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dimanche 18 mai 2025
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Le classicisme pour tous

Le classicisme pour tous

Imaginez… Vous souhaitez lancer une écurie de groupe, axée sur des éléments au profil dit « classique » … et en ne déboursant pas plus de 70.000 £ ! Il y a des chances que l’on vous prenne pour un fou. C’est pourtant le pari réussi par Quantum Leap Racing.

Adrien Cugnasse

ac@jourdegalop.com

Au sujet du syndicat propriétaire de Tamfana, son cofondateur Eamonn O’Connor nous a confié : « Le syndicat a vu le jour en 2017. Jeremy Brummitt achète pour nous cinq ou six yearlings par an – dans une fourchette comprise entre 20.000 £ et 70.000 £ – et en tant que racing manager, il prend toutes les décisions concernant leur programme de course. Nous sommes un petit syndicat [à l’échelle britannique, ndlr] et dès le départ, nous avons connu une certaine réussite. Notre premier cheval, Flying Thunder (Archipenko), déniché pour 25.000 £, s’est classé quatrième des Horris Hill Stakes (Gr3). Nous l’avions bien vendu à Hongkong où il a remporté un Groupe. Quantum Leap Racing regroupe une quinzaine de membres et leur conjoint(e)s, sans aucune publicité, simplement grâce au bouche à oreille. Notre argument, c’est de leur proposer de diluer le risque, et d’augmenter les chances de toucher un bon, en prenant une petite partie de tous les chevaux d’une génération : 5 % de cinq yearlings, c’est cinq fois plus de chance de s’amuser que 25 % d’un seul cheval ! »

Eamonn O’Connor poursuit : « Contrairement à beaucoup de syndicats, nous évitons d’acheter des sprinters et de purs précoces. Ces 2ans sont acquis pour Royal Ascot et la majorité a déjà perdu beaucoup de sa valeur en l’espace d’une semaine. Il y a beaucoup d’appelés, peu d’élus, et une fenêtre de tir très réduite pour faire carrière. Car après la fin juin, que faites-vous de ces « hyper précoces » ? Les chevaux de tenue ont besoin de plus de temps et ils ne courent souvent qu’une fois ou deux, à l’automne de leur année de 2ans. Mais ce surcoût est compensé par le fait qu’ils sont régulièrement moins chers sur un ring. Savoir attendre, cela fait partie des choses que nous essayons d’inculquer à nos actionnaires. La complexité, l’apprentissage, les vertus de la patience… c’est aussi tout cela le plaisir des courses. La syndication représente une grande opportunité pour la filière de tenue en Europe. On voit clairement ce que cela apporte au Japon et en Australie [il est plus facile d’être patients en divisant les coûts, ndlr]. C’est le cheval de bataille de Jeremy Brummitt qui est par ailleurs le conseiller de Bjorn Nielsen [éleveur et propriétaire du champion stayer Stradivarius, ndlr]. »

La qualité du sang allemand

Jeremy Brummitt a acheté beaucoup de chevaux de tenue marquants, de Masked Marvel (Montjeu) à Russian Camelot (Camelot). Dans le cas de Tamfana, il a fait un « super coup » car la pouliche n’a coûté que 20.000 € chez BBAG où elle était présentée par le Gestüt Etzean, un des meilleurs haras allemands. Son père, Soldier Hollow (In the Wings), sera doublement représenté au départ. Le courtier et manager nous a confié : « Pourquoi aussi peu de gens en dehors de l’Allemagne se sont-ils intéressés à cet étalon ? Je n’en ai aucune idée. C’est un sire hyper régulier qui a transmis ses qualités de courage et de solidité. Chez nous [en Angleterre, ndlr], les origines allemandes sont regardées avec un certain dédain. Ces chevaux sont considérés comme « tout juste bons » pour l’obstacle. Pourtant, ce pays avec peu de juments ne cesse de sortir des éléments pour les grandes courses internationales et beaucoup ne sont pas du tout « terrain souple dépendant ». Le fait que l’élevage allemand – dans une certaine mesure l’élevage français également – soit resté fidèle aux courses classiques permet de comprendre pourquoi vous parvenez toujours à sortir des chevaux de niveau international, malgré une jumenterie plus faible, beaucoup moins de naissances et moins d’investissement. »

