jeudi 2 mai 2024
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Barry Irwin : « Acheter en France est devenu plus difficile »

Barry Irwin : « Acheter en France est devenu plus difficile »

En l’espace de cinq jours, les trois derniers partants du grand syndicat international Team Valor ont tous remporté une course black type ! Il s’agit d’Easy, le 30 mars en Irlande, de Facteur Cheval, le même jour à Meydan, et de Nadette, le 4 avril aux États-Unis. Ces deux derniers ont été dénichés en France…

L’aventure de Facteur Cheval (Ribchester) est hors normes sur bien des points et elle a été évoquée en long, en large et en travers dans nos colonnes. Barry Irwin, l’homme du Team Valor, nous a confié : « Nous étions tous convaincus que nous allions gagner une grande course un jour avec lui. D’un côté, les copropriétaires sont bien sûr très heureux d’avoir remporté la Dubai Turf. Et comment ne pas l’être, outre l’aspect sportif, avec un cheval qui a déjà empoché bien plus de gains que son prix d’achat. De l’autre côté, c’est aussi un soulagement. Car il y avait une certaine frustration d’avoir un cheval capable de gagner un Gr1… mais qui ne l’avait pas encore fait. Facteur Cheval a causé bien du souci à ses premiers propriétaires et, à la lumière de ces évènements, je comprends pourquoi ils l’ont vendu aussi vite. J’imagine qu’ils voulaient tourner la page et aller de l’avant. Mais sur le moment, après des débuts aussi spectaculaires, j’ai été un peu surpris qu’il soit sur le marché. » Facteur Cheval fait partie de ces galopeurs qui n’aiment pas le contact des stalles de départ. Ce n’est pas le premier claustrophobe à porter les couleurs de Team Valor. Barry Irwin se souvient : « Triple Threat (Monsun) était comme ça. Monty Roberts, un ami de longue date, nous a bien aidés le concernant. Il lui a consacré deux semaines. Mais Triple Threat n’avait pas pu prendre part au Prix du Jockey Club (Gr1) à cause de cela car il était en repos après cette exténuante expérience de désensibilisation. »

Par Adrien Cugnasse

ac@jourdegalop.com

Une révélation

« À mes yeux, le Dubai Turf a été une révélation. Je me suis dit : “Voilà les conditions dont ce cheval a besoin pour s’exprimer, il a pu se relâcher et tout donner.” Il aime les pistes circulaires, le bon terrain et les épreuves avec du rythme. Quand on regarde ses places au niveau Gr1, on se rend compte qu’elles ont eu lieu sur des pistes fatiguées, même s’il a été capable de s’en sortir. Il avait aussi dû faire face à un manque de rythme, dans des courses tactiques. Et Facteur Cheval a le profil parfait pour l’Amérique ou pour Dubaï. Le mile d’Ascot, où il faut une certaine tenue, semble logique comme engagement suivant. Cela lui donne du temps pour récupérer de Dubaï aussi. Et puis ce sera très amusant pour les différents copropriétaires d’aller en Angleterre. Je vois en Facteur Cheval un profil à la Lord North, qui a aligné trois victoires dans la Dubai Turf. Et il me fait aussi penser à Gloria de Campeao (Impression), un sujet qui, le jour où son entourage a compris ce dont il avait besoin, n’a eu de cesse de revenir au même endroit pour répéter les bonnes performances. Avec Facteur Cheval, nous avons un hongre de 5ans, qui a peu couru et qui a donc tout l’avenir devant lui. À Meydan, il a été très convaincant lors de ses galops sur le dirt. Cela fait un moment que Jérôme nous en parle. Alors peut-être qu’un jour cela lui ouvrira des possibilités en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis ou aux États-Unis. Notre associé Gary Barber aimerait beaucoup voir au moins une fois Facteur Cheval dans une course américaine. La contrepartie, c’est que vous le reverrez certainement moins sur les hippodromes français. »

