Trop d’étalons "vites et précoces" au haras en Europe ? : Par Hubert de Rochambeau

International / 14.10.2022

Trop d’étalons "vites et précoces" au haras en Europe ? : Par Hubert de Rochambeau

Trop d’étalons "vites et précoces" au haras en Europe ?

Par Hubert de Rochambeau

« Dans le TDN du 1er octobre, la chronique hebdomadaire de Chris McGrath est très critique : "The stock that nowdays dominates commercial breeding in Europe with a disastrous conflation of speed and precocity (…) Cheap speed and elite stamina" Chris McGrath pense donc qu’il y a en Europe trop d’étalons "vites et précoces" avec des prix de saillies faibles…

Les prix de saillies

Nous avons étudié la carrière sur les hippodromes de 210 étalons entrés au haras en Europe entre 2015 et 2022. Dans la base de données du Racing Post, nous avons listé les prix de saillies lors de l’entrée au haras : 56 % ont un tarif inférieur à 10.000 € ; 23 % entre 10.000 et 19.000 € ; 21 % supérieur ou égal à 20.000 €.

Leurs ratings

Nous avons ensuite considéré les performances significatives de chaque étalon. Pour un sujet qui a couru N courses, il s’agit des N/2 dans lesquelles il a obtenu les meilleurs ratings. Par exemple, pour celui qui a couru onze fois, nous prendrons ses six meilleures sorties. Nous en dérivons trois critères.

Tous d’abord, le meilleur rating : pour 31 % des étalons, il est inférieur à 115 ; il est compris entre 115 et 119 pour 25 % d’entre eux et entre 120 et 124 pour 30 % d’entre eux. Quatorze pour cent des étalons ont un meilleur rating supérieur à 124.

La précocité

Le deuxième critère est la précocité. Il s’agit de la date de la première performance significative. Treize pour cent des étalons l’ont réalisée durant le premier semestre de l’année de 2ans ; ce sont les plus précoces avec par exemple des performances à Royal Ascot. Trente-sept pour cent des étalons ont atteint ce niveau durant le second semestre de leur année de 2ans. Trente-quatre pour cent ont réalisé cette première performance significative lors du premier semestre de leur année de 3ans. Les 16 % restants l’ont fait plus tard ; ce sont les tardifs.

La distance

Le troisième critère est la distance caractéristique de chaque étalon. Il s’agit de la distance la plus fréquente parmi les N/2 performances significatives. Trente et un pour cent des étalons sont des sprinters avec une distance caractéristique comprise entre 1.000 et 1.200m. Quarante pour cent sont des milers (1.400 à 1.800m). Quatorze pour cent sont des intermédiaires (2.000 à 2.100m). Il n’y en a que 15 % avec une distance caractéristique supérieure ou égale à 2.400m.

Chris McGrath a-t-il raison ?

La première partie de l’opinion de Chris McGrath est donc vérifiée : 71 % des étalons européens sont des sprinters ou des milers ; il n’y a que 15 % de chevaux de tenue. Parmi ceux-ci, seuls 3 % sont des stayers.

La seconde affirmation de Chris McGrath, par contre, ne l’est pas. Les sprinters et les milers ne sont pas meilleur marché. La répartition des prix de saillies ne diffère pas entre les quatre groupes.

Nous observons par ailleurs une forte liaison entre vitesse et précocité. Soixante-quatorze pour cent des sprinters ont réalisé leur première performance significative à 2ans ; ils ne sont que 51 % chez les milers, 30 % chez les intermédiaires et 16 % chez les chevaux de tenue.

Une dernière observation conforte les remarques de Chris McGrath : on fait rentrer au haras en Europe des sprinters et des milers avec des ratings plus faibles. Quarante-cinq pour cent des milers ont un meilleur rating inférieur à 115 ; c’est aussi le cas de 33 % des sprinters. Pour les intermédiaires, ce pourcentage est de 17 % et il descend à 3 % pour les sujets de distance. Il faut compléter cette description avec le pourcentage d’étalons ayant un rating supérieur à 124 : il est maximum chez les intermédiaires avec une valeur de 33 % ! Il est de 13 % pour les milers et les sujets de tenue, mais de 6 % pour les sprinters.

En conclusion, il y a trop d’étalons sprinters et milers avec des performances médiocres au haras en Europe. Les observations de Chris McGrath sont donc pertinentes. D’autres aspects de sa chronique mériteraient d’être discutés. »