Pour en revenir à Tamfana, Jeremy Brummitt détaille : « La pouliche a coûté peu cher car elle présentait des cicatrices consécutives à un accident survenu à l’élevage lorsqu’elle était foal. Et son pedigree maternel était vierge de black type sur deux générations. J’ai choisi un individu plutôt qu’une page. En matière de pedigree, il faut avoir les idées larges. Il se trouve que dimanche, elle sera certainement la plus belle pouliche au départ. Elle a été capable de finir très vite dans les 1.000 Guinées en bon terrain. Les chevaux sont tous des individualités. Au cours de notre époque, la tentation est grande de leur « coller une étiquette » sur le front, comme un produit standardisé. » Toujours pour battre en brèche les préjugés, l’allemande de naissance Tamfana a été capable de gagner un Groupe sur 1.400m : « Il faut voir l’individu au-delà de son pedigree. Les très bons chevaux peuvent être performants sur une large palette de distance… car ils sont supérieurs aux autres. Les meilleurs chevaux sont ceux de distance classique. »

L’entente parfaite

Le trio O’Connor, Menuisier et Brummitt fonctionne à merveille. Et les résultats sont au rendez-vous : « C’est lié au fait que nous avons tous la même vision des courses et des chevaux. David a les pieds sur terre. C’est une personne qui connaît son métier et avec laquelle il est facile de travailler. Il est tellement fort que quand les chevaux ne sont pas performants, c’est sûrement parce que je n’ai pas acheté les bons ! Il y a quelques années, ces chevaux de distances intermédiaires étaient vraiment le bon créneau pour acheter de la qualité à un prix raisonnable. Le problème, c’est que l’offre est réduite car les éleveurs commerciaux produisent pour la plupart des chevaux de vitesse et précocité. Or, de plus en plus d’acheteurs se rendent compte que c’est une voie sans issue et que les chevaux de distance intermédiaire représentent un bon créneau. Qui dit offre réduite et demande plus forte… dit yearlings de tenue moins bon marché que dans un passé récent. Même les gens des breeze up s’y essayent car un bon cheval de tenue a une plus grande valeur commerciale. Un sujet de niveau Listed sur 2.000m/2.400m vaut au minimum deux fois plus cher qu’un sprinter avec le même rating. Un animal qui tient 2.000m avec un rating de 80 a une valeur commerciale. Le même animal sur le sprint n’intéresse personne. »

Et si c’était le destin…

Installé depuis une dizaine d’années à Coombelands Racing Stables (West Sussex), une écurie qui a notamment vu passer Dancing Brave, dans une région dont il est tombé amoureux, David Menuisier va tenter de poursuivre une année d’ores et déjà exceptionnelle, avec une pouliche qu’il regarde avec les yeux de l’amour… et ce dès le départ, sans même l’avoir vue.

Par Anne-Louise Échevin

ale@jourdegalop.com

La meilleure, tout simplement

« J’ai dit plus tôt dans l’année que Tamfana était la meilleure que j’aie entraînée… Et, parfois, j’ai raison ! C’est bien le cas, elle est exceptionnelle. » David Menuisier ne mâche pas ses mots. La pouliche a laissé une impression assez exceptionnelle dans les 1.000 Guinées, traçant les derniers 400m en 24’’01 – la plus rapide sur la section, la gagnante Elmaka étant en 24’’15. La quatrième place dans le classique de Newmarket est cruelle, tant la pouliche a fait un truc sortant de l’ordinaire, et David Menuisier a eu – et a toujours ! – un peu de mal à s’en remettre : « Je l’ai toujours estimée et j’ai toujours pensé qu’elle allait se développer encore plus avec l’allongement des distances. Les 1.000 Guinées de Newmarket étaient à la fois un objectif en lui-même et une étape vers le Prix de Diane. Nous y sommes allés pour gagner, mais vraiment, elle m’a étonné ce jour-là. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle montre autant de vitesse et de facilité sur 1.600m et une piste rapide. La façon dont elle a voyagé dans le parcours m’a surpris. Elle m’a toujours fait « bâiller » mais, ce jour-là, elle a été exceptionnelle. Il m’est toujours difficile de regarder cette course. Il y a eu beaucoup de critiques autour de la monte de Jamie Spencer, lesquelles sont injustifiées. L’idée était de la monter ainsi, en attendant, et toutes les étoiles ne se sont pas alignées. Quand vous faites ainsi, surtout sur la ligne droite de Newmarket, vous avez le risque d’avoir un mur de chevaux devant vous. C’est ce qu’il s’est passé : Jamie Spencer ne pouvait pas se laisser pousser des ailes pour passer au-dessus du mur. Donc, malgré sa quatrième place, il y a du bon à garder de cette course. D’ailleurs, je pense que je suis le seul à continuer d’être déçu ! Ses propriétaires sont désormais ravis de sa performance. »

Elle lui rappelle… Zarkava !

