LE TOUR DES HARAS – VENTE D’AOÛT
LA MÉTHODE BALLYLINCH
De Belardo à Place du Carrousel, Ballylinch Stud a présenté certains des chevaux les plus importants de son histoire sur le ring de Deauville. John O’Connor, le patron du grand haras irlandais, s’est confié à la veille de la grande vacation française.
Ballylinch fait le voyage avec des yearlings très bien nés mais le choix se fait aussi beaucoup sur leur capacité à être prêts tôt dans l’été et John O’Connor précise : « Nous venons avec ceux qui ont la maturité nécessaire pour l’exercice. Élevant en Irlande, nous essayons aussi de venir avec des sujets qui parlent à des acheteurs internationaux d’un certain niveau. L’idéal, c’est que l’étalon parle à une clientèle internationale. Car dans ce cas, les primes françaises sont moins décisives. Bien sûr, nous essayons d’avoir de beaux yearlings, athlétiques, mais pas trop lourds. » S’il devait lui-même choisir un yearling, John O’Connor ferait tout particulièrement attention à « sa locomotion, mais aussi à sa capacité athlétique. Comme tout le monde, je préfère qu’ils soient beaux avec de bons aplombs. Mais mon passé de vétérinaire me fait penser qu’on peut excuser certaines faiblesses chez un cheval qui marche bien. » L’Irlandais a connu son pays avant et après le boom économique. L’élevage irlandais s’est lui aussi révolutionné jusqu’à devenir un leader mondial : « La terre et le climat sont des atouts. Mais je crois qu’en Irlande, la fibre du commerce et la capacité de travail ont beaucoup joué. C’est un pays avec beaucoup d’hommes de cheval qui ont très tôt compris qu’il fallait avoir une vision internationale. Dès l’époque de Vincent O’Brien, ensuite avec Jim Bolger, Dermot Weld, et aujourd’hui avec Aidan O’Brien et ses fils, les entraîneurs irlandais ont vu le potentiel et la nécessité d’avoir des clients venus de l’extérieur. Beaucoup de business à succès dans les chevaux en Irlande ont été lancés à partir de peu de moyens par des jeunes gens très motivés. »
De bonnes juments de course de la lignée de Danehill
Ballylinch Stud est certainement le seul haras d’Europe à publier la liste de ses juments dans sa brochure d’étalons : c’est dire si la jumenterie du haras est importante et qualiteuse ! « Nous aimons jouer la carte de la transparence. C’est aussi pour cela que nous produisons un stud-book que nous diffusons. Tout cela permet aux gens de comprendre comment nous travaillons sur les familles et quelles juments nous envoyons à nos étalons. »
Le lot 40 est une fille de Pinatubo (Shamardal) et d’Abilene (Samum), troisième du Prix Solitude (L). Avec un autre fils de Shamardal, elle a donné Juan de Montalban (Lope de Vega), entre autres lauréat du Derby italien (Gr2). Samum (Monsun) n’est pas à la mode, mais John O’Connor fait preuve d’indulgence à ce sujet pour les juments ayant montré de la qualité en piste et issues d’une grande origine maternelle. Dans son cas, c’est la célèbre souche des «A» de l’élevage Wildenstein. Le 3ans de la jument Oxford Coma (Nathaniel) vient de faire grande impression à deux reprises, elle qui court pour une association entre Valmont et Ballylinch Stud. L’éleveur irlandais précise : « Très bon cheval de course, Samum était un fils de Monsun avec une mère assez exceptionnelle. Cela pousse à être ouvert d’esprit. C’est bon aussi d’avoir un peu d’outcross. Et Abilene semble bien croiser avec Shamardal. Sa 3ans Oxford Coma est tenue en haute estime. Il serait surprenant qu’elle ne devienne pas le deuxième black type de sa mère. Nous avons de gros espoirs pour la fin de saison. »
Le lot 46 est un peu dans le même cas : une très bonne jument de course par un père moyennement populaire, saillie par un bon étalon en la personne de Night of Thunder (Dubawi). La mère, Against Rules (Aussie Rules), a gagné 11 courses en France (!) dont les Prix Denisy, de la Porte de Madrid et Scaramouche (Ls). La famille est très belle, Against Rules étant la descendante de la célèbre Mill Princess (Mill Reef) : « Against Rules était une bonne jument de course. Très belle aussi. Les juments de la lignée mâle de Danehill (Danzig) nous ont très bien réussi au fil des années, en particulier en soutien à Lope de Vega. Aussie Rules, le père d’Against Rules, n’est pas le plus populaire des Danehill. Mais c’était un cheval très bien né. Son premier produit, Crown Board (Lope de Vega), est très estimé par Jane Chapple-Hyam et il doit être capable de gagner une grosse course un jour. La famille est superbe et j’aime beaucoup Night of Thunder. C’est un très bon étalon qui peut apporter de la vitesse. Le yearling est très réussi. »
Un croisement qui cartonne
