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Élevage / 17.04.2023
La France et les îles, à chacun sa méthode
Dans les îles Britanniques, un étalon qui n’arrive pas à sortir une vingtaine de gagnants avec sa première génération est déjà prêt à être envoyé aux oubliettes, sauf s’il a derrière lui une carrière de haut niveau. Heureusement, la France est moins hâtive dans le jugement d’un jeune reproducteur…
Franco Raimondi
fr@jourdegalop.com
Il faut faire des gagnants, et cela le plus tôt possible. Pour y arriver, des étalons ont des books à trois chiffres de juments depuis leurs débuts, avec parfois une baisse lors de leur deuxième saison. Le nombre est essentiel : sept des dix derniers Champions first crop sires ont eu plus de 100 produits lors de leur première année, puis ont vu leur carnet de bal se réduire l’année suivante. Il ne faut pas aller bien loin pour trouver des exemples du phénomène. Les deux plus récents Champions first crop sires sont Sioux Nation (Scat Daddy) et Cotai Glory (Exceed and Excel). En 2022, Sioux Nation a donné 44 gagnants en Europe sur 158 produits de 2ans. En 2023, il peut compter sur 91 juniors. Cotai Glory a donné 35 gagnants sur 117 produits de 2ans en 2021 et, en 2022, il comptait sur 78 juniors.
Le cas d’école est celui de Mehmas (Acclamation). En 2020, il avait 145 chevaux de 2ans (dont 55 gagnants en Europe). En 2021, ce nombre est passé à 115 et, l’an dernier, il en avait 70. Il est tombé au 33e rang du classement par gagnants des pères de 2ans l’an passé, tout en produisant deux lauréats de Groupe et six black type.
Neuf champions sur dix ont démarré à moins de 10.000 €
Un seul étalon stationné en France a décroché le titre de champion first crop sire dans l’Hexagone avec une première génération à trois chiffres. C’était Rajsaman (Linamix). En 2016, il avait 104 juniors dont 50 ont couru et 12 ont gagné en France. Parmi eux, le futur double lauréat classique Brametot (K) au niveau black type. Il était proposé à 4.000 € lors de sa première saison.
Les dix derniers étalons tête de liste avec leur première production ont officié à moins de 10.000 €, sauf Saxon Warrior (Deep Impact) l’an passé, qui a devancé Seahenge (Scat Daddy), lequel avait 71 juniors conçus à 5.000 €. Saxon Warrior l’a emporté d’un nez : avec un gagnant de plus, un certain Victoria Road, entraîné en Irlande. Les éleveurs et propriétaires français ont fait tout de même confiance à l’étalon Coolmore qui a donné sept gagnants entraînés en France sur 20 chevaux de 2ans basés dans le pays.
Les Trois Mousquetaires et leurs débuts
Nous vous avions parlé dans la partie 1 de ce magazine de nos trois mousquetaires français : Le Havre (Noverre), Siyouni (Pivotal) et Wootton Bassett (Iffraaj). Tous ont remporté le titre de French champion first crop sire.
Le Havre a été le champion en 2013, avec le grand soutien de Gérard Augustin-Normand qui avait lui offert beaucoup de juments. Il a eu 89 juniors au tarif de 5.000 €, dont 10 gagnants et une lauréate black type. Non, il ne s’agit pas de la double gagnante classique Avenir Certain (K) mais de La Hoguette, qui avait remporté le Prix Herod (L).
Siyouni a donné 11 gagnants de 2ans en 2014, avec 78 produits conçus à 7.000 € et la perle Ervedya (K).
Wootton Bassett a eu 22 juniors en 2015. Il a remporté sa couronne avec 5 gagnants, dont le champion Almanzor. Le record de gagnants en France (15) dans les dix dernières années appartient ex-aequo à Dabirsim (Hat Trick), stationné en Allemagne lors de ses deux premières saisons de monte. Mais il avait bénéficié d’un fort soutien français et avait ainsi 101 juniors. Le record de Dabirsim a été égalisé par Goken (Kendargent) qui a, quant à lui, réussi ce score avec une base de 59 sujets.
Les Champion first crop sires en France
Année |
Étalon |
Tarif (€) |
Produits |
Partants |
Gagnants |
BT |
Gains (€) |
2013 |
Le Havre |
5.000 |
89 |
31 |
10 |
1 |
282.250 |
2014 |
Siyouni |
7.000 |
78 |
33 |
11 |
4 |
625.985 |
2015 |
Wootton Bassett |
6.000 |
22 |
9 |
5 |
1 |
181.150 |
2016 |
Rajsaman |
4.000 |
104 |
50 |
12 |
2 |
354.140 |
2017 |
Dabirsim |
9.000 |
101 |
34 |
15 |
4 |
462.225 |
2018 |
Anodin |
7.500 |
87 |
40 |
13 |
3 |
420.830 |
2019 |
Sidestep |
4.000 |
58 |
19 |
7 |
3 |
205.735 |
2020 |
Goken |
5.000 |
59 |
33 |
15 |
3 |
483.460 |
2021 |
Al Wukair |
8.000 |
64 |
32 |
11 |
0 |
249.460 |
2022 |
Saxon Warrior |
30.000 |
118 |
16 |
8 |
3 |
418.035 |
City Light et Inns of Court, un match particulier
L’étalon le plus populaire dans les écuries de France est City Light (Siyouni), avec 35 chevaux de 2ans sur 88 déjà déclarés à l’entraînement. Il a fait ses débuts au tarif de 7.000 € et il a eu 47 yearlings vendus au prix moyen de 21.598 €. Dans un hypothétique betting pour le titre de French champion first crop sire, il est le grand favori mais c’est un autre argument qui nous a touchés.
