête sans plus… Et les fractions d’accélération ne sont pas du tout comparables aux nôtres : j’ai beaucoup entendu dire que Sandown était semblable à Chantilly, car la ligne droite se termine en montée. Mais attention : le dénivelé est de 12m à Sandown, contre un peu moins de 6 à Chantilly ! »

Les 2.400m, c’est (toujours) non !

Après le Qatar Prix du Jockey Club, Bruno Barbereau estimait que Vadeni ne serait pas un poulain de 2.400m et il n’a pas changé d’avis : « Vadeni a beaucoup de vitesse et il a besoin de rythme : on a vu samedi que son jockey avait un peu de mal à le canaliser en début de parcours car cela n’avançait pas. Il fait les 2.000m mais je me demande finalement s’il n’est pas plus proche d’un miler. Il est performant en terrain assoupli, comme à Chantilly, ou en good to firm comme à Sandown. Il est en tout cas un excellent gagnant des Eclipse et il faut féliciter son entourage d’avoir fait le choix de l’Angleterre et de Sandown. Vadeni répète ce que l’on attendait de lui et a désormais un vrai parcours : il aurait pu courir le Guillaume d’Ornano, mais un gagnant de Gr1 doit courir d’autres Grs1 et affronter les meilleurs, comme l’a dit la princesse Zahra Aga Khan au Racing Post. »

Plutôt Bagatelle que Saint-Patrick

Samedi, Chantilly accueillait sa semi-nocturne "Oh ! Courses" avec deux Listeds : les Tattersalls Prix de Bagatelle et de Saint-Patrick, toutes deux sur 1.600m et ouvertes aux 3ans. Les pouliches ayant le Bagatelle et les poulains le Saint-Patrick. By All Means (Kodiac), entraînée par Mario Baratti, s’est imposée de deux longueurs chez les femelles, et Facteur Cheval ** (Ribchester) de deux longueurs chez les mâles. Bruno Barbereau donne l’avantage à la pouliche : « Elle fait un vrai truc et, sur ce qu’elle a réalisé samedi, elle aurait tout simplement gagné le Prix de Sandringham (Gr2). La course n’a pas été vite et elle s’impose en 98’’37, passant les 400 derniers mètres en 22’’25 et les 400 aux 200 en 10’’95 : il y a un vrai rehaussement de vitesse qui est logique, étant donné le rythme de course. C’est très bien pour son entraîneur Mario Baratti. J’ai Facteur Cheval en dessous de la pouliche en termes de rating, mais le Saint-Patrick a été encore plus lent que le Bagatelle (1,4 seconde plus lent). C’est toutefois un très bon poulain et, lors de ses débuts à Saint-Cloud, il avait déjà réalisé des fractions peu communes. »