À la rencontre du vendeur de vaches devenu entraîneur à succès

International / 18.05.2023

À la rencontre du vendeur de vaches devenu entraîneur à succès

C’est une histoire assez incroyable. Celle d’un vendeur de vaches devenu entraîneur à succès ! Samedi, John Hanlon présentera Hewick dans la Grande Course de Haies d’Auteuil.

Adrien Cugnasse

ac@jourdegalop.com

John Hanlon a obtenu le surnom de Shark – le requin en français – lorsqu’il était joueur de hurling, ce sport irlandais qui se pratique avec une crosse, et non sans une certaine agressivité ! Shark Hanlon, qui est taillé comme un pilier de rugby, n’avait peur de personne. Et tout le monde le craignait ! Les chevaux et les courses, c’est une seconde vie pour cet Irlandais qui n’est pas issu du sérail : « J’ai quitté l’école à 13 ans pour vendre et acheter du bétail. Quand j’étais jeune, je ne pensais qu’aux vaches et à faire la fête. Jamais je n’aurais imaginé avoir des chevaux. Et encore moins entraîner. Mais en 2001, la maladie de la fièvre aphteuse est arrivée. Je me suis retrouvé à faire le chauffeur poids lourds pour Georges Mullins. Pendant un an et demi, j’ai fait des rencontres incroyables [dont sa future épouse, Rachel, qui travaillait chez l’entraîneur Tony Mullins, ndlr]. Cela m’a permis de découvrir les courses. Et cela m’a poussé à changer de métier. J’ai transformé l’étable en écurie. » Shark Hanlon, avec son épouse, se lance alors dans l’aventure avec quelques chevaux qu’il entraîne sur les pistes pendant que les entraîneurs sont partis déjeuner : « Mon premier gagnant remonte à 2004 avec Wolseley Lady, dans un point-to-point. Elle a aussi gagné ma première course officielle en 2005 à Tramore. »

Hewick n’a coûté que 800 €

Son meilleur cheval, Hewick (Virtual), a remporté les Grand National Hurdle Stakes (Gr1) aux États-Unis, mais aussi la Bet365 Gold Cup (Gr3), l’an dernier à Sandown. En 2023, Hewick a remporté l’Oaksey Chase (Gr2), toujours à Sandown. Ce n’est pas un champion mais c’est pourtant l’un des chevaux les plus célèbres d’Irlande et d’Angleterre. D’abord parce que c’est un petit modèle au pays des grands chevaux. Et lorsque son entraîneur, une véritable armoire à glace, se tient à côté de lui… L’image est saisissante ! Ensuite, parce qu’Hewick est entré dans un pub pour boire une pinte après sa victoire américaine et les réseaux sociaux ont complètement fondu les plombs. Enfin, il a été acheté pour un prix de misère aux ventes, lui qui tique à l’appui : « Hewick tique même au pré. Et je n’ai jamais essayé de l’empêcher de faire cela. Lors des ventes, j’étais venu acheter un autre cheval. Le marché était en berne. Et le lot que je voulais n’était finalement pas là. Je me suis donc reporté sur lui. Il n’a coûté que 800 €. Je l’ai acheté sur son physique, sans regarder sa page de catalogue. Mon grand-père était marchand de bestiaux. Mon père lui aussi fait du commerce de vaches. J’espère avoir hérité de leur coup d’œil ! Le principal, pour les chevaux, et c’est la différence avec les bovins, c’est qu’ils doivent bien marcher. Un cheval qui ne marche pas ne peut pas galoper. »

Un entraîneur qui vise la belle saison

Même si Hewick a couru à Cheltenham, où il est tombé, son mentor vise avant tout le programme estival, alors que les grandes maisons veulent surtout gagner l’hiver, lors des grands festivals. Shark Hanlon, qui n’a pas de grandes casaques dans sa clientèle, essaye donc d’aller contre le marché : « Mon opinion, c’est que les grands chevaux en imposent, ils flattent l’œil. Mais beaucoup de courses se disputent en bon terrain désormais. Et l’hiver, je n’ai pas les moyens d’avoir les grands modèles qu’il faut pour battre les Mullins. Alors je cherche d’autres solutions, d’autre courses. Je vise l’été avec mon effectif. Et l’hiver, je cours des chevaux de point-to-point pour les vendre : c'est le commerce qui fait tourner la boutique, pas l’entraînement, où je facture à prix coûtant. Si Hewick n’avait pas glissé lors d’un point-to-point, je l’aurais d’ailleurs certainement vendu. Je n’ai pas peur de le courir en bon terrain, car il apprécie ces conditions de course. On le sait, il est plus facile de garder un petit cheval sain. Hewick peut courir plus souvent sur une bonne piste qu’un grand carcan et sans connaître le moindre problème. Aucun entraîneur ne veut abîmer ses pensionnaires. » Grand fêtard à la bonne humeur communicative, Shark Hanlon a un vrai talent médiatique et il adore jouer le rôle de l’Irlandais rural, quitte à forcer le trait. C’est aussi un créateur de syndicat de toutes sortes. Dont le Horse That Bought The Dog Syndicate, où des passionnés de galop s’associent pour acheter et faire courir des lévriers : « Pour moi, les syndicats, c’est essentiel. Il faut absolument pousser les gens à aller aux courses. Or, un syndicat, ce sont des dizaines de gens en plus aux courses à chaque sortie. Les grands propriétaires, c’est formidable. Mais ce ne sont pas eux qui font vibrer l’hippodrome. »

Un grand voyageur

« Fin 2022, Hewick est revenu des États-Unis en pesant plus lourd qu’à l’aller. C’est dire s’il n’a pas pris dur ! Cela fait longtemps que j’avais envie d’aller courir là-bas.  Et l’an dernier, nous avions la chance d’avoir enfin le cheval pour y aller. Hewick, c’est une belle histoire… et c’est ce que les gens veulent. » À Auteuil, il sera monté par Rachael Blackmore : « Il a une tenue sans fin. La course lui conviendra. Tout comme les haies françaises. L’allocation est de 390.000 €. Voilà pourquoi nous faisons le voyage ! Le Nakayama Grand Jump pourrait être à l'ordre du jour l'année prochaine. Parfois, vous ne pouvez pas voyager car certains chevaux n'aiment pas ça, mais lui, il adore. Vous pouvez le mettre dans votre valise et l'emmener avec vous ! »

 

 

 

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