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vendredi 27 juin 2025
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De ma première expérience d’une

De ma première expérience d’une commission d’appel

Par Alain Kuntzmann, secrétaire général de l’Association des propriétaires de chevaux de courses au galop Île-de-France/Nord/Haute-Normandie

Le 23 avril 2025, je représentais un adhérent de notre association dont le cheval, victime du changement de ligne d’un concurrent à 150m de l’arrivée, n’a pu faire mieux que quatrième.

J’avais à disposition la vidéo de la course prise de face, ainsi que la « bible » de France Galop en la matière : Doctrine sur le constat d’une gêne et le jugement de ses conséquences. Ce document de 13 pages précise les modalités d’application de l’article 166 du Code des courses : Contrôle des gênes et des bousculades pendant le parcours.

Aurais-je accepté cette mission si, en visionnant le film, il m’était apparu que ce changement de ligne n’avait pas empêché le cheval de défendre ses chances, voire de remporter la course ? À coup sûr, non.

J’ai imprimé une dizaine d’arrêts sur image, du poteau des 400m à l’arrivée, en les annotant systématiquement avec les références à la doctrine. Tout semblait ainsi converger en faveur de notre thèse : notre cheval avait bel et bien été mis hors course, et ce à un moment où la gêne est considérée comme déterminante.

Présent sur les champs de courses depuis 65 ans, turfiste assidu depuis plus de 50 ans, j’ose prétendre savoir « voir une course ». Et savoir qu’à 150m de l’arrivée, dans une épreuve sur 1.200m, lorsque trois chevaux se présentent sur la même ligne, il est impossible de prédire avec certitude le vainqueur : certains craquent dans les 50 derniers mètres, d’autres trouvent le coup de rein décisif… la noble incertitude du turf.

Eh bien, cette incertitude n’a désormais plus cours !

Le changement de doctrine acté en 2018 par France Galop – « la rétrogradation d’un concurrent n’interviendra que si ce concurrent empêche un adversaire de le devancer » – en permet l’effacement.

L’argumentaire des commissaires

Les commissaires ont maintenu l’arrivée, estimant que les observations apportées ne permettaient pas d’avoir la certitude que le cheval gêné aurait devancé le cheval gêneur. Voici les justifications apportées :

1. « Le jockey de notre cheval avait tenté de progresser sans que son partenaire ne réagisse vivement et de manière tranchante avant la gêne. »

Notre cheval, placé derrière le futur lauréat, déboîte au poteau des 300m et rejoint la ligne des deux premiers juste avant l’incident.

2. « Pas la certitude que le cheval avait suffisamment de ressources pour devancer les poulains qui prennent les deux premières places et qui avaient dominé facilement le reste du peloton. »

Sur six partants, lorsque notre cheval vient à la hauteur des premiers, seuls quatre étaient encore en course.

3. « Le changement de ligne du cheval qui avait bousculé le nôtre lui avait, à lui aussi, fait perdre du terrain. »

Sans commentaire…

4. « Notre jockey aurait été trop sévère dans sa manière de reprendre son poulain. »

Ce jockey, c’est 20 ans de métier, 20.000 montes, quatre Cravaches d’or, et une probité reconnue par toute la profession.

5. « Notre jockey n’aurait pas mis en œuvre tout ce qui était possible pour obtenir une meilleure allocation. »

Une accusation grave, passible de sanctions prévues aux articles 163 et 164 du Code des courses.

6. « La gêne a eu lieu à une distance assez proche du poteau d’arrivée. »

C’est bien là tout le problème !

Deux enseignements à retenir :

1. Exiger un écrit de l’entraîneur et du jockey. Dans une situation comparable, il faudra systématiquement demander à l’entraîneur et au jockey de formaliser par écrit que le cheval était au top de sa forme, et qu’ils étaient certains de pouvoir l’emporter. Leurs certitudes de professionnels devraient primer sur les conjectures des commissaires.

2. Une doctrine à double tranchant. La doctrine de 2018 ouvre la porte à des dérives et à de possibles actions en réparation. Pour gagner une belle course, un jockey pourrait être tenté de gêner un concurrent, sachant que l’allocation compensera largement une éventuelle sanction.

Il est peut-être temps de réactiver la circulaire du 9 juillet 1979 : les jockeys sont les salariés du propriétaire du cheval le temps de la course. Or le Code civil prévoit qu’en cas de faute d’un salarié dans l’exercice de ses fonctions, l’employeur est civilement responsable des dommages causés.

Faut-il désormais que les propriétaires engagent des actions en justice pour obtenir réparation de préjudices économiques non indemnisés, faute d’une doctrine qui, à défaut d’évoluer, devient inadaptée ?

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