On sent, chez l’entraîneur, de la confiance. Il n’a aucun doute sur la tenue, la pouliche étant par Soldier Hollow, issue d’une souche qui a donné Timos et Sea Calisi. C’est surtout le comportement de Tamfana qui le séduit : « Dans un parcours, elle ne consomme pas. Il est évidemment tôt pour faire des comparaisons et il est certainement osé de ma part de dire cela, mais elle me fait penser à une pouliche comme Zarkava, c’est-à-dire capable d’attendre, de suivre avec facilité, et une fois décalée, de placer une accélération énorme. »

L’année classique

David Menuisier a entre 60 et 70 chevaux à l’entraînement. Un nombre solide, sans être comparable à certaines grandes écuries, de Newmarket notamment. En 2024, il réalise une sacrée performance dans les classiques. Il y a eu Tamfana quatrième à Newmarket après avoir vécu un cauchemar, mais il convient d’ajouter la victoire de Devil’s Point (New Bay) dans les 2.000 Guinées allemandes (Gr2) – le premier classique de l’entraîneur – ainsi que la troisième place de War Chimes (Summer Front) dans les Oaks d’Epsom (Gr1). Pourtant, pour lui, il n’y a pas photo : « Tamfana n’a pas travaillé avec War Chimes. Très honnêtement, les deux sont pour moi dans une ligue différente. Il y a un diesel et un « pétrole ». Attention, War Chimes est une très bonne pouliche, qui ne fait que progresser, et elle se révèle vraiment pleinement l’après-midi. Tamfana est différente, elle gagne ses galops en trois foulées. Si nous faisons un travail vraiment sérieux, je n’ai rien qui puisse aller avec elle le matin. Physiquement, elle est très puissante et ressemble plus à un poulain qu’à une pouliche. Et elle est facile en course. Il n’y a pas de tactique définie pour dimanche. Déjà, nous allons attendre de connaître notre numéro de corde ce jeudi. Ensuite, on a beau établir un plan A, un plan B et un plan C, on se retrouve souvent une fois en course à établir un plan D ! C’est pour cela que l’on s’attache les services de crack-jockeys. Oisin Murphy lui sera associé, il vient régulièrement se mettre en selle chez moi le matin et monte Tamfana depuis l’an dernier. S’il est disponible, ce qui est le cas pour le Diane, il est prioritaire pour monter la pouliche. Ce sera éventuellement à lui de sortir le lapin du chapeau, et non pas à moi dans les tribunes. »

Un coup de cœur sur le papier

Peut-être est-ce le destin, ou une intuition venue du ciel. David Menuisier écrit, avec Tamfana, une histoire qui est rapidement sortie de l’ordinaire. C’est celle d’un coup de foudre avant même de l’avoir vue : « J’achète beaucoup de mes propres chevaux, mais concernant Tamfana, je ne peux aucunement m’attribuer une once de gloire. Jeremy Brummit l’a achetée à BBAG pour 20.000 € et je n’ai pas pris part à cet achat. Cette année-là, Quantum a investi sur quatre ou cinq yearlings, dont Tamfana. J’ignore précisément combien de porteurs de part sont associés sur elle. C’est un modèle que l’on trouve peu en France mais je suis certain qu’ils accepteraient des Français ! J’avais déjà entraîné Ottilien pour eux. Les achats ont été réalisés et les pedigrees nous ont été envoyés. Et je ne sais pas pour quelle raison, quand j’ai vu son papier, quand j’ai vu Soldier Hollow, je l’ai voulue absolument. Peut-être étaient-ils tous très contents que je la prenne (rires) ! Elle avait été acquise pour une somme modeste et elle ne payait pas de mine. Et il s’est passé quelque chose. Elle m’a tout de suite ébloui. Dès les premières semaines, elle s’est développée à vue d’œil. Quand ses copropriétaires sont venus la voir, six semaines après son arrivée, elle n’était vraiment plus la même. » De plus en plus belle et, dimanche, peut-être encore plus !

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