City Light et Inns of Court (Invincible Spirit) sont nés la même année et ils ont un profil similaire. Ils se sont aussi rencontrés deux fois. L’ex-pensionnaire de Stéphane Wattel a gagné deux Grs3 et il est passé deux fois très proche de son Gr1 dans les Diamond Jubilee à Royal Ascot, puis dans le Prix de la Forêt. L’ex Godolphin compte un succès de Gr2 et trois Gr3 et lui aussi a été battu de très peu à deux reprises dans les Grs1. Côté valeur, Inns of Court a atteint un 54 (119 de rating officiel) et City Light 53 (117 de rating officiel). Inns of Court a trouvé sa place à Tally-Ho Stud et il a une première génération composée de 168 2ans – soit presque le double de son ancien rival –, dont 121 ont trouvé preneurs aux ventes au prix moyen de 33.766 €. Les produits de Inns of Court à l’entraînement en France ne sont qu’au nombre de six.
Blue Point et Ten Sovereigns dans le créneau vitesse
Pour un étalon basé en France, il est presque impossible d’avoir une première génération de 100 sujets ou plus. En Europe, cette année, on trouve dix reproducteurs avec cette puissance de feu si importante. Inns of Court est impossible à battre en nombre, mais Blue Point (Shamardal) compte tout de même sur 161 juniors, dont 77 achetés aux ventes au prix moyen de 112.922 €. Douze parmi eux sont en France. André Fabre a eu droit à trois élevés Godolphin alors que Jean-Claude Rouget a un représentant de Son Altesse l’Aga Khan, une Shadwell et un poulain acheté 100.000 € à la vente d’août pour Vivaldi Trading. Sur les huit yearlings par Blue Point passés à la vente d’août, quatre sont partis à l’étranger.
Le sprinter Ten Sovereigns (No Nay Never) a 149 chevaux de 2ans et ses yearlings ont affiché un prix moyen de 70.747 € pour 87 vendus. Douze sont à l’entraînement en France, dont trois pour leurs éleveurs.
Waldgeist, le charme d’un gagnant d’Arc
L’étalon qui a fait ses débuts au haras à l’étranger le plus représenté en France avec ses premiers 2ans est… Waldgeist (Galileo) ! Il a 13 juniors chez sept entraîneurs différents et c’est Nicolas Clément qui en a le plus (quatre). Le charme d’un gagnant d’Arc est toujours important en France…
Too Darn Hot (Dubawi) est le plus cher parmi les étalons ayant fait leurs débuts en 2020. Il a 120 juniors et 9 sont à l’entraînement en France. André Fabre entraîne trois pouliches et un poulain, tous pour Godolphin, et il faut noter que huit 2ans de Too Darn Hot sur neuf en France sont élevés par leur propriétaire. Calyx (Kingman) a eu son premier gagnant en France, la pouliche Classic Flower, et il est représenté par sept 2ans tout comme le Derby winner Masar (New Approach).
Les Français recherchent les étalons confirmés
Les étalons de première production ayant plus de cinq 2ans à l’entraînement en France sont quatorze. Ce n’est pas beaucoup et, parmi eux, cinq ont débuté dans l’Hexagone. Nous avons déjà parlé de City Light, suivi dans le classement par Fas (Fastnet Rock) avec 17 chevaux de 2ans, et Taj Mahal (Galileo) qui en a 13. Donjuan Triumphant (Dream Ahead) a déjà donné un gagnant, avec six 2ans à l’entraînement et 15 produits. Roman Candle (Le Havre) compte sur 38 produits, dont 5 ayant déjà un entraîneur.
C’est difficile pour les jeunes étalons en France, mais ce n’est un problème de xénophobie, bien au contraire. Les entraîneurs et propriétaires français cherchent du solide, des reproducteurs confirmés et ne tombent pas dans le piège des petites bombes du créneau "vitesse et précocité", qui font leurs débuts avec cent produits ou plus. Si un étalon possède du talent, il peut aussi arriver au sommet avec des books plus réduits. Les trois mousquetaires sont là pour le démontrer.
Les étalons de première production et leurs 2ans à l’entraînement (plus de cinq en France)
Père |
Tarif 2020 |
Produits |
En France |
Yearl. vendus |
Prix moyen |
|
City Light |
Siyouni |
7.000 |
88 |
35 |
47 |
21.598 |
Fas |
Fastnet Rock |
2.200 |
30 |
17 |
8 |
17.375 |
Taj Mahal |
Galileo |
4.000 |
49 |
13 |
12 |
10.458 |
Waldgeist |
Galileo |
17.500 |
79 |
13 |
52 |
64.615 |
Ten Sovereigns |
No Nay Never |
25.000 |
149 |
12 |
87 |
70.747 |
Blue Point |
Shamardal |
45.000 |
161 |
12 |
77 |
112.922 |
Too Darn Hot |
Dubawi |
50.000 £ |
120 |
9 |
48 |
97.833 |
Calyx |
Kingman |
22.500 |
103 |
7 |
64 |
55.822 |
Masar |
New Approach |
15.000 £ |
104 |
7 |
58 |
57.844 |
Inns of Court |
Invincible Spirit |
7.500 |
168 |
6 |
121 |
33.766 |
Donjuan Triumphant |
Dream Ahead |
4.000 |
15 |
6 |
3 |
6.500 |
Le Brivido |
Siyouni |
7.000 £ |
39 |
6 |
26 |
24.213 |
Roman Candle |
Le Havre |
2.800 |
38 |
5 |
6 |
10.667 |
Magna Grecia |
Invincible Spirit |
22.500 |
109 |
5 |
69 |
61.328 |
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