Le lot 99 est une fille de Lope de Vega sur une fille de Sea the Stars (Cape Cross). Ce croisement a donné 16 gagnants sur 20 partants dont quatre black types ! La mère de Conte de Fée (Sea the Stars) a gagné le Prix Occitanie (L). La troisième mère, Petrushka (Unfuwain), était une véritable championne, lauréate des Oaks d’Irlande, des Yorkshire Oaks et du Prix de l’Opéra (Grs1) : « Ce yearling appartient à un client qui a acheté la mère yearling. Cette Lope de Vega est son premier produit. Elle est très athlétique, équilibrée, bonne marcheuse, bien dans le type des bonnes pouliches de l’étalon. Le croisement avec Sea the Stars est remarquable. » La deuxième mère est par Tiger Hill (Danehill), un étalon probablement sous-estimé mais qui a donné les mères de plusieurs bons chevaux (Akeed Mofeed, Almandin, In Swoop, Ito, Princess Zoe, Salomina…) : « C’est encore une fois le croisement Lope de Vega sur Danehill. En outre, cette famille a déjà bien fait avec le sang de Shamardal. »
Un croisement «maison»
Le lot 159 est l’archétype du croisement «made in Ballylinch», étant par l’élégant New Bay (Dubawi) sur une fille du puissant Lope de Vega : « La deuxième mère, Screen Star (Tobougg), a été acquise sur production, sa fille Lumière (Shamardal) ayant déjà remporté les Cheveley (Gr1). Sa 3ans, Rouge Sellier (Lope de Vega), est à l’entraînement chez Sir Mark Prescott. Elle a gagné par 15 longueurs récemment en Angleterre et devrait être revue au niveau black type. Je crois beaucoup au croisement de New Bay sur Lope de Vega. Ils sont très complémentaires. »
Des familles hyperdynamiques
Le lot 240 est une fille de Lope de Vega sur la bonne Normandel (Le Havre), gagnante des Park Express Stakes (Gr3) après son achat en France. Cette origine, passée par les mains de Gérard Augustin-Normand, est en pleine explosion, avec en particulier le très bon Pyledriver (Harbour Watch), gagnant des King George et de la Coronation Cup (Grs1) : « Au départ, c’est une très bonne famille Aga Khan qui ne cesse de sortir des chevaux. On a l’impression que cette souche est capable de réussir avec tous types d’étalons… Nous avons acquis Normandel suite à une victoire de Listed en France. Sa yearling a un physique exceptionnel. Elle sort vraiment du lot. Et elle sera un outcross une fois à l’élevage. »
Golden Horn (Cape Cross) n’a pas totalement répondu aux attentes au haras en plat. Mais son taux de black type par partant élevé, ainsi que son bon pedigree, laissent à penser que c’est un prospect intéressant pour faire un père de mère. Sa fille Sea the Gold (Golden Horn) a été croisée avec Lope de Vega pour donner le lot 297. C’est l’immense famille de Sacarina (Old Vic), l’un des plus beaux pedigrees allemands (Samum, Sea the Moon, Sosie…) : « La mère est une sœur du très bon étalon Sea the Moon. Nous l’avons achetée car elle a un pedigree de classe internationale. Lope de Vega va apporter un peu de vitesse. » Ce lot 297 présente le croisement (Lope de Vega sur Cape Cross) d’Almaqam, au départ du Prix Guillaume d’Ornano (Gr2), mais aussi du jeune champion Look de Vega (Lope de Vega), actuellement en tête de l’ante post betting pour l’édition 2024 du Qatar Prix de l’Arc de Triomphe (Gr1).
Un partenariat fructueux
Le lot 312 est une fille de Siyouni (Pivotal). Sa mère, Solage (Galileo), une descendante de Featherquest (Rainbow Quest), a été acquise à Deauville. Lauréate de Listed sur 2.400m à 3ans, en Irlande, elle a déjà donné Opera Mundi (Kingman), gagnante du Prix Zeddaan (L)… « Nous avons acheté Solage en partenariat avec l’écurie des Charmes. C’est l’une des grandes familles françaises. Avec cette yearling, on retrouve le croisement tout à fait exceptionnel de Siyouni sur une fille de Galileo. Elle est très athlétique. » L’association entre Ballylinch Stud et l’écurie des Charmes (Lucien Urano) est des plus fructueuses. Ensemble, ils ont élevé la très bonne Aunt Pearl (Lope de Vega), gagnante du Breeders’ Cup Juvenile Fillies Turf (Gr1). Son propre frère, le 2ans Matauri Bay (Lope De Vega), vient de faire sensation il y a quelques jours en débutant en Angleterre. Ballylinch a aussi fait grand bruit en achetant une partie du champion Look de Vega, copropriété de – et coélevé par – Lucien Urano : « J’ai visité le haras de trotteurs de Lucien Urano. C’est très intéressant. Cela me rappelle mes années de jeune vétérinaire en Normandie ! Il y a toujours quelque chose à apprendre. » Au sujet de Look de Vega, il poursuit : « Le poulain a déjà réalisé de grandes choses. L’Arc n’est pas une course facile. C’est toujours une grande compétition. Look de Vega est un très bon cheval, avec de la taille et de l’envergure. Bon marcheur aussi, athlétique. Son tempérament semble bon. Il respire la confiance en lui-même et j’aime bien voir cela chez un cheval. »
LES LOTS DE LA VENTE D’AOÛT
Lot | Sexe | Père | Mère |
0040 | F. | PINATUBO | ABILENE |
0046 | M. | NIGHT OF THUNDER | AGAINST RULES |
0099 | F. | LOPE DE VEGA | CONTE DE FÉE |
0159 | F. | NEW BAY | HOLLYWOOD LIGHTS |
0240 | F. | LOPE DE VEGA | NORMANDEL |
0297 | F. | LOPE DE VEGA | SEA THE GOLD |
0312 | F. | SIYOUNI | SOLAGE |