Son monde n’a pas de frontières

Lorsqu’il a commencé à acheter des chevaux à l’entraînement à travers le monde, la compétition était beaucoup moins rude sur ce type de profil. Désormais, Barry Irwin et ses clients doivent lutter avec une nuée d’Australiens, d’Américains, d’Asiatiques et de propriétaires du Golfe. Il faut donc essayer de découvrir des chevaux que les autres n’auront pas forcément vus ou de faire valoir d’autres arguments (au-delà de l’aspect financier) auprès des vendeurs : « Au départ, très peu de gens étaient actifs sur ce type de profil. C’était donc bien plus facile de trouver des bons chevaux à l’entraînement pour les courir à l’international. En Europe, en particulier, acheter des sujets à l’entraînement n’était pas dans la culture. Cela a bien changé. » Le Team Valor a beaucoup acheté en France, en Italie et en Allemagne. Sweet Stream (Shantou), gagnante du Prix Vermeille (Gr1), fut dénichée en Italie. C’est la deuxième mère de Making Dreams (Make Believe), lauréate du Prix Pénélope (Gr3) il y a quelques jours : « Il est désormais plus difficile d’acheter en Allemagne que par le passé. Mais nous achetons un ou deux chevaux tous les ans dans ce pays ou en Italie. Le plus facile, c’est l’Irlande. Les Irlandais sont des marchands de chevaux dans l’âme. Ils veulent vendre. Le plus difficile, c’est l’Angleterre. Leurs courses sont les meilleures, mais les propriétaires actifs en Grande-Bretagne ont énormément de moyens. C’est donc très difficile de les convaincre de vendre. En France, on peut trouver de bons chevaux. Mais le commerce est devenu plus difficile car plus concurrentiel. »

De retour sur le marché sud-africain

Les acheteurs comme Barry Irwin explorent donc tous les marchés possibles et imaginables, de la Pologne à l’Afrique du Sud, un pays où il a déniché de nombreux sujets capables de gagner des Grs1 aux États-Unis, à Hongkong et à Dubaï.

Depuis peu, les chevaux sud-africains ont de nouveau le droit de voyager jusqu’en Europe sans rester coincés pour une longue quarantaine à l’île Maurice. L’annonce du changement de réglementation a été reçue avec un immense soulagement par les propriétaires, entraîneurs et éleveurs d’Afrique du Sud. Ces problèmes sanitaires – de 2011 à 2024 – ont eu des conséquences terribles pour la filière sud-africaine qui était en (grande) partie dépendante des acheteurs internationaux (Asie, Australie et États-Unis) chez les yearlings, les chevaux à l’entraînement et les poulinières. Deux chiffres sont éloquents : l’Afrique du Sud a désormais moitié moins de poulinières et d’éleveurs actifs qu’en 2011, date où une quarantaine contraignante fut imposée. Pour mesurer l’impact des devises étrangères sur le marché sud-africain, il faut savoir qu’entre 1996 et 2011, le prix moyen des yearlings lors des ventes de sélection avait été multiplié par sept !

Dès l’ouverture des frontières, un vol a été affrété depuis l’Afrique du Sud vers les États-Unis par un groupe d’investisseurs, dont le Team Valor. Il a transporté onze chevaux dont la championne Princess Calla (Flower Alley) et d’autres gagnants de Gr1 tel que Beach Bomb (Lancaster Bomb), Isivunguvungu (What a Winner) et Make it Snappy (Dynasty). Barry Irwin analyse : « Les chevaux sud-africains n’ont pas la cote en Europe, même si notre championne Ipi Tombe (Manshood) avait fait le top price d’une vente d’élevage à Newmarket. Mais elle était un peu hors normes. À l’inverse, en Australie, les éleveurs sont très demandeurs. Tous les ans, vous voyez un très bon cheval dans ce pays issu d’une jument acquise en Afrique du Sud. J’en ai encore acheté une cette semaine avec un Australien. Elle va courir aux États-Unis avant d’aller au haras en Australie. » Parmi les femelles acquises par Barry Irwin en Afrique du Sud, on peut citer Alexandra Rose (Caesour). Envoyée en Australie, elle a donné Oleksandra (Animal Kingdom), qui fut à son tour importée aux États-Unis. Oleksandra est le premier cheval né en Australie à avoir remporté un Gr1 américain à l’occasion des Jaipur Stakes (Gr1) à Belmont Park. Secret Heart (Fort Wood), autre achat sud-africain, est la mère de Pluck (More than Ready), lauréate de la Breeders’ Cup Juvenile Turf (Gr1). Irridescence (Caesour), championne en Afrique du Sud, est la mère du double lauréat de Groupe aux États-Unis Hopper (Declaration of War).

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