Pierre Préaud : « Les préfectures doivent comprendre l’enjeu de l’arrosage pour les hippodromes »

Autres informations / 31.03.2023

Pierre Préaud : « Les préfectures doivent comprendre l’enjeu de l’arrosage pour les hippodromes »

Pierre Préaud : « Les préfectures doivent comprendre l’enjeu de l’arrosage pour les hippodromes »

Photo 1 sans légende (Scoopdyga)

Durant des décennies, notre société a vécu dans un contexte d’abondance de la ressource en eau. Ce temps est désormais révolu. Le "plan eau" présenté jeudi par le gouvernement en atteste. La filière hippique lance la charte nationale des hippodromes pour la préservation de la ressource en eau. Pierre Préaud, secrétaire général de la FNCH, détaille cette avancée importante.

Hors d’Europe, pour certains territoires, la bataille de l’eau fait partie du quotidien depuis des décennies. Chez nous, c’est une question plus récente, mais aussi très idéologique comme en témoignent les affrontements entre activistes, agriculteurs et forces de l’ordre à "Sainte-Soline". C’est dans ce contexte que le président de la République a dévoilé une longue série de mesures alors qu’une nouvelle sécheresse se profile pour les mois à venir en France. Les courses hippiques, quelle que soit la surface sur laquelle elles se déroulent – gazon, dirt, sable fibré… – ont besoin d’eau en quantité importante.

Désormais, la question que tout le monde se pose dans notre microcosme est donc la suivante : les restrictions en période de stress hydrique vont-elles perturber, voire compromettre, les courses hippiques ? Il est encore difficile de répondre avec certitude. Cela étant dit, pour pouvoir continuer à courir toute l’année (et échapper aux interdictions d’arrosages), il va nécessairement falloir améliorer notre gestion de la ressource en eau, mais aussi faire connaître auprès des pouvoirs publics les efforts que la filière hippique entreprend.

C’est tout le sens du lancement de cette charte nationale, élaborée en partenariat avec le label EquuRES "environnement et bien-être équin". Durant la sécheresse de l’été 2022, des actions de sabotages de parcours de golf ont été menées un peu partout en France. Pour l’instant, les hippodromes n’ont pas connu ce type d’attaques.

hto 2 (vignette) (Scoopdyga)

Pierre Préaud, secrétaire général de la FNCH, nous a expliqué : « En 2022, il y a eu des questionnements de riverains d’hippodromes qui s’étonnaient de l’arrosage. Le dialogue a permis de faire passer un message de pédagogie. Nous travaillons avec le gouvernement depuis plusieurs semaines et nous savions qu’un "plan eau" allait être publié à la fin du mois de mars, sans connaître la date précise. Il a été dévoilé jeudi et nous avons donc publié dans la foulée notre charte. Elle a été préparée avec le gouvernement au préalable. Au trot comme au galop, il faut beaucoup arroser les pistes. Mieux gérer la ressource en eau, cela fait partie de la responsabilité sociale et environnementale de la filière. Tout comme le bien-être animal, la transparence financière, le bénévolat et tous les autres aspects sociaux... L’actualité fait que parmi ces sujets, celui de l’eau devient crucial. »

Faire comprendre à la puissance publique nos spécificités

« Avec cette charte, nous voulons sensibiliser les présidents d’hippodromes et leurs équipes, mais aussi le public qui fréquente ces sites et les socioprofessionnels. Tout le monde doit s’engager à utiliser moins d’eau. Et à mieux l’utiliser aussi. Il faut montrer au gouvernement que nous sommes proactifs et que nous nous saisissons du problème. Dans un bassin donné, il peut y avoir nécessité pour le préfet de prendre des mesures de restrictions ou d’interdictions… Mais à chaque fois, l’application de ces mesures ne doit être faite qu’après avoir bien compris l’usage que nous en faisons sur les hippodromes et centres d’entraînement, et les enjeux que cela implique. Une charte est nécessaire pour fixer des objectifs précis, mais aussi pour que les autorités, qui seront appelées à faire des arbitrages, comprennent ce qui caractérise un hippodrome par rapport à un autre utilisateur. C’est donc un outil de pédagogie et de discussion. Nous serons bien sûr concernés par les éventuelles restrictions. Mais le but est de montrer que nous sommes dans l’anticipation et la prévention. Nous sommes acteurs et pas simplement dans la réclamation de dérogations. Quand d’éventuelles discussions sur l’interdiction de l’arrosage interviendront, avec le risque d’annuler les courses, il faut que le préfet agisse en bonne connaissance de cause. Jusqu’à maintenant, dans l’urgence, les préfectures prenaient des décisions sans avoir toujours les connaissances pour bien comprendre l’arrosage sur les hippodromes. Nous sommes une filière d’élevage, avec un objectif de sélection. Or le support de la sélection, c’est une piste dont la souplesse est maîtrisée. Près d’une quarantaine d’hippodromes sont labélisés EquuRES "environnement et bien-être équin" ce qui implique de bonnes pratiques en matière d’eau. Une vingtaine sont en cours de labélisation. Le but est qu’ils le soient tous fin 2024. Depuis un an, le processus s’accélère. »

Des pistes pour l’avenir

Pour l’instant, il n’est pas encore possible d’utiliser les eaux usées pour arroser les hippodromes : « Mais le gouvernement va rapidement faire évoluer la législation et faciliter le recours aux eaux issues de stations d’épuration. Cela étant dit, nous avions déjà anticipé. Au Lion-d’Angers et à Cagnes-sur-Mer, cette possibilité a été déjà été évoquée. Au-delà de la charte, nous allons lister les bonnes pratiques et procéder à des partages d’expérience, tout ce qui peut viser à mieux et moins utiliser l’eau, à récupérer les eaux pluviales et de drainage est intéressant. Nous allons aussi étudier les équipements d’arrosages. »